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Ariel, la lessive qui lave les cerveaux mâles

Quand les injonctions féministes sont récupérées par le marketing


Ariel, la lessive qui lave les cerveaux mâles
Faustine Bollaert aime beaucoup la lessive Ariel. SIPA. AP22000433_000003 / REX40495088_000136

Aucun couple moderne n’étant à l’abri de l’effroyable épidémie de « charge mentale », qui contraint les femmes à des doubles journées de travail entre le bureau et l’entretien de maison, la marque de lessive Ariel a décidé de militer pour le partage des tâches (avec l’accent circonflexe). Voyage au bout de l’enfer du politiquement correct, quand les bons sentiments « féministes » sont récupérés par le marketing.


Il n’y a qu’une lessive qui vaille : Ariel ! Son odeur légendaire en a fait l’incontournable de bien des buanderies. Il a pu m’arriver de m’aventurer vers d’autres marques: Omo ou Dash, dont les noms me font rire. Mais c’est toujours vers Ariel que je reviens. L’originale, pas « Fraicheur Alpine » ou tout autre parfum de pécore.

Du marketing féministe

Les génies du marketing d’Ariel ont décelé une évolution des mœurs qui a tout d’une petite révolution. Tenez-vous bien : la femme en a assez de passer son temps coincée entre le panier à linge et le tambour de sa machine. Son « Jules » pourrait se mettre aussi à cette corvée, non ? Jamais en retard sur les combats du moment, Ariel a réquisitionné la pétillante Faustine Bollaert de France 2 pour ouvrir ce débat inédit.

La discussion va prendre la forme d’un publi-rédactionnel de Femme Actuelle. Je comprends maintenant le succès économique de ce titre populaire. Faustine n’est pas aussi rémunérée pour faire avancer cette bonne cause, rassurez-moi ? Dans une laverie, l’animatrice a réuni plusieurs intellectuels autour de barils de lessive. Il y a la facétieuse illustratrice Emma, une psychiatre spécialiste du « burn-out maternel » (ne riez pas, c’est très grave) et un journaliste cis venu faire le fayot et trahir le sexe fort. Une discussion « à bâtons rompus » nous est promise entre ces quatre-là. Chic, j’aime ces débats spontanés ! La marque ne surveille pas ce qui va se dire, n’est-ce pas ?

Vous avez dit « charge mentale »?

L’animatrice de télé-poubelle à la dentition Tic & Tac veut d’abord savoir pourquoi il y a en ce moment un tel « buzz » autour de cette notion de « charge mentale ». L’illustratrice Emma n’y est pas pour rien, figurez-vous. Sa BD a eu un succès salutaire. Si la notion date des années 1980, Emma l’a remise au goût du jour sur Facebook avec ses dessins naïfs accessibles à tous (qui a crié « démagogiques » ?).

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« Moi-même je me suis reconnue dedans, comme beaucoup de femmes », révèle Faustine Bollaert. Elle raconte qu’elle s’est empressée de relayer la BD auprès de ses ami.e.s Facebook. Il faut dire que la « charge mentale » est une vraie épidémie. Il est temps de faire quelque chose. La psychiatre propose une première intervention pertinente : « Je remercie Emma d’avoir pointé ça, parce que les femmes font en effet silencieusement un tas de choses, parce que c’était dans le stéréotype ». Elle ajoute qu’elle a changé sa pratique en consultation en établissant avec ses patientes plus systématiquement ce diagnostic de « charge mentale ». On n’arrête pas les progrès de la médecine ! Le débat se poursuit. Il est de haute volée.

Les parents en vacances

Les femmes ont certes été aidées par « les lave-linge » (sans oublier l’efficacité de la formule chimique d’Ariel), mais il reste du chemin à parcourir. Tous les hommes ne sont pas « avant-gardistes » comme le journaliste Mathieu Alterman. Lui estime « normal » de porter à deux le fardeau de la « charge mentale » dans le foyer. Révolutionnaire. « La charge mentale touche tout le monde, elle doit être répartie et ne doit pas freiner quelqu’un dans ses loisirs ou sa carrière professionnelle ». Oui, il est temps d’éradiquer cette pandémie !

La psy recommande à ses patientes de laisser les enfants à la cantine le midi et de ne pas prendre le mercredi en jour « off ». C’est le jour des enfants, et ils pourraient les empêcher d’être tranquilles. Mieux vaut plutôt prendre le jeudi pour s’occuper de soi, et aller rigoler avec les copines autour d’un verre. Apparemment, la méthode a fait ses preuves, même si c’est mal vu. Société patriarcale, tout ça.

Un sondage IPSOS-Ariel (!) vient confirmer que les hommes restent « passifs » vis à vis de la « charge mentale ». Le journaliste fayot s’indigne: « C’est anormal ! C’est dingue qu’on puisse encore ‘genrer’ l’investissement dans l’éducation des enfants. C’est invraisemblable ! » Les trois amazones saluent l’audace de cet homme libéré des stéréotypes de genre.

Emma contre le mâle cisgenre

La blogueuse Emma décrypte le phénomène : « Dans les couples hétérosexuels, même si les hommes prennent désormais part aux tâches ménagères, la femme reste le chef de projet ». Sur ce sujet comme bien d’autres, les hétérosexuels ont encore du chemin à parcourir pour arriver à la cheville des homosexuels ! Liste de courses et organisation du ménage, si les femmes ne planifient pas tout, l’homme cis ne fait rien, cette grosse feignasse…

Emma se déclare ensuite « féministe » et souhaite lancer un combat qu’elle décrit comme « politique ». Faustine Bollaert intervient pour calmer le débat : « Attention, on n’est absolument pas là pour tomber dans la caricature ! » Bah non, on est là pour vendre de la lessive.

Emma insiste : « Il faut éduquer les garçons de manière un peu plus ferme. » Son faire-valoir abonde dans son sens : « Des gens sont enfermés dans des schémas d’arrière-garde et ils bloquent tout ». Mais où sont ces rustres ? A la Manif pour tous, non ? Apparemment, une belle bande latine d’abrutis, fautive de ne pas avoir compris qu’on peut jouer à la poupée tout en restant viril. « On n’est pas encore en Europe du nord », regrette la psy, défaitiste.

Rééduquez-moi ces machos !

Emma a la fougue de la jeunesse : « L’éducation peut faire beaucoup de choses merveilleuses chez l’être humain. Rien n’est inéluctable. Il faut travailler sur la représentation des hommes et des femmes dans les médias ou dans les livres ». Moi ça me va, tant qu’elle ne prend pas la défense du voile islamique et tant qu’elle ne va pas jusqu’à censurer les livres ! Il faut aussi « faire attention à la façon dont les enseignants s’occupent des enfants. » A la réunion parents-profs, m’est avis qu’elle doit être légèrement casse-burnes, la petite Emma.

Une autre séquence sur le site propose de discuter du difficile équilibre entre vie pro et vie perso, avec les conseils d’Alex Goude, un animateur TV qui a eu un enfant par GPA en concubinage gay, et d’une actrice « racisée » de Plus Belle la vie venue présenter son livre Noire n’est pas mon métier. Je me garde ça pour ma prochaine visite sur le site de Femme actuelle, si vous le permettez.

Je coupe internet et cette propagande savonneuse aliénante. Je cherche un peu de répit devant un match du Mondial. En Russie, on ne mange pas de ce pain-là.

Perdu ! En 2018, ce progressisme forcené est sponsorisé par toutes les marques. A la mi-temps, une publicité sur TF1 présente une fille modèle qui révèle à ses parents qu’elle est lesbienne, aidée (et espionnée ?) par l’enceinte connectée « Alexa » d’Amazon… Décidément, on n’arrête pas le progrès.

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Rédacteur en chef du site Causeur.fr

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