Face à ce qu’elles estiment être des condamnations trop clémentes des violences sexuelles, certaines victimes en viennent à se faire justice elles-mêmes, invoquant la « loi du talion ». Une dérive inquiétante qui interroge à la fois l’autorité de l’État et la confiance dans la Justice.
« Face aux faibles condamnations contre les violences sexuelles et au sentiment de ne pas être entendues, certaines victimes ont choisi une solution radicale, la loi du talion » (Le Parisien).
Outre que la loi du talion est une régression civilisationnelle qui manifeste aussi bien une éthique personnelle défaillante que la faiblesse de l’autorité de l’État, elle révèle, de la part de ces femmes, la méconnaissance d’un certain nombre de principes essentiels à l’État de droit.
Les « faibles condamnations » qu’elles dénoncent relèvent d’un fantasme fondé sur la conviction que toutes les violences sexuelles devraient être mises sur le même plan et imposer, pour chacune, la sanction maximale. Ce qui est contraire aux règles élémentaires de la Justice.
Par ailleurs, à la cour d’assises, je n’ai jamais requis de peines « faibles » pour les crimes sexuels, quand aucun doute n’existait sur leur matérialité et leur imputabilité.
Depuis, sous l’influence positive de MeToo, je suis persuadé qu’aussi bien devant les tribunaux correctionnels que pour la justice criminelle, la pente n’est pas à l’indulgence mais à la rigueur. Avec parfois le risque que toute dénonciation d’une violence sexuelle soit perçue forcément comme vraie.
En effet, derrière cette révolte d’une minorité appliquant la loi du talion, il y a la volonté perverse de sortir les violences sexuelles de la justice ordinaire, avec ses preuves, ses doutes, ses contradictions, ses possibles relaxes ou ses condamnations justifiées.
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C’est l’argumentation que j’ai développée dans mon MeTooMuch? : non pas une critique sur le fond de ce mouvement mais sur la présomption de culpabilité pour tout homme visé par une plainte de nature sexuelle.
Ces réserves me rendent d’autant plus attentif, et indigné, face aux agressions sexuelles. « Dans les transports, les jeunes filles en première ligne » (Le Figaro). Selon les services de police ou de gendarmerie, « le nombre des victimes enregistrées pour violences sexuelles dans les transports en commun ont augmenté de 86 % entre 2016 et 2024 ». Les mineures représentent plus d’un tiers des victimes dans le métro, bus ou RER. Cette évolution déplorable met en évidence « un climat d’insécurité banalisé » et « la peur d’alerter les autorités compétentes ». C’est ce qu’explique très bien Julie, âgée de 17 ans : « Comme mes amies, j’ai la crainte de ne pas être crue. J’essaie de penser d’abord à d’autres méthodes pour m’en sortir, plutôt que d’appuyer sur le bouton de la borne d’appel ».
Quelle honte devant ces comportements d’hommes, souvent protégés par le bouclier de la cohue, usant de mots grossiers ou s’en prenant par des gestes à des jeunes filles tétanisées par la peur.
J’espère que si j’étais le témoin de telles indécences, je saurais intervenir d’une manière ou d’une autre…
Des femmes n’ont pas à se faire justice, des jeunes filles à avoir peur…
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