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Intoxication élémentaire


Intoxication élémentaire

sarkozy

– Bonjour, monsieur le Président.
– Bonjour, cher ami. Alors que m’avez-vous prévu cette semaine ?
– Eh bien voilà, monsieur le Président, les élections régionales approchent et il y a un risque important que l’on se mette à parler de votre bilan à mi-mandat.
– Oui, effectivement, il ne vaudrait mieux pas. Alors, vous me suggérez quoi ?
– Un débat sur l’identité nationale…
– Ah, c’est pas mal comme idée. Tous ces cons vont se demander ce que c’est d’être français et pendant ce temps-là, ils oublieront qu’ils sont 3 millions chômeurs et qu’ils ont à peine de quoi croûter. Besson va me préparer ça aux petits oignons. Tout le monde va embrayer comme un seul homme, journaux, télévision, on ne parlera plus que de ça. Très bien mon vieux, très bien. Vous vous occupez des détails ?
– Pas de problème, monsieur le Président.
– Dites, j’ai une autre affaire sur les bras. Les chiffres de la sécurité sont catastrophiques, alors que j’ai quand même fait mes promesses de campagne là-dessus…
– Ne vous inquiétez pas, monsieur le Président, la cavale de Jean-Pierre Treiber commence à moins intéresser les gens. Faites-le arrêter, ça va faire la « une » pendant deux ou trois jours.
– Excellent… Hortefeux m’a dit qu’il était localisé depuis le début et qu’il attendait le moment propice. Ça plus le convoyeur de fond qui ne sait plus quoi faire du pognon qu’il a volé, on va bien détourner l’attention. Ce sera toujours moins risqué que MAM et ses anarcho-autonomes.
– Ah oui, monsieur le Président, j’allais oublier : il y a des ouvriers licenciés de Molex qui se sont déplacés à l’assemblée générale des actionnaires à Chicago et qui n’ont pas été reçus. Il faut faire attention avec les infos de ce genre. Si elles se répandent, ça va jouer sur le côté sentimental des Français. Et on va encore nous ressortir la mondialisation et le capitalisme sauvage, les petits contre les gros. Faudrait quand même éviter de leur faire trop de pub, à ces pue-la-sueur.
– Vous avez raison. On n’a rien sous la main, là ?
– J’ai bien une idée. Demandez à un de vos députés de déposer un projet de loi complètement débile mais qui fasse « sujet de société ». Je ne sais pas, moi, tenez, une loi pour interdire la fessée !
– La fessée ? Bah, pourquoi pas… Je demanderai à Fillon de me trouver un pédiatre dans les godillots de l’UMP. Ca doit pouvoir se faire assez vite.
– Attention quand même à ne pas être trop lourdingue, monsieur le Président. La dernière fois, quand vous avez voulu cacher la grève de la poste contre le changement de statut, ça a été très limite.
– Vous voulez parlez de l’affaire Marie N’Diaye et de son prix Goncourt avec ses déclarations sur la France « monstrueuse » ? Mais c’est vous qui m’avez donné cette idée !
– Certes, monsieur le Président, mais je ne vous ai pas dit de confier ça à Eric Raoult. Eric Raoult, monsieur le Président, vous vous rendez compte…
– Oui, vous avez raison, ce n’est vraiment pas le plus malin. Eric Raoult qui parle de littérature, c’est un peu comme si Laurence Parisot parlait augmentation de salaires : on n’y croit pas trente secondes. Sinon, il me faudrait quelque chose contre la fronde des élus locaux et la suppression de la taxe professionnelle. Je vais envoyer Fillon se faire huer par l’assemblée des maires de France, mais il me faudrait quelque chose de solide pour faire oublier que même des sénateurs de droite commencent à grogner.
– Bah, on a toujours la grippe A, monsieur le Président. Envoyez votre ministre de la Santé se faire vacciner devant les caméras.
– Et si le vaccin a des effets secondaires ?
– Vous savez, avec Bachelot, monsieur le Président, même s’il y en a des effets secondaires, on ne les verra pas plus que ça.
– Bon, je crois qu’on a fait le tour. Ah oui, il y a France-Irlande… Il ne faudrait pas qu’on perde, ça serait mauvais pour le moral. L’idéal, ce serait de gagner de manière à ce qu’on ne parle plus que de ça pendant au moins toute une semaine. Ca évitera de montrer qu’on a mis à la tête de l’Europe un Flamand réac et une Anglaise qui ne connaît rien aux Affaires étrangères.
– On pourrait gagner le match de manière honteuse, en trichant…. Une faute de main pour marquer un but, par exemple, monsieur le Président.
– Très bien ça, mon vieux. Vous pouvez m’arranger ça ?
– Je vais en parler avec Domenech, monsieur le Président.



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