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J’me présente, je m’appelle Henri

Le mystère du jeune homme au sac à dos interpelle la société française et ses journalistes


J’me présente, je m’appelle Henri
Le président Macron salue Henri, Annecy, 9 juin 2023 © Mourad ALLILI/SIPA

Un « héros » français très catholique, mais cathodiquement incorrect.


Son visage est lumineux. Sa voix posée. Tout son être respire une certaine sérénité bienheureuse, qui tranche avec l’effroi ambiant. Henri est ce jeune homme de 24 ans qui, par son courage et sa grandeur d’âme, a fait fuir le meurtrier syrien qui a poignardé de sang-froid de très jeunes enfants âgés de deux à trois ans dans leurs poussettes, jeudi matin, dans le square de l’esplanade du Pâquier à Annecy. Au lendemain de ce drame, le jeune homme a témoigné sur les chaines d’infos en continu et a révélé combien sa foi catholique l’aurait guidé dans son action salvatrice. « C’est la grandeur des cathédrales dont je me nourris qui m’a poussé à agir » a-t-il expliqué au micro de CNews, après avoir souligné que sa présence dans le parc de l’horreur n’était selon lui pas dû au hasard, mais qu’il suivait le « chemin des cathédrales » – comprendre en sous texte, que c’est la Providence qui l’aurait mis sur le « sentier du sang », pour reprendre ses termes, là où le Mal a frappé. 

Un comportement qui nous semble anachronique

« La grandeur » dont il parle, c’est la grâce divine ; c’est elle qui l’aurait poussé à s’oublier pour se dépasser, à « relever la tête » comme il le dit lui-même et à agir immédiatement, instinctivement, sans réfléchir. Ce n’est pas la raison qui a déterminé son acte, mais son âme qui a résonné à l’appel du christ sauveur : va sauver ton prochain. 

D.R.

Ce comportement d’oubli de soi et d’immersion dans l’action purement tournée vers l’autre est à mille lieux de l’hyper narcissisme contemporain où le Moi est un haïssable tas de petites photos de soi filtrées et retouchées pour être instagrammables. 

Pour Bruce Toussaint, une révélation !

Devant ce témoignage poignant, Pascal Praud, lui-même croyant, est ébloui par tant de ferveur et de noblesse d’âme. Rien à voir avec la réaction de son confrère de BFMTV, Bruce Toussaint, qui n’arrive pas à en croire ses oreilles ! Cette foi mise au grand jour, et non cathodiquement correcte, a de nouveau surpris, lorsque Henri a expliqué au journaliste du canal 15 qu’une fois l’assaillant arrêté par les forces de l’ordre, il n’est pas rentré chez lui mais s’est mis à prier « la Vierge Marie pour qu’elle vienne en aide aux victimes » de cette odieuse tuerie.

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Dieu, cathédrale, Vierge Marie, grandeur, beauté… Les mots prononcés par ce jeune homme se font si rares que les entendre frappe de stupeur tous les athées laïcards progressistes et adorateurs de Gaia ! Et pourtant, ces mots rappellent finalement qui nous sommes. Ils font écho à notre civilisation chrétienne et à l’identité de la France, fille ainée de l’Église. Alors, devant ce dévoilement d’une foi catholique que notre époque ne peut plus tolérer sans la railler et la salir, on sortira vite les chiens de gardes de l’antifascisme d’opérette pour débusquer si le diable n’est tout de même pas là, tapi dans l’ombre… On a vu Bruce Toussaint tenter de savoir si Henri ne serait pas tout de même un peu zemmourien sur les bords – le journaliste insiste pour savoir si le jeune homme est engagé politiquement [1]. L’Obs, de son côté, a brossé un portrait d’Henri en insistant lourdement sur sa petite notoriété récemment acquise dans la presse catholique et régionale, grâce à son tour de France des cathédrales à pieds et en stop. Le journaliste de l’hebdo de gauche parvient quand même à caser deux fois un terme marqué au fer rouge, « extrême droite », dans une seule et même phrase ! « Selon le site d’actualité d’extrême droite « Boulevard Voltaire », Henri serait également intervenu à plusieurs reprises, avant le début de son pèlerinage, sur les ondes de la radio d’extrême droite Radio Courtoisie » lit-on. Pour Libé et son éditorialiste phare Daniel Schneidermann, l’heure est à la dénonciation : Henri a été récupéré par CNews, ni plus ni moins, « la chaîne du catho-tradi Bolloré ». L’héroïsme singulier du jeune homme et la sincérité de sa foi disparaissent pour laisser place à un procès en instrumentalisation fomenté par les agents de la réacosphère Pascal Praud et Christine Kelly…

Quant au chef de l’État, il n’avait pas l’air très au courant de l’identité d’Henri, lorsqu’il l’a rencontré. Lors de son déplacement à Annecy, on a vu Emmanuel Macron demander au jeune héros qui il était et s’il travaillait comme le jeune homme à côté de lui dans la location de pédalos [2]. On ne devait pas avoir eu le temps de lui préparer ses éléments de langage… 

Jeudi, quand les images terribles de l’attaque d’Annecy sont apparues sur les réseaux sociaux, Henri était « l’homme au sac à dos ». Aujourd’hui, malgré sa déclaration de foi, Henri reste toujours « le héros au sac à dos ». Cachez ce catholique que les médias ne sauraient voir ! Pourtant, pendant tout le week-end, on va entendre parler de recueillement, de bougies, de fleurs, de petits cœurs dessinés sur des papiers, des « vous n’aurez pas ma haine ». Comme si seule cette liturgie païenne, réitérée à chaque drame, restait tolérée par nombre de journalistes. Vendredi à 18h, une messe en hommage aux victimes était donnée à la Cathédrale Saint-Pierre d’Annecy.


[1] https://www.rmcbfmplay.com/video/bfm-tv/les-emissions-speciales/emission-speciale-en-direct-dannecy à 2h16

[2] https://twitter.com/BFMTV/status/1667162069475500035




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