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Recevoir Charles III à Versailles était-il vraiment illégitime?

On oublie l'essentiel. Charles III va détourner notre hostilité à l'égard du président Macron...


Recevoir Charles III à Versailles était-il vraiment illégitime?
Versailles, 20 septembre 2023 © Jacques Witt/SIPA

Le roi Charles III, à Paris puis à Bordeaux, va avoir d’abord un usage interne… La visite d’un roi en France vise à faire oublier que notre pays va mal.


La visite du roi Charles III et de la reine consort Camilla va durer trois jours en France. J’entends déjà les grincheux : rien à voir avec sa mère Elizabeth II… Il a eu un très mauvais rôle avec Diana… Les Français sont républicains et tout ce faste déployé, notamment à Versailles, est scandaleux… Notre pays n’a aucun intérêt à recevoir ce couple royal… Et ainsi de suite. Je ne suis pas d’accord.

Faste du passé

Certes, cette visite officielle, après son report à cause des manifestations contre les retraites et de Paris en désordre, ne sera pas comparable à celle de 1972. Le président Georges Pompidou (il l’était et avait l’air présidentiel…) et son épouse avaient accueilli somptueusement la reine et le prince Philip, qui avaient suscité une véritable liesse populaire. Mais l’allure d’hier ne sera pas totalement absente de la tenue d’aujourd’hui.

Et on oublie l’essentiel. Charles III va détourner notre hostilité à l’égard du président Macron et pendant ces trois jours, peut-être y aura-t-il comme une accalmie, du baume qui adoucira nos plaies, rendra secondaires l’amateurisme, l’inconséquence, les contradictions de nos gouvernants. Une sorte de petit miracle démocratique qui suscitera de l’indulgence, dans notre peuple frondeur, pour l’incarnation d’une continuité qui aura été rarement vulgaire, jamais médiocre. Paradoxal de constater comme ceux qui tournent en dérision notre présent sont aussi ceux qui jouent les esprits forts en se moquant des fastes du passé et des leçons que ce dernier devrait nous dispenser. Le roi Charles III, à Paris puis à Bordeaux, va avoir d’abord un usage interne.

Clandestins, prix de l’essence, refus d’obtempérer, école : sombre tableau

Car nous n’avons pas de quoi être fiers, ces derniers jours. Le président et la Première ministre n’ont vraiment pas de quoi se vanter. Le ministre Gérald Darmanin annonce de la fermeté et qu’aucun migrant de Lampedusa ne viendra chez nous à l’exception de ceux qui bénéficieront du droit d’asile. Quelques jours auparavant, le président avait vanté la solidarité pour traiter ce problème européen et à Bruxelles, la France est sur une ligne contraire à celle développée par le ministre de l’Intérieur ! Sans aucune concertation, Elisabeth Borne et Bruno Le Maire jettent dans le débat la vente à perte pour les carburants mais ils sont sèchement rembarrés par les responsables des enseignes de la grande distribution, qui jugent cette initiative absurde, impraticable pour eux.

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En 2022, on constate une augmentation considérable (près de 26 000 cas) des refus d’obtempérer qui sont commis parce que le conducteur est sous alcool ou drogue, ou qu’il est recherché pour des motifs qui, dans tous les cas, justifient l’intervention de la police dont il faut saluer la maîtrise et le professionnalisme. Si peu de drames – liés seulement à la fuite des personnes contrôlées – malgré la multitude des interpellations. Vérité qui n’empêchera pas les polémiques les plus odieuses contre les fonctionnaires de police, en passant sous silence la responsabilité exclusive des transgresseurs.

Pour ne pas parler du harcèlement scolaire où les mêmes parents qui se plaignent de l’inaction du pouvoir et de l’abstention de la police poussent des hauts cris quand un harceleur de 14 ans est interpellé dans une classe, ce qui sera sans doute de nature à faire réfléchir les autres. On pourrait réclamer une rigueur plus élégante, mais en France, avant de pouvoir espérer le juste milieu, il convient d’aller d’abord au bout de la sévérité.

Changeons d’air

Quelques exemples qui montrent un pays déboussolé, un gouvernement en proie à des injonctions contradictoires, une politique sujette à des embardées contrastées, un président qui, à force de « en même temps » et « au contraire », ne sait même plus ce qu’il a pensé la veille. Le pouvoir politique français va tenter sinon de redorer son blason, du moins d’offrir ce que la France a de meilleur : Versailles, son raffinement, ses merveilles, à un roi qui n’a pas réellement dans son pays de pouvoir politique mais une influence profonde. Alors vive Charles III qui aura le grand mérite de nous changer d’air, d’ère !



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Magistrat honoraire, président de l'Institut de la parole, chroniqueur à CNews et à Sud Radio.

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