Hollande face à l’histoire


François Hollande président djihadisme antisémitismeFrançois Hollande, Bernard Cazeneuve et Manuel Valls ont très bien géré cette crise, de l’avis général. Comme l’écrit Michel Onfray, François Hollande est sans doute devenu président le dimanche 11 janvier 2015.

Que va-t-il faire de ce capital d’autorité qui lui est accordé ? Car à l’évidence, il ne peut en rester là. L’émotion créée par les attentats de Charlie Hebdo, de Montrouge et de la Porte de Vincennes est devenue un phénomène mondial. On notera à cet égard que la France inspire à la planète entière une considération que ses contempteurs intérieurs ont perdue depuis longtemps. Que faire de ces attentats et de l’admirable mobilisation nationale et mondiale qui a eu lieu dimanche ? Dire « merci, je vous ai compris » ? Ou répondre aux questions qui restent entières :

– Comment éradiquer l’antisémitisme en France ? Pas seulement l’antisémitisme criminel qui s’accroît d’années en années mais aussi l’antisémitisme verbal qui pourrit la vie de nos concitoyens juifs dans les écoles ? Comment faire en sorte que nos concitoyens de confession israélite se sentent encore chez eux en France et ne décident pas de nous quitter comme les y invitent le Premier Ministre israélien ? Nous en serions inconsolables après 1500 ans de vie commune en France.

– Comment lutter contre le djihadisme ? On ne parle pas ici d’un patriot act à la française, c’est-à-dire de mesures d’exception comme l’ont dit imprudemment des gens irréfléchis. Mais d’une application stricte de la loi et de la justice. Coulibaly avait été condamné en 2013 à 5 ans de prison fermes. Il n’était libérable théoriquement qu’en 2017. Pourquoi et comment était-il libre en 2015 pour tuer 5 personnes ? Du côté policier, après les errements de l’affaire Merah puis ceux des frères Kouachi, on est en droit de s’interroger aussi sur l’efficacité de la DGSI. Là encore, sans mettre en place un arsenal sécuritaire poudre aux yeux, qu’est-ce que le pouvoir compte faire pour des services de renseignement manifestement un peu dépassés par les événements ?

– Comment mesurer l’impact du fascisme vert sur la population française ? Il est bien évident qu’il ne saurait être question ici de stigmatiser l’ensemble de la population musulmane en France. Mais à l’inverse l’angélisme serait criminel au regard du vivre ensemble au sein de notre nation. Combien sont les partisans de l’islamisme radical ? Combien sont ceux qui les regardent d’un œil bienveillant ? Combien sont ceux qui sont prêts à s’y soumettre ? Au vu des difficultés à faire appliquer la minute de silence dans certaines écoles, il serait dangereux de se voiler la face. Ne pas voir le problème s’il existe, c’est s’interdire de le traiter. Et surtout quel traitement le gouvernement compte-t-il administrer, en particulier via l’école de la République, à ceux qui pensent qu’il est juste de tuer un blasphémateur ?

– Comment remettre la laïcité au centre d’un projet de société ? Car au-delà des fascistes verts, il existe aussi toute une frange de la population qui ne veut pas admettre les codes de la laïcité tels que la France a su patiemment les forger. Ce ne sont pas les mêmes que les codes anglo-saxons. Ils visent plus à l’assimilation qu’à l’affirmation. Il s’agit plus de gommer les différences que de les révéler. On n’éludera plus ce débat non plus. Voulons-nous une société qui favorise l’émergence des communautés et qui prend le risque de les dresser les unes contes les autres ? Ou voulons-nous une société qui fait de chaque individu un citoyen libre de penser, égal des autres et fraternel avec les autres ? Tant qu’on ne trouvera pas les moyens de répondre par un grand élan national à cette question (un référendum ?), rien ne sera réglé.

– Comment clarifier nos alliances extérieures ? Il est certes important de trouver des débouchés à nos Rafale, de trouver des financements pour payer nos footballeurs ou pour rénover nos hôtels de luxe. Mais comment mettre en balance ces intérêts avec l’intérêt supérieur de la paix civile en France ? Alors oui, François Hollande doit reposer la question de l’alliance avec l’Emir du Qatar qui étend l’influence salafiste dans nos banlieues et finance en sous-main les djihadistes de Daech. Alors oui il faudra clarifier nos buts de guerre en Syrie : abattre Bachar Al-Assad ou les islamistes qui le combattent ?

François Hollande fait face à de grands défis depuis dimanche. S’il décide de cacher la poussière sous le tapis en se comportant en politicien madré, il prendra alors le risque de voir se cliver la société sur ces sujets de fond qui n’auront pas été traités. Il verra alors s’engager une guerre civile larvée entre les partisans du sursaut républicain et les partisans de la dissolution française dans l’absolution donnée à l’Islam de ses dérives. Une guerre civile qui peut mener la France au Chaos. On l’a vu malheureusement trop souvent dans notre Histoire.

À l’inverse, s’il assume sa nouvelle autorité, il peut provoquer un choc salutaire en France et engager un vrai débat national tranché dans les urnes pour choisir le modèle de société que nous voulons. S’il rend ce service à la France, il restera pour toujours un grand président.

Photo : Chamussy/SIPA/1501151405



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