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Facebook m’a accusée de soutenir Daesh

Islamisme: la censure à géométrie très variable de Facebook


Facebook m’a accusée de soutenir Daesh
Lina Murr Nehmé

La censure à géométrie très variable des agents de Facebook


Oui, Facebook m’a accusée de soutenir Daesh. Il a fermé mon compte, et quand j’ai fait appel, il m’a écrit : «Nous n’autorisons pas les menaces crédibles pour faire du tort à autrui, l’appui à des organisations violentes, ou un contenu très graphique sur Facebook».

Le «contenu très graphique», c’était une capture d’écran d’un communiqué de Daesh. C’est très dangereux, la calligraphie, comme vous le savez. Et l’article qu’elle accompagnait était plus dangereux encore, puisqu’il informait le public que Daesh avançait vers la Méditerranée, et que son but était d’occuper l’Europe. Comme vous le voyez, ce sont des «menaces crédibles». Et de mon article dénonçant Daesh, il conclut que je soutiens Daesh. Soit le modérateur ne connaît pas le français, soit il fait exprès.

La modération Made in Marocco de Facebook

Car en plus, je suis la seule célébrité au monde à avoir brûlé le drapeau de Daesh à visage découvert et à en avoir publié la photo. Cela m’a valu des centaines de menaces de mort de la part de Daesh qui était alors en plein essor. Alors, me faire accuser de soutenir Daesh !

Je vous jure que je suis un saltimbanque de l’autocensure. Je ne dénonce un scandale que lorsque je peux avancer des preuves. Si je n’étais si prudente, je n’existerais plus après vingt-cinq ans à dénoncer tant et tant d’assassins et autres criminels qui courent en liberté aujourd’hui et qui ont une latitude de parole que je n’ai pas[tooltips content= »Voir par exemple Fatwas et Caricatures, Salvator, 2015, et Tariq Ramadan, Tareq oubrou, Dalil Boubqakeur : ce qu’ils cachent », Salvator 2017. »](1)[/tooltips]. Mais aucun d’eux n’a pu m’intenter un procès.

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Mais je n’ai pas échappé aux moukhabarate tapis dans l’ombre de Facebook en France. Pardon, au Maroc. Car Facebook-France est modéré au Maroc. C’est un genre d’occupation sournoise. Une occupation des cerveaux. Au lieu des moukhabarate égyptiennes, syriennes, irakiennes, saoudiennes, les Français ont le bonheur d’avoir les moukhabarate marocaines. C’est kif kif. Parfait pour vous conditionner et faire de vous un robot intellectuellement. Un robot programmé pour ne pas déplaire au modérateur qui vous épie dans le silence, de l’autre côté de la Méditerranée. A noter que je ne jette pas la pierre au Maroc : un islamiste est le même, en France ou au Maroc. Mais ce qui est grave, c’est qu’on fasse modérer les réseaux sociaux par n’importe qui. Et qu’on les oblige à décider, en une minute et demie, s’ils ont affaire à un terroriste ou non. Les humains ne sont pas des robots.

L’attentat à la Défense dont vous n’avez pas entendu parler

Je vais donner un exemple du danger que cette situation fait courir à toute personne qui ne pratique pas l’autocensure en France.

Vous souvenez-vous de ce charmant professeur d’anglais, John Dowling au Pôle Léonard de Vinci à Courbevoie ?  Il fut assassiné à coups de couteau, début décembre 2018 par son étudiant pakistanais, Ali Hassan Rajput. Celui-ci, qui criait « Allahou Akbar ! », l’accusait d’avoir dessiné et montré une caricature de Mahomet en classe [tooltips content= »Si vous avez peut être oublié cet épisode, c’est parce qu’il est survenu 5 jours seulement avant l’attentat du marché de Noël de Strasbourg NDLR »](2)[/tooltips].

La procureure Mme Denis, décida d’emblée que ce n’était pas un crime terroriste parce que les autres étudiants ne se souvenaient pas de la caricature. Mais les caricatures de Mahomet n’intéressent pas spécialement les jeunes, qui en ont d’ailleurs vu des masses depuis janvier 2015. Surtout qu’en période de campagne électorale présidentielle, ils étaient bombardés d’images, d’informations, de messages et de coups de fil. Tel n’était pas le cas de Rajput : au Pakistan d’où il venait, on ne voit jamais de caricature de Mahomet, car celui qui en montrerait une est lynché par la foule ou jeté en prison et condamné à mort.

En tuant Dowling, Rajput a appliqué la loi pakistanaise en France. Ce n’était pas sa faute, mais celle des autorités françaises qui fichent S les Français qui vont au Pakistan, et non les Pakistanais qui viennent en France. Et c’est très grave. Plus grave encore, c’est qu’on nous impose petit à petit des lois étrangères qui supplantent la nôtre. Il y a dix ou vingt ans, il n’aurait pas été normal qu’en France, on puisse tuer un homme pour une caricature et le dire. Et que les autorités refusent d’y croire en disant que le professeur n’a pas fait cette caricature. Comme si la loi française ne l’autorisait pas à dessiner ce qu’il veut.

Plutôt que moi, Facebook aurait dû censurer Ali Hassan Rajput

Ali Hassan Rajput aurait d’autant plus dû être surveillé qu’il se trouvait au Pakistan lors de l’exécution de Mumtaz Qadri. Celui-ci était le policier chargé de protéger le gouverneur du Pendjab. Il le tua parce qu’il avait défendu Asia Bibi. Durant des années, il y eut en sa faveur au Pakistan des manifestations monstres, auxquelles Ali Hassan Rajput a peut-être participé. Est-il normal qu’on ne l’ait pas fiché S parce qu’il avait été soumis, dans ce pays, à ce genre de propagande ? Sur sa page Facebook, appelée «C’est la Rana», il soutient Khadim Rizvi qui mit le Pakistan à feu et à sang pour sauver Mumtaz Qadri et tuer Asia Bibi. Tous ces manifestants gesticulant et criant avec désespoir en brandissant une photo d’Asia Bibi, c’est le travail de Khadim Rizvi.

Certains Pakistanais haïssent Mumtaz Qadri et le méprisent comme l’assassin d’un homme de bien. Les autres l’aiment et l’admirent comme un héros et un martyr. Ali Hassan Rajput fait partie de ces derniers. Le 22 novembre 2018, il partagea la photo de l’assassin en citant un ouléma qui appelait à l’insurrection, à la révolution, et à «la destruction totale du pouvoir de l’homme blanc». Quelques jours plus tard, Rajput tua, à Paris, John Dowling, un homme blanc qui avait eu du pouvoir sur lui en tant que professeur.

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Comment Facebook n’a-t-il pas averti la police française des horreurs qu’Ali Hassan Rajput postait sur Facebook ? Car il est impossible que certaines de ses images aient échappé aux moteurs de recherche extrêmement perfectionnés de ce réseau. Il y a par exemple une photo d’égorgement d’Asia Bibi, des photos d’Hitler génocideur, d’autres, d’Hitler humiliant les juifs, ou encore, un photomontage montrant Geert Wilders au visage percé par un tournevis. Tous personnages très reconnaissables malgré les déformations dues au photomontage.

La France devrait faire un scandale

Après l’arrestation du tueur, son identité Facebook et des captures d’écran ont circulé grâce à des lanceurs d’alerte. Moi-même, j’ai fait partie des milliers d’internautes qui ont pu examiner la page du tueur, qui contient des dizaines d’appels au djihad contre les Français, les Américains, les Européens en général. Il y a spécifiquement des appels justifiant le génocide des chrétiens, et d’autres exaltant le génocide des juifs par Hitler, et appelant à le recommencer. Le photomontage ci-dessous a été posté par lui, puis repartagé le mardi 4 décembre, avec ce commentaire : «Tuer les juifs comme Hitler. Ils ne peuvent pas vivre comme des êtres humains parce qu’ils sont des cafards».

Le lendemain, il tuait son professeur.

Tandis que ce post et les photos d’égorgement circulaient, Facebook interdisait un de mes articles. J’y alertais le public sur la publication par Daesh, plusieurs jours à l’avance, d’un poster appelant les partisans du califat en France à enfiler des gilets jaunes et à aller tuer. L’autocensure qu’impose Facebook est telle, que je n’ai pas pris le risque de demander des comptes pour le retrait de cet article. Et que je n’ai plus pris le risque de mettre de photos explicites. Je n’avais pas imaginé qu’un simple communiqué de Daesh utilisé pour prouver mes paroles, servirait de prétexte pour fermer ma page. Visiblement, elle gênait ceux qui aimaient la page d’Ali Hassan Rajput et la laissaient en liberté.

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Les enquêteurs qui ont découvert le contenu de la page du tueur en ont informé leur supérieur direct. Il aurait fallu que le préfet en soit averti et en informe le ministre, le Premier ministre et le Président. La France aurait alors dû, non fermer la page d’Ali Hassan Rajput et empêcher le public de savoir ce qu’il risquait, mais au contraire, faire un scandale et exiger de Facebook une réparation de plusieurs milliards de dollars pour avoir mis la vie des Français en danger en embauchant n’importe qui pour modérer leurs réseaux sociaux.

Et moi, je me demande si messieurs Macron, Philippe, Castaner et Delpuech se seraient tus si Ali Hassan Rajput avait tué le père de l’un d’eux.



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