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Mississippi Pride

"il est important que tous les Américains réfléchissent au passé de notre nation"


Mississippi Pride
Une garde d'honneur plie définitivement l'ancien drapeau du Mississippi, le 1ᵉʳ juillet 2020, Capitole, Jackson, Mississipi © Rogelio V. Solis/AP/SIPA

Conflit fratricide entre le Nord et le Sud, la guerre de Sécession (1861-1865) a profondément divisé les États-Unis. Une histoire douloureuse qui continue de hanter le subconscient des Américains. Chaque année, le Mississippi continue d’honorer la mémoire de ceux qui sont tombés pour la « Cause perdue », au nom d’un idéal mythifié par Hollywood. Plusieurs voix s’élèvent désormais afin que cesse cet hommage controversé, également présent dans d’autres anciens États sudistes.


État emblématique du sud des États-Unis d’Amérique, le Mississippi est indissociable de la guerre de Sécession et de l’histoire de la ségrégation raciale. Souhaitant perpétuer une tradition vieille de trois décennies, le gouverneur (Républicain) Tate Reeves a ouvert le « mois de l’histoire confédérée ». Il s’agit d’une série d’événements qui honore la mémoire des soldats sudistes tombés au champ d’honneur. L’information a été révélée sur la page Facebook des Sons of Confederate Veterans (SCV) qui a publié la copie du communiqué officiel. Loin d’être méconnue dans cette partie des États-Unis, la SCV est une association qui cultive la mémoire de ceux qui sont morts pour la « Cause perdue », qui organise régulièrement des conférences réhabilitant l’héritage esclavagiste de la Confédération et qui reste associée à certains mouvements suprémacistes blancs (comme la Ligue du Sud qui lutte pour une nouvelle sécession, ou le Ku Klux Klan). Ses membres portent d’ailleurs tous un badge représentant le « Dixie Flag ». Emblème officiel du Mississippi, ce drapeau, orné d’une croix bleue constellée des douze états sécessionnistes sur fond rouge, a été définitivement descendu en 2020 du mât du Capitole sur lequel il flottait depuis plus d’un siècle à Jackson, sa capitale.

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« Alors que nous rendons hommage à tous ceux qui ont perdu la vie pendant la guerre civile, il est important que tous les Américains réfléchissent au passé de notre nation, aient un aperçu de nos erreurs et de nos succès, et comprennent pleinement que les leçons apprises hier et aujourd’hui nous mèneront vers un avenir apaisé si nous nous efforçons soigneusement et sérieusement de comprendre et d’apprécier notre héritage et les opportunités qui s’offrent à nous », peut-on lire dans le communiqué. Très rapidement, certaines organisations de droits civiques se sont levées pour condamner cet hommage, sorte de « Pride confédérée », qui est loin d’être anodine, selon elles. Selon le Mississippi Free Press, journal local, Tate Reeves conserverait des liens étroits avec le SCV. Il a participé à plusieurs réunions de l’association néo-confédérée, comme en 2013 où il l’a félicitée « d’avoir gardé une histoire intacte pour la jeunesse » après que les orateurs ont comparé les « Yankees » (surnom donné aux Nordistes) « aux nazis allemands de la Seconde Guerre mondiale ».  Comme bon nombre d’États aux États-Unis, le Mississippi a été la proie du Black Lives Matter. Le mouvement, né après la mort de l’Afro-américain George Floyd (2020), affirme lutter contre le racisme systémique dans le pays. Durant des mois, il a fait pression pour que soient retirés tous les symboles sudistes rappelant l’histoire raciste du Mississippi. Trônant sur un campus d’université, la statue d’un soldat confédéré saluant militairement a été promptement enlevée en juillet 2020 et reléguée dans un cimetière où reposent les restes des soldats sudistes. Parallèlement, on s’est empressé d’ériger une statue d’Emmett Till, un jeune afro-américain enlevé et tué par le Ku Klux Klan en 1955 pour avoir serré de trop près une adolescente blanche. Agacé par la pression constante maintenue par le BLM, Tate Reeves a critiqué publiquement la « théorie critique de la race », qui traite des inégalités raciales dans le système juridique et dans toute la société, l’accusant d’être un outil d’endoctrinement utilisé pour « humilier les Blancs ». « Les enfants sont traînés devant la classe et sont contraints de se déclarer comme oppresseurs, se sentir coupables à cause de leur couleur de peau ou parce qu’ils sont intrinsèquement une victime à cause de leur race », s’est irrité le gouverneur, qui entend faire fi du wokisme ambiant qui consiste à réécrire l’histoire de manière permanente sans recontextualiser quoi que ce soit du passé. Le Mississippi n’est pas le seul État des États-Unis à participer au « mois de l’histoire confédérée » qui s’étale d’avril à mai. Le Texas (où une tentative d’interdiction a échoué) comme l’Alabama (théâtre d’incidents raciaux au plus fort de la lutte pour les droits civiques entre 1950 et 1970) ont maintenu cet événement quand d’autres ont fini par s’en retirer (Georgie, Virginie…) par craintes d’émeutes raciales. Au Tennessee, la proclamation « encourageant tous les habitants à approfondir leurs connaissances » sur cette époque capitale de l’histoire de cet État a donné lieu à un vaste débat qui a divisé le Congrès local. D’autant que le document évoque « la lutte héroïque de quatre ans des Confédérés pour les droits des États, la liberté individuelle, le contrôle du gouvernement local et une lutte déterminée pour des croyances profondément ancrées », prenant soin de ne jamais évoquer l’esclavage comme raison du déclenchement du conflit. Une déclaration qui est intervenue après que deux élus afro-américains aient été au cœur d’une polémique, expulsés du Congrès après avoir participé au sein du Capitole à une manifestation contre les armes. Dans cette affaire, une élue blanche (qui était également présente à leurs côtés) n’a pas fait l’objet de sanctions, soulevant une vague de protestation sur les réseaux sociaux.




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Journaliste , conférencier et historien.

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