Si la réalité dépasse parfois la fiction, c’est que la fiction précède souvent la réalité. La littérature prévoit l’avenir. Cette chronique le prouve.
« Son pareil le suivait : barbe, œil, dos, bâton, loques, / Nul trait ne distinguait, du même enfer venu, / Ce jumeau centenaire / et ces spectres baroques / Marchaient du même pas vers un but inconnu. / […] je comptai sept fois, de minute en minute, / Ce sinistre vieillard qui se multipliait ! » Dans le Paris du Second Empire, Baudelaire est soudain saisi par l’angoisse. Hallucination ou réalité démographique ? Allez savoir. En revanche, aujourd’hui, nos inquiétudes sur ce « péril gris » sont à l’évidence fondées. Une enquête du Monde indiquait récemment que si la population mondiale continuait de croître, elle vieillissait à toute allure : « D’ici à 2050, la part des plus de 65 ans dans le monde devrait passer de 9,3 % à 15,9 % de la population. Aucune région n’échappera au phénomène, qui sera particulièrement marqué en Asie et dans les pays à hauts revenus, où le poids des plus de 65 ans pourrait grimper de 18,4 % à 26,9 % d’ici trente ans. »
Jean Dutourd
Un écrivain délicieusement anticonformiste qui connaît actuellement un purgatoire littéraire avait vu la chose venir : Jean Dutourd n’est pas seulement l’auteur d’Au bon beurre, cette satire féroce sur le marché noir. C’est aussi un moraliste lucid