Affaire Ménard: Surtout, ne rien voir!


Affaire Ménard: Surtout, ne rien voir!

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La France est en émoi. L’infréquentable Robert Ménard a levé le voile sur une des plus belles hypocrisies de la république. Il aurait comptabilisé le pourcentage d’élèves immigrés de sa commune… Comment ? En consultant les inscriptions à l’école qui, comme dans toutes les mairies, relèvent de ses prérogatives. L’omniprésente Najat s’est immédiatement saisie du problème. Formant pour l’occasion un émouvant chœur des vierges avec Cécile Duflot, elles ont fustigé à deux voix l’attitude offensante, excluante – un mot inventé pour l’occasion –, antirépublicaine, discriminante. Elles ont déploré les valeurs foulées au pied, le bras de fer avec l’état de droit, les dérives, la milice, alors que le ténor Christophe Borgel entonnait la partition de la stigmatisation, du nauséabond. Une exceptionnelle richesse de vocabulaire…

Tous étaient d’accord, Valls compris, sur une formulation de « honte au mandat de maire », de « menace pour le vivre ensemble » et d’atteinte au « principe de laïcité ». Le procureur de la république a été saisi. Il fut un temps où Manuel Valls n’était pas opposé au principe de réalité, voire de réalisme, qui conduirait à s’informer de l’identité des personnes qui vivent sur notre sol. Avant d’endosser la posture de l’indignation permanente, n’avait-il pas demandé –hors caméra croyait-il – à ce que plus de blancos, de white, de blancs soient présents lors d’une visite officielle à Evry. Blancos, c’est plutôt discriminant ou nauséabond professeur Vallaud-Belkacem ?

Par ailleurs, un maire qui prend des libertés avec la loi, c’est problématique… mais n’est-ce pas déjà arrivé ? Neuf ans avant la loi Taubira, le maire de Bègles avait décidé de son propre chef d’unir deux hommes. Il avait certes été suspendu un mois et les tourtereaux avaient vu leur union annulée, mais se souvient-on de propos d’une telle violence à son égard, d’une telle « stigmatisation » ?

L’actualité bégaie… chaque semaine un esclandre plus gros que le précédent vient alimenter l’insatiable tintamarre public et c’est une fois encore par l’extrême droite que le scandale arrive… Dans une chorégraphie millimétrée, les maîtres à penser socialistes organisent l’indignation nationale. Et ça marche, chaque citoyen finit par adopter ce vocabulaire connoté. Ce matin, sur RTL au sujet de l’uniforme à l’école, une jeune femme témoigne : « Quelle ne fut pas ma surprise de voir que chaque école était stigmatisée par une couleur »… La couleur de blouse, c’est plutôt stigmatisant ou excluant professeur Vallaud-Belkacem ?

L’inquiétude des Français à l’égard de l’immigration va grandissant. L’absence d’informations fiables sur la question en est un des carburants. Comment imaginer qu’un sujet soit pris en compte s’il n’est même pas évaluable ? Comment apporter des réponses satisfaisante à des questions dont on ne connaît ni les détails ni l’ampleur ? Où, à part en France, est-il admis que pour mieux traiter les problèmes, il faut les ignorer ?

Pourquoi est-il impossible en France d’appliquer ce qui se pratique dans les pays anglo-saxons sans émotion ? En quoi connaître l’origine des personnes conduirait automatiquement à en brimer certaines ? Ce débat est d’une hypocrisie révoltante : d’une part parce que le comptage existe dans le cadre de certaines enquêtes, d’autre part parce que même dans les rangs de la gauche prisonnière de ses doctrines, l’opportunité d’une telle démarche est reconnue par certains. L’interdiction de statistiques, supposée garantir le « vivre ensemble » conduit à cristalliser les peurs, y compris irrationnelles.

En France, pays du tabou, nommer les choses est un délit. Il est interdit d’appeler un chat un chat. Tout juste est-il permis de fermer les yeux et d’attendre des jours meilleurs… Une méthode qui a d’ailleurs fait ses preuves : on a attendu la reprise et « la reprise, elle est là ». Peut-être qu’à force de se cacher un problème, « le problème, il disparaît » ?

*Photo : © AFP Pascal Guyot



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