La justice impose de reconnaître les mariages gays entre États membres de l’UE. Comme d’habitude, c’est la méthode progressiste du fait accompli qui s’impose face à la souveraineté des nations, observe Elisabeth Lévy.
Tous les pays européens devront désormais reconnaître les mariages homosexuels conclus dans un autre pays. Jakub et Mateus, un Polonais et un Allemand-Polonais mariés en Allemagne ont obtenu, par un arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), la reconnaissance de leur union en Pologne, où le mariage gay n’existe pas. Refuser cette reconnaissance serait selon la Cour « une atteinte à leur liberté de circulation » et au « respect de la vie privée et familiale », qui les obligerait « à vivre en tant que célibataires » dans leur pays.
Méthode progressiste du fait accompli
Comme d’habitude, c’est la méthode progressiste du fait accompli. Mariés en France = mariés en Pologne. Plus curieux est ce droit à une vie familiale normale (Article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme) au nom duquel on interdit l’expulsion de malfaisants parce qu’ils ont le droit de pouponner leurs enfants français. De même, un texte européen impose la reconnaissance des enfants nés par GPA dans toute l’UE. Vous me direz qu’il s’agit de véritables petits enfants, auxquels je ne souhaite que du bien ; mais ils ont toujours un parent biologique, et ils pourraient parfaitement bénéficier d’un statut légal sans que l’on soit contraint de valider une pratique interdite presque partout en Europe.
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Une question de souveraineté
Qu’est-ce que ça peut vous faire que des homosexuels se disent mariés en Pologne ? me dira-t-on. Donc, selon cette logique, tout citoyen doit payer les impôts votés par son Parlement mais chacun fixerait à sa convenance les règles du mariage et de la filiation. C’est mon choix, c’est mon droit ! En réalité, c’est la négation même de l’existence de communautés politiques réduites à une collection d’individus.
Je suis évidemment ravie pour les heureux époux, mais c’est une question de souveraineté. Même si la CJUE prétend le contraire, son arrêt oblige la Pologne à reconnaître de facto le mariage gay. Le statut personnel n’est pourtant pas une compétence européenne. C’est aux citoyens de chaque pays de décider.
C’est toujours le même procédé. L’extension du domaine du droit permet à un tribunal de supplanter la souveraineté nationale. Au nom des droits individuels toujours supérieurs aux droits des nations. Le tout assorti d’un chantage au sentiment : condamnerez-vous ce joli bébé à n’avoir qu’un parent officiel? Priverez-vous ces amoureux des joies de la respectabilité ? Ce serait tellement cruel !
En réalité, cet arrêt de la CJUE est une nouvelle attaque contre les frontières et contre les nations considérées par nos juges comme des obstacles à l’épanouissement des individus. Dans cette logique, on ne voit pas pourquoi on priverait une femme habituée à porter sa burqa en Espagne de ce délicieux accoutrement en France. À ce compte-là, donnons les clefs aux juges et à la Commission européenne et fermons les Parlements nationaux. On fera des économies.
Cette chronique a été diffusée sur Sud Radio
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