Les Hollandais votent demain. Geert Wilders est favori du scrutin, mais…
Dans le pittoresque village de pêcheurs de Volendam, M. Geert Wilders a lancé, samedi, un avertissement solennel à ses partisans. « La démocratie néerlandaise mourra si notre parti est exclu du prochain gouvernement ! » a-t-il tonné, entouré de gardes du corps rendant tout contact avec le public difficile. Aussi, le chef du Parti pour la liberté (PVV) a dû hausser la voix pour se faire entendre lors de ce modeste meeting tenu en terrain conquis, à la veille des fameuses élections législatives anticipées du mercredi 29 octobre.
Celui qui n’a jamais été seul au moins une fois dans sa vie…
Tous les sondages le donnent encore gagnant. Le PVV pourrait décrocher une trentaine des 150 sièges de la Chambre basse. Mais cette victoire annoncée pourrait bien avoir un goût amer : la plupart des grands partis refusent désormais de s’allier une seconde fois à celui dont le goût du compromis n’a jamais été la principale vertu.
Ces derniers jours, l’écart entre le PVV et l’alliance de la gauche (GroenLinks/PvdA, union des écologistes et des travaillistes) s’est resserré. Tandis que le parti de M. Wilders perd un peu de terrain, les formations de gauche, les chrétiens-démocrates et les libéraux progressent légèrement. En début de campagne, M. Wilders semblait pourtant assuré d’égaler, voire d’améliorer, sa performance de novembre 2023, lorsque son parti avait remporté 37 sièges. Ce qui a changé en très peu de temps, selon des commentateurs, est la crainte réaliste de bien de ses partisans qu’un vote pour M. Wilders serait un vote perdu. Message martelé avec un certain succès par la gauche et la droite modérée, ou, selon M. Wilders, « molle ».
Menacé de mort
C’est que l’homme politique de 62 ans, qui vit sous des menaces de mort islamistes depuis deux décennies, est accusé d’avoir dynamité « sa » coalition gouvernementale sortie des urnes il y a près de deux ans. Qui avait suscité un immense espoir parmi le « peuple de droite ».
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L’été dernier, M. Wilders avait soudainement imposé à ses partenaires une liste de dix nouvelles mesures visant à durcir encore la politique migratoire. Face à leur refus, il avait brutalement retiré le PVV du gouvernement. Celui-ci, déjà fragilisé par des querelles incessantes et des résultats médiocres dans la lutte contre l’immigration extra-européenne, n’avait pas survécu. Le Premier ministre, M. Dick Schoof, sans étiquette, avait alors pris la poudre d’escampette, écœuré d’être en permanence la tête de Turc de M. Wilders, resté simple parlementaire.
Depuis, les anciens alliés du PVV — notamment les libéraux-conservateurs du VVD — ont fermé la porte à toute nouvelle coalition. Quant aux partis de gauche et aux chrétiens-démocrates, ils refusent catégoriquement de s’allier à celui qu’ils considèrent comme un « raciste », pourtant de « sang mêlé » néerlandais-indonésien.
JA21, le nouveau venu
Déçus, de nombreux électeurs du PVV semblent se tourner vers un autre parti de droite nationale, JA21, qui prône une ligne dure sur l’immigration mais souple dans sa volonté de former des coalitions. Nécessité absolue dans un pays où les 150 sièges du Parlement sont répartis entre une quinzaine de partis…
Ces derniers mois, les Pays-Bas ont connu une cinquantaine d’émeutes, parfois violentes, liées à l’accueil des demandeurs d’asile. D’après l’audiovisuel public, une trentaine de maires auraient cédé face aux manifestants. La fureur atteignit des sommets cet été après le meurtre d’une jeune Néerlandaise, Lisa, attribué à un demandeur d’asile africain déjà accusé de plusieurs agressions.
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Même GroenLinks/PvdA, dirigé par l’ex-commissaire européen Frans Timmermans, veut maintenant réduire considérablement l’afflux de réfugiés. Mais les dirigeants de gauche accusent M. Wilders de semer la haine avec de petites phrases provocatrices, telles que: « Les Néerlandais en ont assez de voir certains quartiers de Rotterdam ressembler à Marrakech » ou encore: « Les vieux partis ont transformé les Pays-Bas, en un demi-siècle, en un pays à moitié arabe. »
L’immigration n’est pas le seul sujet au cœur de la campagne. La crise du logement — pénurie, flambée des prix et listes d’attente interminables pour un logement social — y occupe également une place de choix. Beaucoup de Néerlandais reprochent aux politiques de réserver en priorité les logements sociaux aux réfugiés régularisés. Une frustration qui nourrit le ressentiment envers les immigrés. Le déclin de l’État-providence figure aussi parmi les thèmes phares. M. Wilders promet de le restaurer, finançant ses mesures grâce, dit-il, à la suppression de l’aide au développement et au renvoi des réfugiés syriens ainsi qu’à la fermeture des centres de demandeurs d’asile.
Une image à adoucir ?
Fait rare, en fin de campagne, M. Wilders a présenté des excuses pour le comportement de deux de ses députés, auteurs d’un photomontage réalisé à l’aide d’intelligence artificielle montrant M. Timmermans vidant la poche d’un Néerlandais pour donner l’argent à une femme voilée. Ce geste a été interprété comme un gage de modération envers de possibles alliés…. Le chef du PVV a juré qu’il serait cette fois un partenaire « loyal » si son parti sortait à nouveau vainqueur des urnes. Reste à savoir si quelqu’un le croira ?
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