Notre président a l’intelligence sans la conviction. Il invite les citoyens à la suspicion généralisée, alors que la France aurait besoin d’un plan global de lutte contre les menées des islamistes
Le président Emmanuel Macron est intelligent et cultivé, et se pique d’avoir l’esprit philosophique à une époque où la mentalité managériale est davantage prisée. Il la vante lui-même d’ailleurs. Notre président de la République a donc bien compris qu’après le quadruple assassinat perpétré à la Préfecture de Police de Paris, il faut non seulement montrer de l’empathie comme c’est devenu l’habitude après chaque attentat mais aussi se monter déterminé à lutter contre l’islamisme. Mais c’est là qu’Emmanuel Macron se lance dans un grand discours qui se veut « fondateur », et perd la piste politique à suivre.
Appel désespéré à la société civile
Lutter contre l’islamisme reviendrait à empêcher la « radicalisation » et pour ce faire, à la détecter en amont chez les individus sur le point d’y basculer, la pressentir aux premiers signes avant-coureurs d’un possible « passage à l’acte » (entendez la commission d’un attentat). Et le Président d’en appeler aux Français pour « repérer à l’école, au travail, dans les lieux de culte, près de chez soi », les signes de radicalisation potentiels d’une personne. Cette injonction à la vigilance des citoyens, le Président Macron l’avait d’ailleurs déjà lancée en octobre 2016 au Mans en affirmant que « la société [doit assumer] que l’Etat n’est plus l’unique acteur de la sécurité ». Or, par de-là la satisfaction que l’on pourrait ressentir à entendre là une détermination salutaire, cette posture martiale révèle deux graves erreurs politiques.
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D’abord, les citoyens n’ont à se substituer à l’Etat affaibli ou défaillant dans sa tâche de protection, isolément et encore moins regroupés en milices populaires. La sécurité publique doit être assurée par la puissance publique. C’est un bien mauvais signe donné aux ennemis de la France et de la démocratie en général que de laisser croire qu’il est inévitable que l’Etat soit impuissant à garantir le premier droit des citoyens, celui de leur sécurité. Première erreur que l’on pourrait espérer simplement de langage, une maladresse dans l’expression.
Les attentats : la partie la plus visible de l’islamisme radical
Mais la seconde erreur est sans doute plus grave car elle touche à la stratégie qui doit enfin être mise en œuvre contre l’offensive islamiste globale. Il ne s’agit pas en effet de « lutter contre la radicalisation » comme si le danger résidait uniquement dans la décision à commettre un attentat par des individus « radicalisés », c’est-à-dire déterminés à tuer et à se faire tuer pour leur cause politico-religieuse. Car l’islamisme ne se réduit pas au djihadisme meurtrier : les attentats ne constituent, il faut le répéter, que la partie émergée de l’iceberg.
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Certes il fut déjà difficile de nommer l’ennemi terroriste. Bien après les attentats de Charlie Hebdo et même du Bataclan, Manuel Valls et Jean-Yves Le Drian restaient isolés à oser qualifier de terroristes islamistes les assassins. Et aujourd’hui, le pouvoir politique hésite toujours dans un premier temps à désigner l’islamisme pour ne pas être accusé de « stigmatiser les musulmans ». On l’a encore vu tout récemment avec les atermoiements de Christophe Castaner qui assurait péremptoire aux premières heures après l’attentat de la Préfecture de Police de Paris que rien ne laissait penser que l’assaillant ait quelque chose à voir avec l’islamisme.
La République en proie à une idéologie concurrente puissante
Mais ce qui fait surtout défaut, c’est une conception globale de l’offensive islamiste, c’est une conviction forte du bien-fondé de la lutte contre toute atteinte à l’esprit laïque c’est-à-dire à la défense et de la libre pensée et de la libre disposition de son corps. C’est en effet une lutte idéologique qu’il s’agit de mener contre l’islamisme. Car l’islamisme est un mouvement politico-religieux polymorphe qui vise à imposer non seulement à tous les musulmans une lecture unique et rigoriste du Coran, mais aussi à imposer à l’ensemble des populations non musulmanes des normes issue de cette interprétation intégriste : notamment la séparation des sexes dans l’espace public (les rues, les stades, les plages, les piscines, les écoles, les transports, etc…) mais aussi la reconnaissance du délit de blasphème entravant la liberté d’expression, ou l’introduction de droits spécifiques (tenues vestimentaires, menus halal, espace de prière sur les lieux de travail, etc…).
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Or, le Président Macron ne semble décidément pas convaincu de la nécessité de mener cette lutte dans le discours comme dans les faits. D’une part en affirmant l’illégitimité de telles conceptions et pratiques intégristes islamistes. Pour ce faire il s’agirait en effet de renoncer à toute vison multi-culturaliste de la société visant au séparatisme des « communautés ». D’autre part en faisant respecter scrupuleusement les interdits édictés par les lois existantes, en en promulguant s’il le faut de nouvelles ciblant plus précisément l’intégrisme musulman, et en faisant exécuter les décisions de justice à l’encontre des prêcheurs et des mosquées intégristes (salafistes et wahhabites). Enfin, en opposant une résistance déterminée à l’entrisme islamiste tout particulièrement mené par les Frères musulmans au sein des institutions de la République et notamment en renonçant à ces instances visant à une illusoire organisation d’un islam de France (actuelle Fondation de Islam de France présidée par Ghaleb Benscheikh et Association musulmane pour un islam de France présidée par Hakim El Karoui).
Il s’agit donc de cesser de se leurrer aussi bien avec l’hypothèse du « déséquilibré » qu’avec cette notion confuse et inefficiente de « radicalisation ». Le terroriste qui passe à l’action ne peut le faire que parce qu’il est masqué, protégé et encouragé par un ensemble complexe, fait d’acteurs islamistes déterminés, de mentalités victimaires tous azimuts, de négligences, de lâchetés et de renoncements de la part des pouvoirs publics et des responsables politiques, ainsi que de complicité, de connivence et de naïveté coupable de la part d’intellectuels, de médias et d’universitaires. C’est là que réside le combat auquel doit nous inviter le Président de la République, un combat pour la défense de la République laïque, et non pas nous convier à la suspicion généralisée voire pire à la délation.
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