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Faut-il systématiquement dénoncer l’apologie du terrorisme?

Chronique d'un dilemme ordinaire


Faut-il systématiquement dénoncer l’apologie du terrorisme?
Auteurs : Gile Michel/SIPA. Numéro de reportage : 00785090_000006.

Il arrive que des musulmans a priori paisibles et pacifiques cautionnent des actes terroristes. On peut hésiter à les signaler. Chronique d’un dilemme ordinaire.


Il y a presque quatre ans, j’étais au CHU avec mon fils hospitalisé pour une bronchiolite. Il partageait une chambre avec un autre enfant. Un petit garçon dont les parents étaient marocains ou en tout cas d’origine marocaine. Sa mère était voilée avec un français approximatif. J’ai cohabité avec ce petit garçon et sa maman pendant quelques jours.

Trois jours en tête-à-tête dans 15m2, ça crée des liens. On a parlé biberon et tétine, j’ai regardé les photos du mariage marocain de sa cousine, on a parlé taxe d’habitation (exorbitante dans sa banlieue !) et abordé plein d’autres sujets divers et variés…

« Hollande l’a un peu cherché… » 

Et on a allumé la télé pour regarder les infos. A la une, l’attentat du Bataclan. On voyait les visages des victimes, les témoignages des familles. Je me souviens du témoignage poignant d’un journaliste qui avait perdu sa femme, avec qui il venait d’avoir un enfant… J’étais bouleversée et ma voisine de chambre aussi. Elle semblait même incrédule, et m’a demandé si vraiment tous ces gens étaient morts. Elle avait l’air stupéfaite. Et puis elle m’a dit cette phrase incroyable : « Enfin Hollande l’a un peu cherché quand même, en intervenant en Syrie »… Elle a argumenté pendant trois minutes une thèse folle qui justifiait les attentats. Évidemment, je lui ai dit aimablement que ce qu’elle venait de dire était inaudible, et que vraiment elle n’avait pas le droit de le penser et encore moins de l’exprimer.

Et puis la conversation banale de voisines de chambre a repris. Et j’ai quitté l’hôpital et on ne s’est jamais revu.

Est-ce que j’aurais du le signaler ? Cette femme est une mère de famille, qui va transmettre à ses enfants des valeurs, des idées, des convictions… Vigilance. On est effectivement tous appelés à être prudents. J’aurais sûrement dû signaler cette femme. Mais comment la dénoncer? Et si je me trompais ? Et si cette personne n’était pas si dangereuse ? Ce ne sont que des paroles ! Est-ce si grave? Mais si elle justifie des actes terroristes, de quoi d’autre est-elle capable ?

Est-on plus français qu’elle ?

Cette vigilance nous force à sortir du politiquement correct, et c’est peut-être la plus grande difficulté que nous avons à dépasser. Pas évident d’écrire dans un article : « Un petit garçon dont les parents étaient marocains ou en tout cas d’origine marocaine, voilée avec un français approximatif »… car ce n’est pas parce qu’elle est voilée qu’une femme n’est pas française, évidemment, et en même temps au fond de moi je ne peux m’empêcher de penser – mais Dieu , comme c’est difficile de l’avouer ! – qu’une femme voilée qui parle mal français ne peut pas être française. Et d’ailleurs, si cette femme pense que nous méritons les attentats que nous subissons, peut-elle se considérer comme française ?

Jeudi dernier, les journalistes se sont sentis obligés de dire de l’assassin de la préfecture qu’il était converti à l’islam depuis quinze mois mais que « son crime n’était pas lié à cette conversion, rien ne dit que c’est un acte terroriste »… Bien sûr, le terroriste en question est fraîchement converti et égorge ses victimes mais ça n’a rien à voir avec le terrorisme islamique ? Mais quand aurons-nous le courage de nous libérer du politiquement correct ?

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est née en 1981. Elle écrit dans différents supports.

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