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Corée du Nord: crise de panique


Corée du Nord: crise de panique
Parade militaire à Pyongyang, avril 2017. SIPA. AP22040751_000077
Parade militaire à Pyongyang, avril 2017. SIPA. AP22040751_000077

Si l’on en croit les spécialistes, la guerre pourrait se déclencher à tout moment entre la Corée du Nord et les Etats-Unis. Mais quelles sont les origines de ce déploiement militaire ?

Le poisson pourrit par la tête

Il y a d’abord la question de la pérennité même du gouvernement de Pyongyang vis à vis de son actuel dirigeant qui est mise en jeu. La population nord-coréenne a de plus en plus de doute sur son chef. Ce dernier, nommé à la hâte, n’avait pas les faveurs du parti : il n’a pas participé à la guerre de Corée, et n’a pas eu de carrière militaire comme son père et son grand père. Il a été élevé en Suisse et n’a pas grandi avec les armes. Contraste absolu d’un pays dont le premier employeur est l’armée.

Mais à sa nomination, Kim Jong Un, a mis un point d’honneur à « nettoyer les doutes », ce qui pourrait expliquer la crise actuelle et ces démonstrations de force outrancières.

Car dans la foulée du « nettoyage », il y a eu des impairs : dans la vision confucéenne des pays d’Extrême-Orient, le respect dû à la famille a son importance. Il faut se rappeler que Kim Jong Un a fait assassiner plusieurs membres de son clan comme son frère Kim Jong Nam en 2017 et son oncle Jang Song-Taek en 2013. Cela a laissé dubitatif plusieurs membres du parti qui l’avaient à la bonne.  Mais à l’instar du chef d’état-major Ri Yong-il le 21 février dernier, ils ont aussi été assassinés.

Les assassinats n’ont rien de nouveau dans le régime. Mais ceux ordonnés par le père et le grand père se faisaient autrefois dans la discrétion d’un accident de voiture ou d’une « crise cardiaque ».  Cette manière de procéder, à savoir les procès suivi d’exécutions spectaculaires, est une façon de prouver à sa population, que le leader veille au grand jour. Mais cela aussi est un impair : il est très mal vu de montrer sa colère dans la tradition coréenne, même si la société est communiste. Et les procès en trahison ne font que faire planer le doute au sein du parti et de la population.

Tous ces facteurs conduisent Kim Jong Un à une fuite en avant pour prouver qu’il est digne du pouvoir. Mais la crise a aussi d’autres origines.

La peur du vide

En effet, 40% de l’économie nord-coréenne est tournée vers la vente d’armes : principalement des missiles à l’Iran, comme les anti-aériens HT-16PGJ. Mais avec la levée des sanctions, le pays des ayatollahs a décidé de suspendre ses achats pour redorer son image auprès de la communauté internationale et préfère dorénavant traiter avec les Russes pour son armement. Les leurs sont plus perfectionnés et moins onéreux.

Autre aspect, l’agriculture. L’objectif de la Corée du Nord en la matière est l’autosuffisance. Mais cette dernière reste encore fortement soumise aux aléas climatiques. Dans un rapport de 2005, à la suite d’inondations torrentielles ayant causé de nombreux dommages, la Fédération internationale de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge (FICR) a souligné que «les catastrophes naturelles constituent une menace sérieuse pour la Corée du Nord. Les dommages causés par les inondations, qui s’ajoutent à ceux de la sécheresse et de l’érosion peuvent causer des pertes économiques évaluées entre 1 et 15 milliards de dollars chaque année »

De plus, le pays affiche un déficit commercial important depuis 1990. Conséquence directe : la dépendance à la Chine, seul allié du régime nord coréen. Le taux de dépendance du commerce nord-coréen vis-à-vis de l’empire du Milieu, premier partenaire commercial est en constante augmentation : 78,5 % de son commerce extérieur en 2009. Cette dépendance se fait surtout sentir sur les ressources minières du pays qui profitent à l’industrie chinoise des nouvelles technologies.

Mais avec un gouvernement chinois qui commence à regarder ailleurs, à savoir en Afrique où elle trouve les mêmes ressources dans des pays moins sulfureux, et une Russie qui n’est plus communiste, la panique de Pyongyang de se retrouver seule se fait sentir.

Tout l’enjeux de cette démonstration de force serait, selon certains experts comme Paik Hak-Sun, directeur de l’institut Séjong, une manière de négocier une sortie de l’embargo économique imposé par les Etats-Unis.

La guerre serait trop dangereuse pour la stabilité de la région : personne ne voudra des millions de réfugiés du régime nord-coréen, pas plus que d’une escalade militaire pouvant déboucher sur l’utilisation d’armes nucléaires, la contamination des poids lourds de l’économie de la région (le Japon et sa pêche) ou la déstabilisation du régime sud-coréen.



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est analyste géopolitique indépendant.

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