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Bonne année, les progressistes!

En 2020, la bien-pensance se retournera contre elle-même


Bonne année, les progressistes!
Le Premier ministre canadien Justin Trudeau et sa famille en visite en Inde, en 2018 © Ajit Solanki/AP/SIPA Numéro de reportage : AP22168313_000001

En 2020, la bien-pensance se retournera contre elle-même. Parlez-en à Justin Trudeau!


Sans grande surprise, la rectitude politique a atteint des sommets inégalés en 2019, mais son règne sera ébranlé en 2020. Des Blancs souhaitent maintenant rompre avec la «blanchité», des hommes avec la «masculinité toxique», tandis que des homosexuels de gauche flattent des islamistes fanatisés qui ne souhaitent que leur mort.

En 2020, il ne suffit plus seulement d’être du bon camp, mais aussi de la bonne couleur et du bon sexe (…) On demandera même aux féministes blanches de s’effacer un peu sinon de se taire…

Dans les derniers mois, les bien-pensants n’ont cessé de prêcher contre eux-mêmes, une tendance qui ne pourra que s’accélérer dans la prochaine décennie.

2020, l’année des arroseurs arrosés

Il existait une époque où le méchant Occident pouvait encore racheter ses péchés. La faute était grave, mais pas tout à fait impardonnable pour ceux qui accepteraient de faire leur mea culpa publiquement. Des indulgences étaient distribuées aux plus motivés, des permis d’autoflagellation permettaient à des intellectuels de continuer leur œuvre en connaissant un certain succès. La morale faisait encore fi des races et des sexes: il suffisait de se ranger à gauche pour voir sa carrière être tamponnée du grand sceau de l’acceptabilité.

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Ce régime idéologique a toutefois atteint ses limites en 2019, année durant laquelle plusieurs signes avant-coureurs de cette réalité ont été aperçus dans l’actualité. Au Canada, Justin Trudeau a vu sa morale lui revenir en pleine figure durant l’affaire SNC-Lavalin, lorsqu’il a été accusé d’avoir outrepassé ses pouvoirs pour protéger cette grande entreprise accusée de corruption en Libye. L’affaire a presque failli lui coûter l’obtention d’un second mandat en octobre dernier, le Premier ministre se voyant impliqué dans l’un des grands scandales de corruption de l’histoire canadienne.

Jody Wilson-Raybould Photo: D.R
Jody Wilson-Raybould Photo: D.R

Durant la gestion de cette crise, Trudeau a dû faire face à sa ministre démissionnaire, Jody Wilson-Raybould, une députée autochtone dont le seul statut de femme et de membre d’une minorité le condamnait d’avance. Ouvertement féministe et favorable à la réconciliation avec les Premières Nations, Trudeau restait malgré tout un homme blanc –un représentant du Mal– ce qui lui déniait symboliquement le droit de répliquer avec fermeté. Trudeau n’a jamais osé recadrer avec aplomb Mme Raybould, prisonnier d’une approche infantilisante envers les femmes et les minorités qu’il avait lui-même instaurée.

Le hara-kiri des bien-pensants

La bien-pensance est une arme à double tranchant qui sera sans cesse affûtée par les événements de 2020 et des années ultérieures. Redoutable, elle servira à de nombreux suicides intellectuels dans la prochaine décennie, se retournant contre leurs propriétaires comme un esclave révolté contre son maître endormi. Il ne suffit plus seulement d’être du bon camp, mais aussi de la bonne couleur et du bon sexe. Inutile d’être progressiste si votre corps incarne le contraire de vos opinions politiques. Ainsi, nous assisterons encore plus à l’érosion de la méritocratie, l’un des piliers de la démocratie libérale.

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Si les hommes blancs sont encore surreprésentés dans les grandes institutions, pourquoi les plus progressistes d’entre eux ne montreraient-ils pas l’exemple en cédant leur place à des membres des minorités culturelles et sexuelles? Une certaine gauche ne tolère déjà plus leur simple présence. Comment des hommes peuvent-ils encore occuper des postes de pouvoir, alors que leur position sociale est uniquement attribuable au maintien du patriarcat? Les privilèges blancs feront bientôt place aux avantages de couleurs et la «phallocratie» à une société enfin sevrée de son poison masculin.

La prophétie des décoloniaux

Publié en 2016, le pamphlet décolonialiste d’Houria Bouteldja annonçait déjà ce grand renversement. Dans Les Blancs, les Juifs et nous, l’égérie indigéniste invitait ses «frères et sœurs» à rompre avec le progressisme, un courant embourgeoisé ne rimant aucunement avec leur émancipation. Dans ce pamphlet pour le moins énergique, Bouteldja invite notamment à rompre avec «un progressisme faussement universel mais vraiment blanc» et à renouer avec «la solidité de l’archaïque». «Les Blancs savent bien que leur société est sèche. Ils se savent égoïstes et individualistes. […] Mais ils manquent d’imagination pour penser d’autres horizons», tranche Bouteldja dans cet opuscule.

La tendance autodestructrice de la bien-pensance deviendra de plus en plus évidente en 2020. Pour les guerriers sociaux, même un certain féminisme est finalement à rejeter, car il est le produit de la modernité occidentale, creuset maléfique d’un combat inéluctable entre colonialistes et colonisés. Les pâles féministes seraient des hypocrites dont la libération ne reposerait que sur l’exploitation des femmes de pigmentation. En 2020, on demandera même aux féministes blanches de s’effacer un peu sinon de se taire.

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Auteur et journaliste. Rédacteur en chef de Libre Média. Derniers livres parus: Un Québécois à Mexico (L'Harmattan, 2021) et La Face cachée du multiculturalisme (Éd. du Cerf, 2018).

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