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« Cocktail Molotov », éloge de la jeune fille française

"Cocktail Molotov", en ce moment sur Ciné +


« Cocktail Molotov », éloge de la jeune fille française
"Cocktail Molotov", un film de Diane Kurys.

 


Ne ratez surtout pas Cocktail Molotov, un film de Diane Kurys autour d’un triangle amoureux à l’époque de mai 68. Il repasse actuellement sur Ciné Plus.


 

Parfois encore, au hasard des chaines de cinéma, on découvre une jeune fille française, comme Elise Caron dans Cocktail Molotov de Diane Kurys. Le malheur des temps, dirait Guy Debord, m’oblige à préciser pour les oreilles sensibles des différentes niches de la fausse émancipation et de la vraie intolérance que « jeune fille » n’est pas ici une appellation machiste et que « française » n’a pas de connotation ethnopolitique.  Non, c’est la jeune fille qui a toujours enchanté les lycéens, la même depuis Fermina Marquez de Valery Larbaud, au moins, qui court dans le roman et le cinéma.

Road movie lent

Cocktail Molotov est tourné en 1979 et se passe en mai 1968. C’est l’histoire de deux garçons amoureux de la même fille qui lit Rimbaud et qui aime bien le sonnet des Voyelles. La jeune fille est amoureuse d’un seul et l’autre, joué par un François Cluzet de vingt ans, va prendre la chose relativement bien et restera, tout le temps, un bon camarade.
La jeune fille française s’enfuit de chez sa mère et son beau père qui sont des vieux cons en DS blanche. Elle part avec son amoureux dans la 2CV de Cluzet qui conduit. Dans le film, le trio va tout rater sauf les sentiments, c’est à dire qu’en fait, les trois réussissent leur vie.


Cocktail Molotov est un road movie lent qui va d’abord les mener jusqu’à Venise, filmé avec une très intelligente absence de pittoresque, pour prendre un bateau pour Israël et vivre dans un kibboutz, loin des cons. Oui, là aussi ça va déplaire à une autre niche progressiste, mais Israël a été, à un moment, une utopie de gauche.

La dépression du CRS

Comme il n’y a plus de bateau pour Israël et qu’on leur vole leur 2CV, ils font le chemin du retour vers Paris en stop, ce qui n’est pas commode en plein mai 68. Ils dorment à la fraîche étoile -apparemment le temps n’était pas terrible-, ils sont un peu énervés de manquer les manifs mais ils croisent un échantillon assez représentatif de la France de l’époque où dans les bistrots, les épiceries, les chemins creux, ils rencontrent un routier sympa, un élève de lycée technique content que tout pète, le père de l’élève qui les accueille pour la nuit et qui est un CRS dépressif après avoir trop tapé sur des jeunes du côté de la rue Gay-Lussac, -on croit rêver à l’époque des gilets jaunes -, un bellâtre en décapotable, j’en passe et quelques autres.
La jeune fille s’aperçoit qu’elle est enceinte bien qu’une copine affranchie lui ait passé avant de partir une plaquette de pilules que la jeune fille ne pouvait pas obtenir, étant mineure. Le trio se sépare un peu. La jeune fille retrouve son vrai père à Lyon. Il l’emmène avorter en Suisse. L’avortement, décidé seule par la jeune fille, ne cassera pas le couple. Il se retrouvera à Paris et repartira presque aussitôt sur la route dans la DS blanche  taguée, toujours conduite par Cluzet,  puisque Mai s’est fait sans eux et que l’ordre revient en France.

Diane Kurys au sommet

Le film est d’une intelligence rare. Diane Kurys est aussi maîtresse de ses moyens que dans Diabolo Menthe. On pense, plus d’une fois, aussi, au Nouveau Naturel de Pascal Thomas. On peut apprécier la chronique politique décalée et la délicatesse des sentiments. Le personnage central est bien sûr celui d’Anne, la jeune fille française, une héroïne possédée par une joie de vivre calme et invincible, même dans les moments un peu difficiles. Et Elise Caron l’incarne parfaitement.  Son choix délibéré du bonheur est stendhalien et sa quête d’une nouvelle forme de souveraineté est batallienne: il n’y a qu’à la voir se débarrasser discrètement, sans enlever son tee-shirt, de son soutien-gorge dans une forêt varoise, -un plan délicieux-.

On aurait aimé être en classe avec elle. Cela aurait été presque jouable, au niveau des dates. On aurait mangé des malabars ensemble en les échangeant dans un baiser, on aurait voluptueusement léché les décalcomanies, elle m’aurait prêté son stylo quatre couleurs et j’aurais connu la beauté du monde, quand la récré aurait sonné et qu’elle se serait levée, à sa manière de porter son jean et sa chemise blanche. C’est mon côté Poppys, pour ceux qui savent. Pour le reste, Cocktail Molotov est évidemment d’un grand film politique et féministe.
Mais si.

Cocktail Molotov est visible sur le bouquet Ciné+ jusqu’au 3 décembre.

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