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Paris, rumeur mauvaise

« Rue des Dames » un film de Hamé et Ekoué, au cinéma le 13 décembre


Paris, rumeur mauvaise
"Rue des dames" (2023), un film de Hamé Bourokba et Ekoué Labitey © The Jokers

Quand les rappeurs de « La Rumeur » se réessaient au cinéma, cela donne le raté Rue des Dames, en salles demain. Et pourquoi pas aller voir le nouveau Ladj Ly, aussi ?


Il y a une chose très agaçante dans un certain cinéma français actuel : les deux tiers du dialogue restent inaudibles. La faute à la mauvaise prise de son ? À l’interprétation défaillante ? À une direction d’acteurs erratique ? Probablement un peu de tout cela.  C’est plus que jamais le cas dans le deuxième long métrage produit et réalisé par le duo Hamé et Ekoué, du collectif hip-hop baptisé La Rumeur. Il faut tendre l’oreille pour capter ce qui se dit à l’écran, toujours dans ce débit accéléré qui, chez un certain nombre de jeunes comédiens, veut passer pour du naturel. À cette insuffisance technique s’ajoute le poncif d’une caméra à l’épaule abusant des gros plans, et même des plans ultra-serrés sur les visages : comme si Rue des Dames avait été conçu d’emblée pour être visionné sur smartphone. Tourné au sortir de la pandémie, le film fait suite à K Contraire (2019), avec Sandrine Bonnaire. Soyons juste, le bel et talentueux Sandor Funtek qui y avait le premier rôle, campe à présent un jeune flic en civil exagérément impulsif – mais lui, au moins, sait articuler ses répliques. C’est bien le seul dans ce casting déconcertant dont l’inénarrable Béatrice Dalle, fan inconditionnelle de Hamé et Ekoué (« je connais tout ce qu’ils font, c’est eux qui m’intéressent »), est la guest star surprise pour un plan d’une demi-minute, elle qui « ne lit jamais un scénario » [sic]. Dommage pour elle.

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Question scénario, justement, une scène d’ouverture passablement confuse rassemble les futurs comparses dans une fête VIP sur un roof top des Champs-Elysées avec vue sur l’Arc de Triomphe (on aura reconnu la terrasse de l’immeuble Publicis). On comprend bientôt que la jeune Mia (Garance Marillier), manucure malencontreusement mise en cloque par son ex et contrainte de lâcher l’appart dont elle ne pouvait plus payer le loyer, a pris souche dans un hôtel du XVIIIème arrondissement (un trois étoiles, tout de même), qu’elle revend ses nippes pour régler la piaule, etc. Décidément aux abois, elle finira par exiger une rançon de 3000€ pour convaincre une copine, enceinte des œuvres d’une jeune star du football, de renoncer à sa grossesse. Ce qu’un aimable euphémisme nomme l’instinct de survie contamine tous les comparses de cette ode à la marginalité, à la débrouille voire à la pure et simple crapulerie, dans le Paris gentrifié/bigarré de 2023, où il est si compliqué de rester dans le droit chemin, n’est-ce pas.  


Il faut savoir que le label La Rumeur est pour la paix sociale. En 2012, l’album baptisé Tout brûle déjà en posait les jalons : « j’aurai toujours le bras assez long pour forcer le président quel qu’il soit de mettre sa tête de pute dans ses excréments », poétisait-il. Du hip hop au 7ème art, l’ascenseur social fonctionne en tous cas merveilleusement pour le duo Hamé et Ekoué.     

Rue des Dames. Film de Hamé & Ekoué. France, 2023. Durée 1h44. En salles le 13 décembre 2023.     



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