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Samuel Paty, récit de la chasse à l’homme d’un hussard noir

Un professeur décapité pour avoir évoqué la liberté d'expression à des élèves musulmans


Samuel Paty, récit de la chasse à l’homme d’un hussard noir
Les forces de l'ordre gardent le périmètre de sécurité autour du quartier où le terroriste a été abattu à Eragny (95), le 16 octobre 2020 © ABDULMONAM EASSA / AFP.

Si pour l’heure nous manquons d’informations complètes sur le terroriste islamiste à l’origine de l’attentat survenu devant le collège de Conflans-Sainte-Honorine, nous pouvons d’ores et déjà affirmer qu’il n’est pas le seul coupable de ce crime, car Samuel Paty a été la victime d’une campagne massive, mensongère et haineuse au nom de la lutte contre « l’islamophobie », cette même lutte qui vise à instaurer le délit de blasphème pour l’islam en France.


Ce vendredi, Samuel Paty, 47 ans, professeur d’histoire-géographie au collège du Bois-d’Aulne a été égorgé à Conflans-Sainte-Honorine. L’assaillant est un homme de 18 ans né à Moscou qui aurait hurlé « allah akbar » avant d’assassiner sa victime. Il a été abattu par la police quelques rues plus loin du lieu du crime, à Éragny-sur-Oise, un couteau à la main.

Comment cet enseignant s’est-il retrouvé dans le viseur des islamistes ? 

C’est sur les réseaux sociaux que le lynchage aurait commencé…

À travers une vidéo publiée sur Facebook, le père d’une élève de 4ème, Brahim C., appelle tous les parents des camarades de sa fille à se mobiliser contre un enseignant d’histoire-géographie qui aurait montré pendant son cours « la photo d’un homme tout nu » pour le désigner comme étant le « prophète des musulmans ».

« Quel est le message qu’il a voulu passer à ces enfants ? Quelle est la haine ? Pourquoi cette haine ? » se demande Brahim C.. Il explique que lors de l’un de ses cours, l’enseignant aurait demandé aux élèves musulmans de lever la main puis de quitter la salle de classe. Sa fille de 13 ans aurait refusé de sortir et a été choquée suite à la diffusion de la fameuse « photo ». Toujours dans la même vidéo, le père explique que sa fille aurait été sanctionnée, exclue du cours pendant deux jours, car elle avait refusé de quitter la salle de classe à la demande du professeur.

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« Si vous pensez comme moi que l’on doit dire STOP, ne touchez pas à nos enfants, envoyez-moi un Smessage au 06 XX XX XX XX », c’est la conclusion que le père adresse aux parents d’élèves des 4ème du collège… Il fait vœu d’une action collective contre ce professeur qu’il qualifie de « voyou qui doit aller s’éduquer lui même », un homme visiblement nuisible pour les élèves et qu’il soupçonne, toujours selon ses dires, d’agir de « cette façon » à l’école depuis des années.

Dans une autre vidéo, la fille de Brahim C. et élève de la victime prend la parole à son tour. Elle y relate sa version de l’incident qui l’a opposée à son enseignant. Avant qu’elle ne puisse s’exprimer, l’homme qui tient la caméra, Abdelhakim Sefrioui, un islamiste qui sévit sur le territoire français depuis les années 80, connu pour son soutien au Hamas et membre du Conseil des imams de France, déclare que « L’abject a encore eu lieu. Nous avons assisté cette semaine à la réponse d’un voyou, qui est enseignant, à cet appel du président de la République qui est un appel à haïr les musulmans, à combattre les musulmans, à stigmatiser les musulmans ». Interrogée par Sefrioui, la version de Zaina est légèrement différente de celle de son père:

« On était en train de faire un cours sur l’islam et le prof a dit aux musulmans de lever la main (…) et qu’il va montrer une image qui va peut-être choquer, que si on voulait, on pouvait sortir du cours » raconte-t-elle. La jeune fille ajoute que l’image en question était celle du « prophète Mahomet sans vêtements et que le professeur l’avait montrée comme ça ». Elle exprime son choc et insiste sur le fait que « même les élèves non-musulmans » avaient été à leur tour choqués à la vue de l’image. « Ils ne nous respectent pas, pour eux nous ne sommes pas leurs égaux alors que nous sommes des humains comme eux » dit-elle, indignée.

L’enseignant aurait fait savoir à cette élève qu’elle dérangeait son cours et l’aurait exclue parce qu’elle aurait « exprimé » son ressenti, qu’elle était offensée. « Pourquoi s’en prend-il à notre religion ? Je ne vais plus aller à son cours », témoigne cette élève qui considère que ces images n’avaient pas leur place dans un cours d’histoire-géographie, que l’intention du professeur était de cibler l’islam dans le but de « rabaisser les élèves musulmans » de sa classe.

Campagne diffamatoire 

Le professeur aurait donc laissé le choix à ses élèves et pris en compte leur sensibilité avant de procéder à la diffusion des images. Il avait anticipé l’émoi que cela aurait pu provoquer chez certains de ces élèves musulmans. Il n’a donc pas juste exclu des élèves de son cours en raison de leur confession.

Ce n’est pourtant pas ce que Brahim C. a diffusé à ses abonnés sur Facebook ni aux parents d’élèves. Il a multiplié les publications à charge contre Samuel P. osant même condamner l’enseignant pour délit de participation « à la marche de Charlie » ! « Vous aimez votre prophète » lance-t-il à ses abonnés, « Vous avez l’adresse et nom du professeur pour dire STOP »… « Soyons fiers de notre religion et de notre prophète » écrit-il dans un autre post avant d’inciter une nouvelle fois à « faire le minimum », à savoir, envoyer « un courrier au collège ou au CCIF [le controversé Collectif contre l’islamophobie en France NDLR] ou à l’inspection académique ou au ministre de l’Éducation ou au Président ».

« Il faut virer ce professeur d’histoire du collège ! ». Dans sa vidéo, le père, Brahim C., regrette de l’avoir d’abord décrit comme étant un « professeur », il préfère l’appeler le « voyou d’histoire ».

Tout au long de sa campagne de haine contre Samuel P., il omettra de dire à son audience que c’était dans le cadre d’un cours d’éducation civique dédié à la liberté expression que des caricatures ont été montrées aux élèves. Il n’est même pas fait mention de dessins d’ailleurs, mais « de la photo d’un homme tout nu » qui aurait été désigné comme étant « le prophète des musulmans » par l’enseignant…

Le récit laisse ainsi penser à un enseignant haineux qui voulait humilier des élèves en raison de leur foi et qui les a sanctionnés lorsqu’ils ont refusé de se laisser faire. Un enseignant qui pratique la discrimination et ne délivre pas le même enseignement à ses élèves selon qu’ils soient musulmans ou non. Un enseignant qui diffuse la photo d’un homme nu à des adolescents. Jamais il n’est question d’un enseignant qui montre à ses élèves les caricatures de Mahomet pour lesquelles des journalistes ont été tués par des terroristes islamistes. 

C’est une cabale qui est lancée contre Samuel P. Elle aurait commencé le 5 octobre 2020. Une vidéo après l’autre, un statut Facebook après l’autre, un tweet après l’autre, il aura suffi de onze jours pour que la cible soit dessinée sur son dos.

Plusieurs personnes ont relayé les vidéos de Brahim C et ses messages sur les réseaux sociaux, certains ont d’ailleurs déjà supprimé leur compte depuis l’attentat. Sous le hashtag #Prof_islamophobe, on pouvait retrouver des tweets de musulmans expliquant qu’ils avaient échangé avec le père et qu’il fallait soutenir ce dernier.

Messages sur Twitter (1/3)
Messages sur Twitter (1/3)
Messages sur Twitter (2/3)
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Messages sur Twitter (3/3)
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Message sur Facebook
Message sur Facebook

De même, la mosquée de Pantin, connue pour ses positions hostiles vis-à-vis de Charlie Hebdo, a relayé le récit mensonger de Brahim C. au sujet de l’enseignant Samuel P..

La mosquée de Pantin a relayé l'appel sur Facebook.
La mosquée de Pantin a relayé l’appel sur Facebook.

Le site d’information islamique Alnas.fr, a fait « disparaître » juste après l’annonce de l’attentat, un article à charge contre l’enseignant titré « France : un professeur d’histoire expulse les musulmans de sa classe pour montrer les caricatures ». L’article a été remplacé par un autre sous la même URL avec ce nouveau titre : « Yvelines : un homme décapité en pleine rue, il s’agit du professeur qui avait montré les caricatures du Prophète ».

L'article d'Alnas avant qu'il ne soit modifié.
L’article d’Alnas avant qu’il ne soit modifié.
Le même article modifié après l'attentat.
Le même article modifié après l’attentat.

Jihad judiciaire 

Bien qu’il se soit tourné vers le rectorat et qu’il ait saisi la justice pour diffamation, pendant une dizaine de jours, plusieurs actions relevant du « jihad judiciaire » et de l’intimidation auraient été lancées à l’encontre de l’enseignant Samuel P.: saisine de l’inspection académique de Versailles et dépôt de plainte auprès de la police pour « discrimination », prise de contact avec le CCIF et des associations de parents d’élèves. Tant d’acharnement uniquement parce qu’il a fait son devoir, celui d’un hussard noir du 21ème siècle conscient des menaces qui pèsent sur son pays engagé dans la lutte contre l’islamisme, pour la laïcité et pour la liberté d’expression.

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Si le CCIF, qui se vante d’être à la pointe du conseil juridique, avait été réellement été saisi, comment Brahim C. pouvait encore ignorer que la diffusion des caricatures de Charlie Hebdo dans une classe et à l’occasion d’un cours d’éducation civique était un droit fondamental et faisait partie des prérogatives d’un enseignant de la République ? Comment pouvait-il ignorer qu’inciter à lyncher un enseignant sur les réseaux sociaux, à l’appeler et à lui écrire à son domicile ou à son lieu de travail relevait du harcèlement moral, un délit puni par la loi ? 

Le terroriste islamiste n’est pas le seul coupable…

Plus globalement, quelle est la responsabilité des militants anti-islamophobie quand ils diabolisent des professeurs qui finissent égorgés dans la rue pour avoir fait leur devoir ? Quelle est la responsabilité de ces mêmes militants quand des élèves, des journalistes, des policiers sont diabolisés et finissent tués ou encore sous protection policière au nom de l’islam ?

Cette diabolisation menée par des fausses victimes ou en leurs noms a toujours pour point de départ un discours victimaire. Ce même discours que l’on entend dans la bouche de cette élève de 4ème, une jeune Française de 13 ans, c’est aussi celui que l’on entend et qu’on lit chaque jour dans la presse de gauche française, que des “sot-ciologues” répètent à longueur de journée dans les amphithéâtres des universités, sur les plateaux des télévisions, dans les QG des associations, dans les vidéos des médias du service public ou encore qatari et saoudien. Ces discours, les jeunes et moins jeunes les lisent, les partagent, les commentent chaque jour sur les réseaux sociaux, et ils sont toujours portés par des comptes certifiés de journalistes, éditorialistes, de professeurs, de politiques, d’élus, de militants de gauche, de prédicateurs islamistes, d’imams bobos, de militants indigénistes et d’islamo-activistes… Tous sont des séparatistes. Ceux-là même qui hurlent au « pas d’amalgame » tout en assimilant les musulmans aux islamistes, et la critique ou la moquerie de l’islam à la haine des musulmans. Quelle est la responsabilité des chantres de l’islamophobie quand ils provoquent un syndrome de persécution chez ceux qui sont prêts à traquer, harceler, menacer ou tuer au nom de la lutte contre leur délit imaginaire ?

Il a suffi d’un peu plus d’une semaine pour qu’un enseignant sans histoire d’un petit collège de banlieue apparaisse sur le tableau de chasse des islamistes. Rien ne lui aura été épargné : harcèlement, diffamation, incitation à la haine, diffusion de ses coordonnées pour finir gisant sur le sol, décapité, non loin du collège où il enseignait avec courage et honneur les valeurs républicaines et la France de Charlie. Combien d’autres suivront son chemin dans l’indifférence des rectorats, des élus, des préfets ? Combien d’autres comme lui suivront le même chemin et seront jetés en pâture aux fous d’Allah sur les réseaux sociaux, terrains dominés par la gauche complice des islamistes ? Combien d’autres le sont en ce moment même ?



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