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Prix Goincourt: "les lesbiennes bousculent toujours les idées et le jury n’a pas eu envie de reproduire les modes opératoires traditionnels..."


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Après le prix Goncourt attribué à Laurent Mauvignier, découvrez les lauréates du prix Gouincourt


L’inflation fait rage dans tous les domaines. Particulièrement au sein des prix littéraires français, dont le nombre ne cesse de croître chaque automne.

Énième avatar de cette fâcheuse tendance à couronner tout ce qui s’imprime : le 7 novembre, à Paris, le premier prix Gouincourt a été décerné. « Il existe des centaines de prix littéraires, et même un prix du roman gay, mais rien pour la littérature lesbienne », tempête sa fondatrice, Lauriane Nicol, dans les colonnes de Télérama. Pour combler ce vide abyssal, 14 ouvrages francophones ont été dûment sélectionnés par le média culturel Lesbien raisonnable, avant d’être soumis à un jury d’expertes en la matière.

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Cet éminent aréopage composé d’écrivaines, de comédiennes et de slameuses – dont Anna Mouglalis ou Virginie Despentes – a décidé de subvertir l’adage selon lequel « choisir, c’est renoncer » en désignant… quatre lauréates, ex aequo. « Les lesbiennes et les queers bousculent toujours les idées et le jury n’a pas eu envie de reproduire les modes opératoires traditionnels, basés sur l’élimination et la compétition. Deux lauréats, cela fait binaire, trois cela fait podium. Alors l’idée d’un carré s’est imposée », plastronne Lauriane Nicol, qui semble aussi savante en chiffres qu’en lettres.

Au-delà de cette hilarante démonstration, ce (non)-choix qu’on peut juger plus bouffon qu’audacieux relève d’un symptôme très contemporain : celui de la segmentation identitaire (sexuelle, raciale, politique) sans fin de la littérature. Le roman n’est plus l’expression d’une subjectivité, mais un lieu d’allégeance à un groupe d’appartenance. Se dessine ainsi un modèle de création, puis de récompense en circuit fermé, un safe space autarcique bien à l’abri des ambiguïtés du réel. Cependant, notre République des Lettres aura beau multiplier les médailles en chocolat, elle paraîtra toujours pingre face à l’insensée prodigalité du monde anglophone – où l’on compte plus de 80 prix littéraires estampillés LGBT.

Décembre 2025 – #140

Retrouvez cet article dans le Magazine Causeur N°140 de Décembre 2025

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