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Faites l’amour, pas la morale


image : alexandra feo

La chrétienté est une affaire trop sérieuse pour être confiée aux seuls chrétiens. Longtemps, l’Occident a été défendu contre les invasions barbares par des soldats du Christ qui ne s’embarrassaient pas trop de charité. Aujourd’hui, une partie des chrétiens, disons la partie de gauche, revenue à une interprétation plus littérale des Evangiles, semble être devenue incapable de défendre notre monde. La frontière est vue comme un obstacle à l’accueil de l’étranger dans son altérité et le soutien aux sans-papiers comme une expiation. À l’écoute des autorités ecclésiastiques qui désapprouvent systématiquement toute tentative pour protéger les peuples et les cultures contre les immigrations massives, les bons samaritains ouvrent leurs cœurs à la substitution démographique en cours. Ils pourraient ramener la gauche au pouvoir et en avant pour plus de tolérance, d’ouverture et de régularisation massive.

Si on ne peut pas trop compter sur ces « cathos Télérama » pour nous sortir d’affaire, il nous reste les chrétiens de droite. Fermes défenseurs de la civilisation de leurs ancêtres, ils rechignent à tendre l’autre joue et semblent prêts à lancer la reconquête des territoires et de la courtoisie perdus. Mais il y a un hic. Tenants d’un ordre moral catholique pour qui hors de l’église, il n’y a point de France et point de sexe, ceux-là pourraient, en pesant à droite, obtenir des lois instaurant l’emmerdement maximum pour tous.

Chrétien débridé du cœur ou le catho coincé du cul ?

Et moi dans tout ça ? Sur lequel de ces deux citoyens puis-je compter pour sauver la République et la France ? Celui qui veut accueillir, partager, métisser, régénérer le pays dans un échange multiculturel sans tabous, ou cet autre qui rêve de régenter la vie sexuelle des Français comme s’il avait oublié son adolescence et la trique de ses dix-sept ans ? Le chrétien débridé du cœur ou le catho coincé du cul ?
Il faut lire la presse de droite catho et Causeur dans ses jours réacs, pour comprendre que l’ordre moral, comme Jésus-Christ, n’est pas mort et qu’il bande encore. Si vous l’ignoriez, le Christ est vivant, ce n’est pas moi qui le dis et si ça dépasse votre entendement, laissez tomber, c’est que vous n’avez que votre raison pour raisonner.

Un peu de morale ne nuit pas, mais que l’ordre se contente d’être public et qu’on nous laisse nos désordres privés. Au sujet de l’accès à la contraception dans les lycées, contrairement à François Taillandier, je doute qu’on puisse répondre romantisme et abstinence à des adolescents qui n’attendront pas de savoir comment ça marche pour jouir de la plus vieille liberté du monde. On peut toujours comme le suggère mon camarade, (je n’ose pas écrire confrère, il n’est pas plus menuisier que je ne suis académicien), les prendre par les sentiments et leur échanger du rêve contre leur réalité. Je crains que ce ne soit d’aucun secours pour tempérer les érections, principales causes d’échecs scolaires, selon une étude menée sur un collégien : moi. La jeunesse veut baiser sans conséquences et je ne vois pas bien en quoi un accès aux pilules ou aux capotes pose problème. Personne n’est obligé d’en croquer.

Le sexe, le plus beau cadeau du singe à l’homme

On peut imaginer un monde sans internet, sans Ipad, sans nucléaire et même sans mondialisation mais sans sexe, cela relève de l’utopie la plus délirante et le meilleur moyen d’éviter de tomber dans une sexualité déviante, c’est encore d’en avoir une. Les prêtres que dieu a soumis à la tentation mais que la police et la prison ont délivrés du mal en sont des exemples vivants. Après tout, le sexe n’est-il pas le plus beau cadeau que le singe ait légué à l’homme ou que, selon le mythe judéo-chrétien, le bon dieu lui ait donné ? À lui et à la femme si je me fie à ce que j’entends. Pourquoi diable empêcher des jeunes gens débordant de sains appétits sexuels de jouer avec leur corps par simple recherche du plaisir, sans chercher à se reproduire ou à se marier comme des animaux ou des fondamentalistes ?

Mais le pire, pour les curés de tous poils, dans la série de pêchés qui contrarient la conception, après la masturbation et la contraception, c’est l’avortement. Comme François Taillandier, les chrétiens les plus révoltés par ce « meurtre de masse » qualifient allègrement l’IVG de « boucherie ». On se demande comment on nommait cette opération avant l’époque bénie de sa légalisation et de sa médicalisation, quand la clandestinité de la chose jetait des pauvresses sur les tables des faiseuses d’anges, pour qui la calotte ne débordait pas de charité chrétienne puisqu’on leur coupait la tête sous Pétain, qui devait sauver la France, au bras du clergé et au nom du Sacré Cœur.

Et ta sœur, Zemmour ?

À coté du principe moral, il arrive que l’argument démographique soit avancé pour dénoncer ce déficit de petits Français que les « salopes » creusent et que l’immigration comble joyeusement grâce aux allocations indigènes, (Ici, c’est nous). Il faut rappeler à ces fins stratèges qui veulent faire de la politique avec le ventre des femmes comme de vulgaires islamistes qu’on aura beau enfermer dans des usines à pondeuses toutes les femelles occidentales, on ne fera pas le poids face au tiers-monde. Zemmour l’a assez répété, il n’est pas humain de mettre son frère de civilisation en concurrence avec le travailleur pauvre. Et ta sœur, Eric ?

Enfin, chacun fait ce qu’il veut mais ça ne plait pas à tout le monde. Tant que la pilule ou l’IVG ne sont pas obligatoires et que la fellation ne figure pas parmi les épreuves du bac, je ne comprends pas pourquoi les cathos grimpent au rideau dès qu’on envisage de nous faciliter la vie sexuelle, ou plutôt je comprends avec Léo Ferré que « Le problème avec la morale, c’est que c’est toujours la morale des autres ». Nous faisons tous des choses qui en choquent ou en dégoutent d’autres. Les Anglais ne nous empêchent pas de manger des escargots, nous pouvons tolérer que des moustachus se roulent des pelles le jour de leur mariage, tant qu’ils ne nous obligent pas à proclamer que c’est l’avenir et le progrès. C’est aussi ça la laïcité.

La liberté des mœurs, fleuron de l’identité française

Le mois dernier, un dossier de Valeurs Actuelles apportait sa contribution au débat sur la laïcité en nous faisant bouffer de la chrétienté par la racine jusqu’à épuisement. Il est sûrement nécessaire de rappeler aux nouveaux citoyens qui se croient en pays conquis « Les racines chrétiennes de la France » mais il n’est pas inutile de préciser que l’arbre français est aujourd’hui républicain et laïque. Si nous sommes tous émerveillés par le patrimoine hérité du Moyen-âge, nous sommes tout autant décidés à ne pas ressusciter l’esprit de ce temps. Sommes-nous condamnés, pour résister à l’islamisation, cet archaïsme d’importation, à faire revivre un obscurantisme local qu’on croyait mort de sa belle mort, obsolète et dépassé ? Les églises se vident depuis que le bonheur, cette idée neuve de deux siècles en Europe, a fait son chemin et ce n’est pas en rappelant les Français à la messe qu’on les mobilisera. La liberté des mœurs acquise ne rentrera pas dans le tube catholique, elle s’épanouira dans le cadre laïque. Elle est un fleuron de l’identité française, un bien plus précieux qu’un souvenir de communion et peut être un rempart contre l’invasion de cultures liberticides et régressives. Enfin, l’intégration n’est pas seulement une contrainte, elle est aussi une main tendue. Dans notre affaire de contraception au lycée, la jeune fille musulmane, pour vivre comme ses copines sans gêner ses parents, a moins besoin de racines chrétiennes que d’une pilule laïque et républicaine.

Nous sommes le monde libre et libérateur. La fille aînée de l’église est une sainte-nitouche au grand cœur, Marianne une femme libre, alors en amant passionné de la liberté, j’affirme, avec mon compagnon Jean (on s’appelle comme ça entre anarchistes) : « L’ordre moral mon cul, la liberté m’habite!»



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Cyril Bennasar, anarcho-réactionnaire, est menuisier. Il est également écrivain. Son dernier livre est sorti en février 2021 : "L'arnaque antiraciste expliquée à ma soeur, réponse à Rokhaya Diallo" aux Éditions Mordicus.

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