
La première partie nous ramène en 1997, dans la ville de Fentum, au nord-est de l’Empire du Milieu : grisaille, misère, laideur, c’est encore la Chine héritée de la Révolution culturelle ; y perdure un sous-développement qui paraît suinter des murs, s’imprimer jusque sur les visages. L’image assez cradoque du film, d’un bout à l’autre, semble y faire curieusement écho, d’ailleurs. C’est un autre monde, à des années-lumière de l’actuelle puissance économique faramineuse qu’on connaît – commerçante, numérisée, dominatrice, aux métropoles hérissées de tours dupliquées sans fin à l’identique…
Au milieu de cette crasse d’un autre temps et dans cette déprime gluante, une noria de taxis, boîtes à savons peintes en rouge, attendent le client. Il advient que des chauffeurs sont assassinés, leurs véhicules incendiés – meurtres inexpliqués ; l’enquête piétine, tandis que Li Fei rêve de quitter Fentum pour le Sud du continent, alors perçu comme un eldorado… Dans une seconde partie, Des feux dans la plaine se transporte en 2005, à l’époque où le Parti communiste décrète en quelque sorte la loi de la jungle, sous le slogan « Réforme & Ouverture ». Un jeune policier décide de rouvrir le dossier enterré huit ans plus tôt…
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Sous l’alibi d’un thriller qui finit par prendre un tour de violence incendiaire, horrifique, à la limite du gore, le cinéaste s’attache surtout, semble-t-il, à porter un regard rétrospectif sur la métamorphose radicale de son pays au tournant du millénaire. Assez confuse, laborieuse et touffue, l’intrigue laisse dubitatif, même si le portrait reste saisissant dans son extrême cruauté.
Des feux dans la plaine. Film de Zhong Ji. Chine, couleur, 2024. Durée : 1h41.
En salles le 9 juillet 2025.