Le Hamas est coincé entre la nécessité de libérer les otages israéliens pour éviter l’escalade et son désir de maintenir un rôle politique, rendant sa position stratégiquement vulnérable
Après trois jours de négociations intensives, le Hamas a trouvé la manière de dire non à Trump tout en l’épelant “O, U, I” ! On peut le comprendre. Les vingt points du plan Trump pour Gaza équivalent à un suicide politique pour l’organisation terroriste palestinienne. Désarmé, écarté de tout rôle dans l’avenir politique de la bande après deux années d’une guerre meurtrière et dévastatrice, et servant de marchepied au retour de l’Autorité palestinienne à Gaza, le mouvement se retrouve face à un bilan désastreux.
Le Hamas joue la montre
C’est probablement ce qu’ont expliqué ses représentants aux médiateurs qataris, égyptiens, saoudiens et turcs, tandis que les Américains, au téléphone, alternaient menaces et promesses, un mélange classique de bâtons et de carottes. Le résultat est une réponse ambivalente. Une approbation formelle de l’initiative de Trump, mais un rejet de son essence. Au cœur des discussions, le Hamas cherche avant tout à garder des otages, qu’il considère comme sa principale et plus précieuse monnaie d’échange.
Selon le plan américain, le mouvement doit, dès l’approbation officielle, libérer tous les otages, vivants et morts, dans les 72 heures suivant l’annonce. En échange, Israël cesserait le feu et gèlerait ses positions. Le Hamas se voit donc sommé de renoncer à sa carte maîtresse, son unique succès tangible, contre un prix dérisoire : un simple cessez-le-feu temporaire (et non la fin de la guerre), la libération de prisonniers et la restitution de dépouilles palestiniennes. Dans sa réponse, il tente de diluer cette logique, de gagner du temps et d’ajouter des conditions, autrement dit, d’augmenter le prix.
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C’est là le point cardinal et le principal piège tendu au Hamas. Nul ne sait ce qui se jouera dans les jours et les semaines à venir. Les vingt points du plan Trump sont volontairement ambigus : chaque article ouvre la voie à de nouvelles négociations sur les définitions, les modalités, le calendrier et les articulations avec les autres clauses… Le seul point clair, limité dans le temps et irréversible, concerne cette fameuse question des otages. Or, sans ces derniers, un retour à la guerre se ferait dans des conditions infiniment plus favorables à Israël.
Fin de partie
Même s’il est tentant de se projeter, d’analyser le rôle futur de Tony Blair ou la transformation de l’Autorité palestinienne, l’enjeu immédiat est plus prosaïque : la façon dont cette étape se déroulera conditionnera toute la suite.
Nous entrons donc dans une phase de partie serrée. Israël insistera sur le principe d’une libération quasi inconditionnelle des otages. Le Hamas, de son côté, cherchera à sortir du piège en « accrochant » la libération et la restitution des corps à des conditions d’abord techniques et tactiques, puis, peu à peu, stratégiques. Son objectif est clair : se retrouver, en cas d’échec de l’initiative ou de reprise des hostilités, avec encore des otages vivants, c’est-à-dire avec sa dernière carte à jouer.
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