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A Budapest, les conservateurs du monde entier s’inquiètent de la dénatalité européenne

Le sommet sur la démographie de Budapest s’est tenu du 14 au 16 septembre


A Budapest, les conservateurs du monde entier s’inquiètent de la dénatalité européenne
De gauche à droite, Philip Isdor Mpango, Rumen Radev, Katalin Novak, Giorgia Meloni et Viktor Orban, Budapest, 14 septembre 2023 © Szilard Koszticsak/AP/SIPA

« Le déclin est un choix, nullement notre destin », s’est notamment écriée Georgia Meloni. Hervé Rigolot, responsable du Mouvement Conservateur, qui était présent sur place, raconte.


Conservateurs de tous les pays, unissez-vous ! Telle aurait pu être la conclusion du Sommet démographique de Budapest qui s’est tenu du 14 au 16 septembre 2023. C’est en effet dans le cadre prestigieux du musée des Beaux-Arts de la capitale magyare qu’une assistance nombreuse est venue écouter les différents orateurs invités par le Chef de l’État, Mme Katalin Novak. Ayant occupé les postes de secrétaire d’État à la Famille et à la Jeunesse et de ministre chargée de la Famille, elle a rappelé les 12 points de la politique familiale hongroise. Points qu’elle a, pendant ses différents mandats, mis en œuvre par le biais de nombreux bonus fiscaux à l’appui de la solidarité intergénérationnelle et de la natalité. Jugez plutôt : prêt à taux zéro de 33 000 euros pour une naissance dans les cinq ans et aide financière conséquente pour l’achat d’un monospace dès trois enfants sont ainsi venus compléter des dispositifs facilitant le congé parental et les allocations familiales. En dix ans à peine, la Hongrie est de cette façon passée de 1,25 enfant par femme à 1,6 tandis que la France sur la même période est passée de 2,03 à 1,84 enfant par femme.

La question de la démographie absente du débat national français

Depuis 2015, ce forum rassemble des décideurs politiques, universitaires ou experts venus de toutes disciplines désireux d’aborder enfin ce défi démographique absent de nos débats politiques hexagonaux. Comme si une ligne de fracture s’était irrémédiablement installée entre les pays de l’Est de notre continent et ceux de l’Ouest. Ceux-ci regardant les migrations comme la clef d’économies basées non plus sur la production, mais sur la consommation de services à faible valeur ajoutée. Et ceux-là qui regardent leur identité comme une ultime assurance vie et ne devant donc compter que sur leurs seules forces vives, leur culture et leurs traditions, pour s’imposer au milieu d’empires qui furent rarement favorables à leur permanence historique.

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Dernier empire en date, précisément, l’Union Européenne, que M. Orban ne s’est pas privé de critiquer lors de son discours du 15 septembre, en qui il voit le cheval de Troie d’une idéologie du genre qu’il n’hésite pas à considérer comme un nouveau communisme. C’est sans doute aussi pour compter ses alliés, dans la perspective des élections européennes du 9 juin prochain, que le concours de Mme Meloni a été particulièrement apprécié par le chef du Fidesz. Il faudra en effet envoyer au Parlement européen suffisamment de députés conservateurs pour desserrer l’étau de sanctions, liées à l’attribution de fonds européens et dont l’initiative revient, contre toute attente, moins à la Commission qu’aux eurodéputés eux-mêmes. Au moment précis où accostaient à Lampedusa quelques 5000 migrants venus de Tunisie, l’allocution de Mme Meloni était particulièrement attendue. Le chef du gouvernement italien, mis en difficulté par les résultats de sa politique migratoire qui tardent à satisfaire sa majorité, a rappelé que le changement culturel est un défi encore plus préoccupant que le changement climatique. Elle a insisté sur la convergence entre politique familiale et emploi féminin. Dans ce contexte, il est donc essentiel de cultiver son identité européenne, sans quoi, dit Mme Meloni, « nous ne sommes que des outils, des numéros ». Et de conclure son propos par un percutant : « Le déclin est un choix, nullement notre destin ».

L’UE ne s’inquiète que de l’économie

M. Roumen Radev, président de la Bulgarie depuis 2017, aura aussi son mot à dire dans la formation annoncée d’un groupe de pression conservateur au sein de la future euro-législature de juin 2023. Pour l’heure, il a décrit son pays comme un pays d’émigration, dont le taux de natalité de 1,4 enfants / femme, ne permet pas le remplacement des générations bulgares. Il décrit avec émotion la fuite de sa jeunesse vers l’Allemagne au point de parler de « transition démographique inversée ». C’est pourquoi il a décidé d’engager son pays dans une politique de rétention tous azimuts, qui passe non seulement par un soutien à la natalité, mais aussi de protection de la propriété, de soutien à un Etat de droit encore balbutiant à Sofia. Ce faisant, il démontre qu’une démarche de peuplement efficace implique une politique familiale qui, si elle est nécessaire, n’en est pas pour autant suffisante. Et M. Radev de s’étonner que les jeunes de son pays soient régulièrement appelés à l’excellence pour devenir des professionnels compétents, mais jamais à devenir des parents attentionnés. Alors que c’est pourtant bien sur le terrain de la démographie que se jouent les destins de ces vieilles nations européennes, mais aussi des pays musulmans comme le Qatar, le Kazakhstan, les Emirats et le Bahreïn, lesquels étaient également représentés à ce sommet dont le rythme a été jalonné par des danses folkloriques et autres chorales venues de toutes les régions de Hongrie.

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Et la France, dans tout cela ? Elle était, de façon somme toute logique, assez peu représentée – sinon par le Mouvement Conservateur, présidé par Mme Laurence Trochu, et par le Syndicat de la Famille – tant il est vrai que notre pays néglige le problème nouveau – un de plus, pourrait-on dire – posé par sa démographie. Depuis les années Hollande, la politique familiale est vue comme un volet parmi d’autres d’une politique sociale attrape-tout dont les succès se jugent moins sur l’efficacité des filets protecteurs qu’elle propose, que sur le nombre d’allocataires toujours croissant qu’elle assiste. Dans ce contexte, le Mouvement Conservateur est donc bien le seul à s’emparer de cette question pourtant existentielle et à la porter sur l’échiquier politique national. Et il aura certainement à cœur d’enfoncer le clou lors de la journée des conservateurs qu’il organise à Asnières / Seine le 14 octobre et dont les inscriptions viennent de s’ouvrir. En outre, agissant au cœur de la droite française autant comme un aiguillon que comme un espace de dialogue, le Mouvement Conservateur lance une grande consultation web afin de définir le plus grand dénominateur commun de la droite. Nul doute que les questions de famille et de souveraineté y figureront en bonne place. Et si les eaux du Danube étaient déjà en train de grossir celles de la Seine ?



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Responsable du Mouvement Conservateur dans les Hauts de Seine.

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