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Quand Mélenchon se bat la coulpe

Faute avouée à moitié pardonnée?


Quand Mélenchon se bat la coulpe
Jean-Luc Mélenchon au Plessis-Pâte (91), 15 septembre 2023 © MPP/SIPA

Dans une relative indifférence médiatique, le lider maximo vient de s’excuser publiquement d’avoir soutenu les émeutes de banlieue en juin dernier. Mais ne comptez pas non plus sur lui pour s’assagir complètement. Ses fans lui en voudraient trop.


En 1901, dans Que faire, Lénine écrivait une formule connue de tous les militants d’extrême gauche chevronnés, à commencer par les trotskistes : « Ce qui serait terrible, ce serait l’obstination dans l’erreur, une fausse honte à la reconnaître et à la corriger. »  Lundi dernier à Paris, on peut supposer que Jean-Luc Mélenchon s’est récité à lui-même ces quelques mots canoniques avant de concéder, au détour d’un discours en hommage à Salvador Allende, ses coupables errances durant les récentes émeutes de banlieue.

Le sens de la litote

« N’oublions pas non plus nos erreurs, a-t-il lancé. Je parle des miennes, et de celles de quelques-uns d’entre nous ici, d’avoir cru que la violence de guérilla urbaine pouvait venir à bout d’un régime, et que c’était une méthode qui pouvait avoir du succès. » Une allusion tout à fait implicite à la complaisance qui a été la sienne au début de l’été, quand la violence s’est déchaînée dans les rues de nos cités, avec plus 2 500 bâtiments dégradés, dont seules les écoles et les médiathèques méritaient, à ses yeux, d’être épargnées.

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Passons sur son sens de la litote – car ils ne sont pas seulement “quelques-uns” à avoir fauté : tous les cadres de La France insoumise, sans exception (sans doute quelques-uns étaient-ils terrorisés), ont accepté sans broncher les outrances du leader historique. Et reconnaissons les faits: celui qui est aujourd’hui président de l’Institut La Boétie vient de faire son mea culpa, et a reconnu en toute transparence que son refus d’appeler au calme en juin dernier était un message d’approbation, si ce n’est d’encouragement.

Pour se donner le beau rôle, l’ex-lambertise, qui arborait ce jour-là une surprenante cocarde tricolore à la boutonnière au lieu de son habituelle triangle rouge de déporté politique, a même surenchéri : « Je dis aux plus jeunes d’entre nous: ne commettez pas la même erreur que nous, souvenez-vous que rien ne vaut au-dessus de la démocratie et de la mobilisation populaire. Rien n’est plus fort que la volonté des masses quand elle s’exprime par une volonté politique et l’installation d’un pouvoir légal. »  N’en jetez plus.

Fabien Roussel ? Beaucoup trop violent pour Mélenchon

Trois jours plus tard, Jean-Luc Mélenchon enfonçait d’ailleurs le clou (certes pour contrarier ses alliés communistes – on ne se refait pas) en condamnant sur X/Twitter « l’initiative violente » du secrétaire national du PCF Fabien Roussel, qui venait d’appeler sur France Info à se rassembler devant les préfectures, voire à les « envahir » en guise de protestation contre la « vie chère ». Pour un peu, on reconnaîtrait à l’ancien député de Marseille le droit de dire : « la République c’est moi ».

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Mais revenons au discours de lundi dernier. Évidemment, devant un parterre d’huiles du mouvement, parmi lesquelles Mathilde Panot, Jean-Luc Mélenchon ne pouvait se contenter d’un simple repentir. Il devait quand même à ses admirateurs un ou deux de ces déhanchés qui ont fait sa réputation. N’a-t-il pas promis jadis qu’il était “le bruit et la fureur, le tumulte et le fracas” ? Alors, tel Johnny Hallyday entonnant “Allumer le feu” à la fin d’un concert, l’Insoumis a repris le show habituel, a insulté Emmanuel Macron et Elisabeth Borne, attaquant carrément leur physique, les taxant de “visage bestial”, les comparant à Augusto Pinochet. Rien que ça ! Comment ça, vous dites qu’il est un Donald Trump de gauche ? A moins, que vous ne pensiez à la “culture du harcèlement” ?

La parole est à la défense. Dans Napoléon le petit, Victor Hugo écrivait: « La tribune française, c’est la bouche ouverte de l’esprit humain, faisant le chaos pour en tirer la vie, faisant la révolution pour en tirer la République. » Tant qu’il reste sur une estrade à distribuer des noms d’oiseaux, Jean-Luc Mélenchon ne fait pas de mal à grand monde. Un psychanalyste saluerait sans doute les effets salutaires d’une telle parole cathartique sur les deux publics cibles de l’extrême gauche : le personnel de l’Education nationale et la jeunesse des banlieues, deux populations particulièrement sensibles à la puissance du verbe – Médine ne dirait pas le contraire. Un publicitaire, lui, conseillerait peut-être à La France insoumise d’imiter le logo en forme de mégaphone du Nouveau Parti anticapitaliste et d’adopter enfin l’emblème qu’elle mérite: un bâton de guignol.

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