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Belgique, l’autre pays du djihad

Le djihadisme ne fait plus la une des magazines, mais l'excusisme bat son plein


Belgique, l’autre pays du djihad
Patrouille de soldats belges dans le coeur de Bruxelles après les attentats du 13 novembre 2015 en France. ©Geert Vanden Wijngaert/AP/SIPA / AP21825135_000033

Quatre ans après l’attentat de Charlie, trois ans après ceux de Bruxelles, le djihadisme ne fait plus la une des magazines. Pourtant, à Paris comme à Bruxelles, l’immigration massive et l’échec de l’intégration favorisent l’islamisation du Vieux continent. 


Amnésiques et contents de l’être. Pour les bons esprits qui pensent que le danger islamiste est un fantasme de réacs en quête de buzz – voire de revanche postcoloniale –, la révolte des ronds-points a été une divine surprise. Alors que les chaînes d’info ne voyaient plus la vie qu’en jaune, tout autre sujet a littéralement disparu des écrans. Et puisque ce qui n’est pas médiatisé est réputé ne pas exister, divers éditorialistes se sont succédé sur ces mêmes écrans pour se rengorger d’avoir eu raison. On vous l’avait bien dit, les gens se fichent de vos questions (nauséabondes et hors d’âge) d’identité, ce qui compte c’est la fiche de paie – quand on a la chance d’en avoir une. On vous l’avait bien dit, il n’y a pas de problème, sauf dans vos cerveaux malades.

Le délire excusiste

Marine Le Pen le rappelle dans l’entretien que nous publions, « sur les ronds-points, on parlait aussi d’immigration », de sorte que l’activisme de gentils macronistes a échoué à censurer complètement la question dans le grand débat. Face aux caméras, les gilets jaunes ont sagement évité les questions qui fâchent, comme s’ils avaient intégré l’interdit médiatique. Pour autant, soyons honnêtes, la défense des mœurs françaises ne semble pas avoir été au cœur de leurs préoccupations. Beaucoup n’abordaient la question migratoire que sous l’angle de son coût pour le système social – nombre d’immigrés ou d’enfants d’immigrés faisant partie de ses premiers bénéficiaires. Hors antenne ou à l’antenne, il n’est pas sûr que la laïcité, la liberté d’expression, le droit de déconner sur les religions et les périls qu’ils encouraient aient fait beaucoup causer.

A lire aussi: Marine Le Pen: « Sur les ronds-points, on parlait aussi d’immigration »

Depuis les attentats de 2015 et des années suivantes, des études et enquêtes fort sérieuses ont révélé qu’une forte minorité (un tiers environ) des musulmans français étaient entraînés par un séparatisme anthropologique et culturel à vivre dans un autre monde mental que celui de leurs compatriotes. La division entre « eux » et « nous », alimentée par le délire excusiste d’une certaine gauche (qui voit dans la répression policière la poursuite de la guerre d’Algérie), si elle ne conduit que rarement à pratiquer la violence, pousse presque toujours à l’excuser. Cette hallalisation des esprits constitue une véritable bombe à retardement politique, car elle menace le fondement de notre société, notre capacité à vivre ensemble avec nos opinions et croyances diverses, bien plus sûrement, quoi qu’on en dise, que les inégalités sociales. Je peux m’accommoder de l’existence de super-riches (en vérité, je m’en fiche éperdument), pas de territoires où la charia prévaut sur la loi et la burqa sur la minijupe, tandis que la Raison, raconte Erwan Seznec (pages 60-61), perd du terrain face à une conception littéraliste de la foi qui prétend que tout est dans le Coran.

Le joli conte multiculturel de l’accommodement paisible des différences

On ne pourra plus dire qu’on ne savait pas, avons-nous répété. Nous nous sommes trompés. Riss, Val, Zineb El Rhazoui vivent dans la peur et sous haute protection policière, mais la France ne veut pas savoir ce qui se passe dans certains de ses quartiers – et dans l’esprit de certains de ses enfants. Les quatre ans de l’attentat contre Charlie Hebdo ont été célébrés dans un quasi-silence public que le président n’a pas cru devoir rompre. En tête du volume publié par Le Figaro, « L’islamisme, un défi pour notre civilisation », Alain Finkielkraut proclame : « Je suis toujours Charlie », inébranlable comme le sont Élisabeth Badinter, Kamel Daoud, Boualem Sansal et bien d’autres. Mais à relire aujourd’hui leurs contributions, présentées par Alexandre Devecchio, on a le sentiment que le camp du déni a été renforcé par celui de l’indifférence. C’est ainsi que Salafistes, le documentaire de François Margolin dont la diffusion a été interdite en France, sans que grand-monde trouve à y redire, est sorti ce mois-ci. Aux États-Unis.

La séduction qu’exerce un islam littéral et radical sur une partie non négligeable de la jeunesse française devrait préoccuper tous ceux qui pleurnichent volontiers sur les générations futures. Au rayon des problèmes dont elles hériteront, la fracture culturelle qui voit des descendants d’immigrés moins intégrés que leurs parents leur explosera au nez, aussi sûrement, et peut-être plus violemment, que la dette et le réchauffement climatique. Alors qu’on nous rebat les oreilles avec l’une et l’autre, on tait soigneusement tout ce qui pourrait écorner le joli conte multiculturel de l’accommodement paisible des différences. Pour BHL et les sommités de la littérature mondiale qui ont signé son consternant manifeste européen (voir p. 14-17), un seul danger menace l’Europe : le populisme. Il est vrai que l’ignorance est le premier alibi de l’impuissance. Ce qu’on ne peut pas changer, il faut le taire. Or, la question du changement démographique et culturel ne se règle pas à coups de slogan comme « Rendez l’argent ! » ou « Sauvez la planète ! » – les autres non plus d’ailleurs.

Bruxelles, le nouveau « Londonistan »

Ce qui rend cet aveuglement assumé encore plus rageant, c’est que nous disposons à nos frontières d’un laboratoire vivant du désastre. Donc, en négatif, des solutions. Comme le montre le livre du sénateur Alain Destexhe, Immigration et Intégration : avant qu’il ne soit trop tard (Dynamédia, 2018), la Belgique est l’exemple caricatural de ce qu’il ne faut pas faire. Des années d’immigration incontrôlée nappée d’une poix idéologique qui fait ressembler nos immigrationnistes compassionnels à des intellectuels aroniens. Une sorte de penchant collectif à l’autodestruction a dissuadé les nouveaux arrivants de faire le moindre effort pour adopter le mode de vie belge. Une presse décourageante d’unanimisme et de conformisme – pas de Causeur ni de Figarovox – a interdit toute discussion.

Bien que certains s’obstinent à nier l’évidence, en brandissant le cas des djihadistes convertis, il existe un lien direct entre immigration et islamisation. « En vingt ans, résume Alain Destexhe (p. 52-55), la Belgique a naturalisé 600 000 à 700 000 personnes, c’est-à-dire 5 ou 6 % de la population, sans parler des clandestins et des demandeurs d’asile… À Bruxelles, 56 % des habitants sont d’origine étrangère » – de même, précise-t-il dans son livre que 90 % des allocataires d’aides sociales. Des fonctionnaires européens aux journalistes, des élus aux ONG, les élites, farouchement multiculti, refusent l’idée même d’intégration à laquelle elles préfèrent l’inclusion, chère au conseiller d’État Jean Tuot, qui préconisait que l’on abandonne la suprématie de la langue française en France. Jeremy Stubbs observe (p. 56-59) que Bruxelles a pris le relais du « Londonistan » dans les années 2000, après l’adoption, en 2000, de mesures très permissives, élargissant le regroupement familial, procédant à une régularisation massive de clandestins et surtout, accordant la nationalité belge quasiment sans condition. Cette législation masochiste qui, en une décennie, a entraîné l’arrivée d’1 million d’immigrés dans un pays de dix millions d’habitants, a été en quelque sorte l’acte fondateur du populisme européen : cette vague migratoire a lancé la mutation du N-VA, petit parti d’extrême droite flamand, en première force du pays. Dans la foulée, on a vu fleurir les formations plus ou moins souverainistes, mais toutes inquiètes de la progression islamiste, d’abord dans la Hollande voisine, puis dans toute l’Europe.

Little Molenbeek, une marque européenne

Le résultat de la folie belge, Daoud Boughezala l’a observé dans les rues de Molenbeek où coexistent toutes les variantes de la vie hallal (p. 46-51). Le livre du sénateur Destexhe en fournit l’implacable démonstration, si nous n’engageons pas aujourd’hui la reconquête laïque et républicaine, nous aurons demain des dizaines, peut-être des centaines de Molenbeek en France et dans toute l’Europe. Et nombre de nos concitoyens musulmans vivront sous la férule des barbus. Si j’étais les générations futures, je serais vraiment furax.

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Février 2019 - Causeur #65

Article extrait du Magazine Causeur




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Fondatrice et directrice de la rédaction de Causeur. Journaliste, elle est chroniqueuse sur CNews, Sud Radio... Auparavant, Elisabeth Lévy a notamment collaboré à Marianne, au Figaro Magazine, à France Culture et aux émissions de télévision de Franz-Olivier Giesbert (France 2). Elle est l’auteur de plusieurs essais, dont le dernier "Les rien-pensants" (Cerf), est sorti en 2017.

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