Alors que la croissance et l’émancipation des individus sont au cœur du logiciel macroniste depuis 2017, et que nos perspectives économiques sont peu reluisantes, la question fiscale reste politiquement extrêmement sensible. « Je vois beaucoup de rumeurs selon lesquelles on voudrait augmenter les impôts, il n’est pas question, ce n’est pas du tout la philosophie du gouvernement, d’augmenter les impôts des ménages » indique Elisabeth Borne.
Au moment où la consommation française en biens s’effondre (-10% en deux ans, pour atteindre les niveaux de… 2007), la question de la fiscalité est importante économiquement ; mais elle est aussi importante politiquement car Macron a construit son programme et son « aura » sur les dérèglementations et les baisses d’impôts, principalement pour les riches, et dans une moindre mesure pour les classes populaires avec la suppression de la taxe d’habitation et de la redevance pour la télévision.
L’équation des finances publiques est très difficile pour le gouvernement avec une France qui n’a quasiment aucune croissance de son PIB depuis fin 2019 (1% en trois ans et demi) et qui doit faire revenir le déficit budgétaire de 4,7% du PIB à 3% dès 2027, comme elle l’a promis à l’Union Européenne dans son programme de stabilité budgétaire envoyé en avril de cette année. En effet, la politique de « sérieux budgétaire » de l’Union Européenne va reprendre du galon l’année prochaine. Ces règles ont été désactivées pendant la crise du Covid et la crise énergétique liée à l’Ukraine, mais la Commission européenne a envoyé le message selon lequel le temps des cigales était terminé. La fin du coûteux « bouclier énergétique » a d’ailleurs été demandée par Bruxelles. Le gouvernement français a immédiatement communiqué sur le sujet. Concernant le PIB, la France aura beaucoup de mal à obtenir un peu de croissance avec la hausse des prix de l’énergie qui frappe de plein fouet l’économie en général et l’industrie en particulier. L’Allemagne est dans une situation pire encore. Le PIB de l’Allemagne est au même niveau que fin 2017, un évènement marquant que personne ne semble relever. À court terme, l’Europe semble être entrée dans une véritable récession, l’indice PMI de l’industrie allemande étant même au plus bas depuis 2009 !
Baisse d’impôt, baisse de subvention ou baisse des dépenses publiques ?
Pour obtenir cette réduction des déficits publics réclamée par Bruxelles tout en n’ayant aucune croissance, la France va donc devoir soit baisser les dépenses publiques, ce qui accentuera la baisse de la croissance, soit augmenter les impôts ou baisser les subventions.
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Une nouvelle réforme à la baisse des allocations chômage est prévue par le gouvernement Macron pour début 2024 comme l’a signalé le ministre Olivier Dussopt en mai. Il sera difficile d’aller plus loin dans les réductions des dépenses publiques, vu les difficultés du Français moyen, la forte baisse de la consommation en biens le manifestant très concrètement.
Le gouvernement semble se diriger vers la fin du bouclier énergétique qui coûte environ 50 milliards d’euros par an. Le bouclier tarifaire sur le gaz a pris fin en juin. Depuis la même époque et sur demande de Bruxelles, le tarif règlementé est aussi un vieux souvenir. Sans ce bouclier et les tarifs règlementés, les Français auraient subi des hausses de prix très importantes sur le gaz : les cours de marché du gaz en Europe ont été multipliés par huit entre février 2022 et décembre 2022, puis ont été divisés par huit ! Cette volatilité affectant les factures de chauffage et de cuisson sera maintenant supportée par les Français et ce, « quoi qu’il leur en coûte ». Le bouclier tarifaire sur l’essence a été démantelé en début d’année. Reste le bouclier tarifaire sur l’électricité, l’aide que donne l’État aux entreprises pour que leurs factures soient plafonnées à 28 centimes d’euros le kWh, soit un tarif bien supérieur aux tarifs d’avant la crise. Ne confondons pas cette aide avec les tarifs règlementés de l’électricité qui existent encore pour les particuliers ; ceci est une décision de fixer le tarif de l’électricité, prise par l’État, et non une aide bien que la communication du gouvernement soit volontairement confuse sur ce point, histoire d’embrouiller les Français. L’État supprimera-t-il les chèques énergie réservés aux ménages les plus modestes ? Rien n’est moins sûr quand on sait que près de la moitié des personnes gagnant le SMIC ou moins (smicards, temps partiels et saisonniers…) sautent un repas par jour faute d’argent. La fin du bouclier énergétique pourrait ramener au maximum 50 milliards d’euros par an dans les caisses de l’État.
Coups de rabot
Cela devrait suffire à la Commission Européenne. Il y aura quelques coups de rabot (par exemple, sur la boîte de médicaments dont la franchise sera doublée) et quelques reports potentiels de baisses d’impôts sur la production : la Cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) qui rapporte 9 milliards d’euros par an, « la contrepartie » de la réforme des retraites à 64 ans, pourrait être supprimée par tranches ou plus tard qu’en 2024. Mais il ne semble pas qu’il y aura des hausses d’impôts.
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Les rumeurs de hausses d’impôts sont certainement un faux drapeau agité par le gouvernement pour souligner avec force communication dans quelques mois qu’il tient bon et ne les augmente pas. Il n’y aura donc probablement pas de hausses d’impôts, mais, en contrepartie, l’énergie sera plus chère, ce qui annonce des problèmes pour l’industrie et la croissance.
Si l’État n’augmentera probablement pas les impôts, il n’en sera pas de même pour les impôts locaux. Les conséquences de la suppression de la taxe d’habitation vont se faire sentir à plein cette année : les collectivités locales privées de recettes par le gouvernement et mal compensées pour cet effort vont se rattraper avec de très fortes hausses des taxes foncières. Si la hausse moyenne de la taxe foncière est d’environ 10% nationalement, la taxe foncière augmentera carrément de 59% à Paris, 32% à Grenoble, 16% à Lyon et 11% à Bordeaux !
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