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N’ayons pas peur des mots, la France s’ensauvage


N’ayons pas peur des mots, la France s’ensauvage
Gérald Darmanin rend un hommage national au policier mort lors du contrôle routier de nuit d'un chauffard au Mans, 12 août 2020. Gile Michel/SIPA.

Au diable les pudeurs de gazelle : en délégitimant par principe l’action de ceux qui s’opposent à l’ensauvagement, on légitime l’ensauvagement.


Ensauvagement. Je ne suis pas de ceux qui préfèrent s’indigner de l’utilisation du mot plutôt que lutter contre la réalité qu’il désigne. Je pourrais évidemment parler d’augmentation des violences contre les personnes, en particulier des violences non crapuleuses, de la cruauté croissante de leurs auteurs et de la futilité tout aussi croissante des motifs qu’ils invoquent pour expliquer leur passage à l’acte, mais je préfère dire le réel sans fausse pudeur. Je parlerai donc d’ensauvagement.

La France vendue à la découpe

Mais pourquoi cet ensauvagement ? Comme pour bien des phénomènes, les causes en sont multiples et c’est leur convergence qui s’avère déterminante. Petit passage en revue.

D’abord une délégitimation de l’autorité publique dans son ensemble. Chacun a en tête la manière dont le mouvement des Gilets jaunes a été déconsidéré lorsqu’il était pacifique, puis récupéré par des extrémistes, chacun sait que l’état a alterné des laisser-faire coupables et des répressions d’une vigueur disproportionnée. On peut remonter plus loin : la complaisance envers les violences d’ultragauche comparée à une sévérité délirante envers d’autres, comme par exemple les Veilleurs, et j’en passe. Ajoutons les mensonges éhontés du gouvernement (ah, Sibeth et les masques !), la vente à la découpe de notre pays par ceux-là même qui devraient être les garants de ses intérêts supérieurs (Alstom….), et ainsi de suite. Mais ne nous leurrons pas : dans le phénomène d’ensauvagement, tout ceci n’est en réalité que marginal. Car l’ensauvagement ne vient pas d’une population traditionnellement attachée aux droits du Peuple ni aux intérêts de la France ! Et c’est d’ailleurs sans doute là le problème…

Les magistrats lâchent

Il y a la peur qui paralyse ceux qui devraient lutter contre cet ensauvagement. Peur de la réaction médiatique, bien sûr. Peur de perdre en prestige social : il est notoirement plus confortable d’adopter la posture du gentil qui compatit à la souffrance des pauvres victimes d’une société injuste que de se faire le chantre d’une riposte sévère contre la racaille. Rappelons donc qu’il s’agit de faux gentils, que cette posture faussement humaniste est surtout suintante de mépris, puisqu’elle présuppose que certains seraient intégralement déterminés par les conditions extérieures au point de ne pas être responsables de leurs actes, c’est-à-dire de ne pas disposer du libre-arbitre, c’est-à-dire de ne pas être des humains à part entière. Peur, aussi, des accusations inévitables d’islamophobie et/ou de racisme. Et peur, pour les forces de sécurité, de ne pas être soutenus par les magistrats en cas d’incident.

Car des décennies de travail du Syndicat de la Magistrature ont porté leurs fruits, et la fameuse harangue du juge Baudot est devenue la norme : « Soyez partiaux (….) Ayez un préjugé favorable (….) pour le voleur contre la police. » Les auteurs du « mur des cons » ont atteint leur but, et l’ensauvagement est très largement leur œuvre.

Crise du sens civique

Est-ce tout à fait un hasard si cette évolution idéologique est concomitante d’une profonde évolution sociologique de la France, elle-même composée de deux éléments distincts mais qui se renforcent mutuellement ?

D’abord la baisse du sens civique chez les français en général : difficulté à assumer la frustration, perte du sens du bien commun au profit de la défense jalouse des intérêts particuliers, lutte des classes, lutte des races, lutte des sexes, concurrence victimaire entre minorités en tout genre. Et bien sûr, dans cette société de moins en moins unie, repli sur les intérêts individuels au fil d’une compétition permanente de tous contre tous que ne peut qu’amplifier l’idéal de la « start up nation ».

Ensuite la proportion croissante d’habitants du territoire national dont la vision du monde et le comportement sont forgés par des « cultures de la honte », plutôt que par des « cultures de la culpabilité », comme l’a récemment souligné à très juste titre le Dr.Maurice Berger.

Voilà pour le long terme, déjà peu réjouissant. Mais cette année, des éléments ponctuels s’y sont ajoutés pour donner le résultat que l’on sait.

Les Traoré en vedette

Le mouvement Black Lives Matter bien sûr, et son avatar français autour de la famille Traoré et de ses soutiens. Abondamment relayés par des médias complices à l’affût d’une nouvelle mode, ils n’ont pas ménagé leurs efforts pour faire croire à certains que leurs origines et/ou leur couleur de peau leur donneraient un « droit de tirage » sur la société dans son ensemble, et sur les Blancs en particulier, et que bien évidemment toute loi s’opposant à leur volonté et à leurs pulsions ne pouvait qu’être le signe d’une oppression raciste systémique. Donc justifiant qu’on y contrevienne par la violence.

Naturellement, les accusations caricaturales portées contre les forces de sécurité (certes perfectibles mais tout de même loin du portrait délirant qui en a parfois été fait) ont elles aussi contribué à faire tomber les barrières. En délégitimant par principe l’action de ceux qui s’opposent à l’ensauvagement, on légitime l’ensauvagement.

Autre facteur qu’il est de bon ton de taire, mais qui pourtant relève de l’évidence : cette année, bien des ressortissants des « cultures de la honte » qui d’habitude rentrent « au pays » pour l’été sont restés en France, Covid19 oblige. Diantre ! La culture et l’éducation auraient donc un impact sur le comportement des individus ? Bouleversante révélation, la bien-pensance redécouvre ce que tout le monde à part elle sait depuis des millénaires : toutes les cultures ne sont pas égales dans leur rapport à la violence, au bien commun, au respect d’autrui. Certains respectent ceux qui sont respectables, d’autres ne respectent que ceux qui se font respecter.

Des médias réveillés 

Enfin, bien sûr, comme toujours en cette période les médias évoquent des faits qu’ils tairaient d’habitude. Non que l’ensauvagement ne soit qu’un effet de loupe médiatique, bien au contraire. Mais c’est ce qui explique qu’il ait fallu si longtemps pour en parler ouvertement.

Et au fond, c’est là notre chance : nier le réel n’a jamais permis de résoudre quelque problème que ce soit. Que le contexte si particulier de 2020 oblige à une prise de conscience collective de la réalité et de la gravité d’un phénomène qui dure depuis longtemps en une excellente chose. Car seul un mouvement d’ensemble de l’opinion publique obligera nos élus à faire ce à quoi ils se refusent depuis trop longtemps. Seule la clameur populaire leur permettra de comprendre que l’opprobre médiatique, qui s’abattra sur eux s’ils prennent enfin les choses à bras le corps, sera plus que largement compensée par la gratitude des Français.

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Haut fonctionnaire, polytechnicien. Sécurité, anti-terrorisme, sciences des religions. Dernière publicatrion : "Refuser l'arbitraire: Qu'avons-nous encore à défendre ? Et sommes-nous prêts à ce que nos enfants livrent bataille pour le défendre ?" (FYP éditions, 2023)

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