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Les vignes, dernier bastion de résistance au «décolonialisme»

Black and wine


Les vignes, dernier bastion de résistance au «décolonialisme»
Photo Pixabay

Connaissez-vous le Comte de Négret?


J’ai succombé au charme de cette piquette
En tardant dans les rayons de Carrefour Market
Moins de cinq euros une bonne affaire ma foi
Tant pis si ça grattouille et picote mon foie

« Intense et puissant » est selon ses petits mots
Le Comte de Négret apaise à peine mes maux
Et pour cause voici ce qui y est gravé
De l’autre côté de la bouteille abreuvée

La somptueuse peau noire (de son raisin)

« La Négrette, ce joli cépage autochtone de notre terroir Frontonnais ». Voilà un beau sujet, ma foi, mais à l’arôme fichtrement colonial. Et ce n’est pas fini: « [La Négrette] doit son nom à la somptueuse peau noire de son raisin ». Allo Caroline, Clémentine, Rokhaya et consœurs? J’ai un nouveau job pour vous, une croisade de rêve, à l’intersection de l’antiracisme et du féminisme, à mener dans le sud-ouest, voilà qui vous ferait prendre l’air de Paris! Quant à vous, chers lecteurs, ne voyez-vous pas cette énième humiliation des femmes noires acculées à leur condition d’objets de désir par des mâles blancs avides de chair exotique (et avinés) ?

Pour les novices, le site internet des vignerons de l’Appellation d’Origine Protégée (AOP) Fronton, en Occitanie, nous informe que « la légende rapporte que la Négrette, ce cépage noir caractéristique du vignoble de Fronton aurait été rapporté de Chypre par les Hospitaliers de l’Ordre de Saint-Jean de Jérusalem ». Maudits croisés! Il y est également inscrit que « c’est parce que nous avons choisi de refuser l’uniformisation et de perpétuer la culture de la Négrette […] que nous vous proposons des vins rouges et rosés extraordinaires ». De ma propre expérience, « extraordinaire », me semble exagéré mais qu’importe. Loin de la société aseptisée dont rêvent nos néo-épurateurs année après année, trinquons à la Négrette cet été! Et en attendant d’arpenter Fronton en quête du puissant breuvage, écoutons comment Baudelaire s’adressait à Jeanne Duval, sa « Vénus noire » au début de « Sed non satiata ».

Bizarre déité, brune comme les nuits,
Au parfum mélangé de musc et de havane,
Œuvre de quelque obi, le Faust de la savane,
Sorcière au flanc d’ébène, enfant de noirs minuits

Après vous être enivré de ces vers, vous trouverez de précieux renseignements pour visiter les domaines de la Négrette sur le site de l’AOP Fronton.

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Enseignant, auteur du roman "Grossophobie" (Éditions Ovadia, 2022).

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