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Refus d’obtempérer: une révolution intellectuelle est nécessaire

Un homme est mort à Nice et une femme à Rennes en 24 heures


Refus d’obtempérer: une révolution intellectuelle est nécessaire
Xose Bouzas / Hans Lucas / Hans Lucas via AFP

La force légitime de la police nationale est contestée par principe ! La multiplication des refus d’obtempérer, et des drames qui peuvent en être la conséquence, nécessite un changement d’esprit de la société française.


Les refus d’obtempérer se multiplient et malheureusement parfois ils contraignent la police, pour se protéger, à faire usage de la force légitime dont l’exercice conduit à la mort des transgresseurs et à celle, plus rare, de ceux qui les accompagnent. À Nice, un jeune fonctionnaire a dû avoir ce comportement qui a abouti à une issue tragique. En 24 heures, un autre refus d’obtempérer à Rennes a eu pour conséquence la même dramatique conclusion. À chaque fois le même processus se reproduit : une enquête administrative concernant le policier en cause, son placement en garde à vue et l’ouverture d’une information judiciaire pour déterminer les modalités exactes du refus d’obtempérer et des effets qu’il a engendrés.

Ne parlons plus de violence policière

Pour parler net, et sans doute vais-je choquer, je suis scandalisé, en déplorant naturellement ces morts, par le fait que par principe la police est suspectée et l’usage de sa force légitime questionné. Il n’existe pas d’institution qui soit autant contrôlée, passée au crible et considérée avec méfiance. La loi n’est plus une garantie mais en l’occurrence une validité à vérifier. Sur ce sujet je ne peux que reprendre, en me proposant de le compléter, mon article du 13 juin 2022. D’abord je rappelle que la mission de la police n’est pas, comme on le dit trop souvent, de mettre en œuvre une violence, aussi légitime qu’elle puisse apparaître, mais une force absolument légitime. Cette distinction est capitale.

D’une part il est sain que des fonctionnaires de police puissent être poursuivis pour les violences illégitimes qu’ils auraient pu commettre sans le moindre lien avec les difficultés du maintien de l’ordre et des interpellations qu’ils ont à effectuer surtout quand il y a, on le devinera, résistance.

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D’autre part, et cela s’est aggravé depuis les conséquences des manifestations des gilets jaunes, il convient de récuser le parallèle qui, mettant ensemble police et ceux qui s’en prennent à elle, banalise l’action de la première comme si elle s’inscrivait dans un cadre ordinaire sans que les fonctionnaires soient, par esprit démocratique et volonté régalienne, revêtus d’un statut spécial. Ceux qui n’obtempèrent pas, résistent, cherchent à fuir, à blesser et à tuer doivent naturellement être perçus comme des personnes dont l’hostilité est évidente. Il ne faut donc pas se tromper d’ennemis et, par ce qu’on fait subir à la police après les péripéties, quelle que soit leur issue, laisser croire forcément à l’opinion publique que la confiance lui est mégotée. D’autant plus que la réalité est implacable : ceux qui refusent d’obtempérer ont tous des mauvaises raisons de le faire et, sauf à vouloir que la police se laisse massacrer sans réagir, je considère qu’il est indécent, au nom d’une démagogie et d’une lâcheté, de ne pas jouer cartes sur table en laissant, par exemple, la charge de la preuve de la prétendue malfaisance policière à ses adversaires.

Un changement d’esprit est nécessaire

Ce renversement serait de nature, dans une période où le pouvoir politique est d’un manque de courage insigne sur le plan régalien – ne soutenant les forces de l’ordre que si cela ne conduit pas à déplaire aux compulsifs de la haine anti-police et aux médias toujours prêts à se tromper de culpabilité -, à modifier l’état d’esprit collectif et au moins à persuader le citoyen que le mal vient d’ailleurs que de la police. Ce devrait être une donnée de base dans une République lucide et responsable mais on sait dorénavant que rien n’est inutile pour combattre les absurdités prétendues progressistes, en réalité désastreuses pour notre sauvegarde.

Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin et le président Macron à Chambord, juillet 2020 © Lemouton / Pool/SIPA

Cette révolution intellectuelle, juridique, judiciaire et politique sera d’autant plus nécessaire que ces oppositions aux interventions légitimes de la police ou de la gendarmerie vont s’amplifier parce que notre société est trop indulgente au regard de cette double dérive : tout ce qui est officiel est attaqué et mis en pièces, toutes ces transgressions ne sont pas appréhendées avec leur juste gravité politique, judiciaire et médiatique.

Pour ma part, serais-je le dernier que je refuserais de céder à la complaisance d’aujourd’hui : détester la police, porter un regard attendri sur les voyous puisqu’ils lui résistent, la frappent ou la tuent. Je regrette que l’Etat, malgré l’affichage, ait une main de faux fer dans un gant de vrai velours.



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Magistrat honoraire, président de l'Institut de la parole, chroniqueur à CNews et à Sud Radio.

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