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Valls/Goasguen : grand guignol à l’Assemblée


Valls/Goasguen : grand guignol à l’Assemblée

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Et c’est reparti pour un tour ! Hier, à l’Assemblée, pendant la passe d’armes Valls/Goasguen, les députés nous ont rejoué le couplet des vierges effarouchées. Cette fois, droite et gauche ne sont pas en reste pour se lancer des procès en non-républicanisme et s’envoyer des torrents d’immondices à la figure, le tout mis en scène dans le pire style pompier.

Claude Goasguen, député-maire du 16e arrondissement de Paris, a tiré le premier en chahutant dans le public, accusant Manuel Valls de complaisance à l’égard des émeutiers nantais du week-end dernier prétendument issus de l’« ultragauche » –  les milieux du renseignement évoquant carrément des « militants situationnistes »[1. La DCRI ignore-t-elle que l’Internationale situationniste (1957-1972) n’a jamais eu aucune vocation militante ? Que cette avant-garde intellectuelle de quelques membres s’est toujours défendu de prêcher une quelconque idéologie, fût-elle baptisée « situationnisme » ? Loin d’être prosélyte, l’I.S n’a été qu’une longue suite d’exclusions. Mouchards, encore un effort pour être crédibles !], vaste blague ! Pour faire bonne figure sur la sécurité, première préoccupation des habitants du 16e majoritairement insensibles à la crise économique mais agacés une fois l’an par les débordements des supporters du PSG, Goasguen a cru bon persifler pendant qu’un de ses collègues interpellait le ministre de l’Intérieur lors des questions au gouvernement. C’est de bonne guerre.

Valls, le clown « blancos » de ce tragi-comique duo, rabaisse alors un peu plus le niveau du débat en rappelant la jeunesse militante très droitière de son contradicteur[2. Goasguen ayant été une groupie de Tixier-Vignancour dans sa jeunesse, beaucoup le croient passé par Occident comme les Madelin, Longuet, Devedjian, et tous les autres ministres qui, c’est bien connu, firent de la France un potentat néo-fasciste dès qu’ils accédèrent aux ors ministériels.] : « Face à l’ultra-gauche, face à l’ultra-droite, face à cette extrême droite, eh bien nous répondons. Monsieur Goasguen, vous en venez, de l’extrême droite, vous savez ce qu’il en est. Nous, nous ne sommes complaisants avec personne, vous, vous l’êtes. » tonne un Valls courroucé, se complaisant dans l’énumération des dégâts provoqués par la Manif pour tous – peut-être un bris de vitre en un an, agrégat de groupes « antirépublicains » que le matamore de la Place Beauvau a juré de combattre comme un seul homme. Indignation surjouée sur les bancs de la droite, l’UMP quitte la séance et exige des excuses. Une scène de grand guignol comme on en a vue cent fois, de mémoire de vingtenaire.

Cette petite troupe de mauvais comédiens ne bénéficie pas du statut d’intermittents du spectacle. Et pour cause : leur jeu déplorable cache de très basses intentions politiciennes. Goasguen compte bien rempiler pour un second mandat de maire du 16e, dans un bastion de l’UMP qui voit proliférer les dissidences de droite à chaque échéance.  Auteuil-Passy, tel est son ghetto. Réapparaître dans l’hémicycle à un mois des municipales, après avoir fait la tournée des marchés du 16e ces derniers temps, voilà une stratégie locale grosse comme une maison. Mais comme disait je ne sais plus quel pied-bot nazi, plus c’est gros, plus ça passe

Rien de nouveau sous le soleil de la gauche vallsienne (non, inutile de crier à l’oxymore…). Après avoir condamné l’antisémitisme et le racisme tout l’hiver, le Sarkozy du PS poursuit sa stratégie d’enfumage : jugez-moi sur mes ennemis, pas sur mon bilan. En bon gardien de l’ordre, Valls nourrit la grande peur des bien-pensants : mouillant la manif pour tous le lundi, tapant sur les antisémites blacks-blancs-beurs le mardi, inventant un péril d’ultragauche tout aussi fantasmatique que le danger fasciste le mercredi. Le complot rouge-brun revient et Sylvain Bourmeau n’est pas content… Bref, au cas où vous ne l’auriez pas encore compris, Valls se veut au centre du jeu, posant en vigie de l’orthodoxie hollandiste pour mieux occulter ses convictions libérales aussi impopulaires à gauche que dans l’opinion.

Sur l’essentiel, Valls et Goasguen pourraient probablement s’entendre pour appliquer un grand Bing Bang libéral à la France, comme l’espérait Rocard lors du second septennat mitterrandien. Que cela nous plaise ou non, les cultures politiques ont la vie dure. Goasguen libéral-conservateur héraut de la Manif pour tous devenu l’ennemi juré de Valls le social-libéral, on se pince pour y croire. En Italie et en Allemagne, on aurait plutôt imaginé ces deux–là dans un gouvernement de grande coalition, de ceux qui font tomber les masques et révèlent les faux-semblants. Tout compte fait, cette petite scène de ménage sans conséquences prouve au moins une chose : en politique, le mariage n’est pas encore pour tous…

*Photo : M Glasgow.



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est journaliste.

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