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Quand ChatGPT refoule les migrants à la frontière

Réfugiée Afghane déboutée par l’IA: une initiative isolée à généraliser?


Quand ChatGPT refoule les migrants à la frontière
Image d'illustration

Selon une information du Canard Enchainé, un fonctionnaire de l’immigration français a eu recours à l’intelligence artificielle pour savoir si une jeune Afghane devait être ou non accueillie sur notre sol. Le ministère de l’Intérieur a ouvert une enquête.


Sans trop prendre de risques, on peut s’avancer : il est la star de l’année 2023. Qui ça ? Chat GPT ! Et tous ses petits concurrents spécialisés dans l’intelligence artificielle, qui défrayent la chronique depuis janvier.

Les grands esprits se rencontrent

À condition d’utiliser les bons prompts (c’est-à-dire les mots-clés pertinents qui orientent l’intelligence artificielle dans la bonne direction), le journaliste, l’avocat ou le prof peuvent savoir en quelques clics grâce à ce satané robot si tel article, telle plaidoirie ou tel cours avancent dans la bonne voie. Et pourquoi pas, le laisser même faire tout le sale boulot.

Apparemment, les mêmes techniques de travail sont en train de gagner le ministère de l’Intérieur. Le Canard enchaîné révèle que l’un de ses fonctionnaires a utilisé l’intelligence artificielle, le 13 septembre, pour savoir si une jeune Afghane réfugiée à Téhéran était susceptible de se voir décerner un visa. Dans son mémoire, présenté devant le tribunal administratif de Nantes, il précise s’être appuyé sur Google Bard : « L’administration a procédé à une expérimentation. La situation des demandeurs (la jeune fille et sa famille) a été synthétisée et soumise à l’intelligence Bard. Il ressort de cette analyse que l’enfant X n’était pas éligible à la réunification familiale ». Plus loin : « L’analyse de cette intelligence artificielle est donc similaire à celle de l’administration ». Le Canard, amer, souligne : « Quand les grands esprits se rencontrent… ».

Elle venait d’avoir 19 ans…

Initiative isolée d’un fonctionnaire zélé ou demande du ministère ? C’est toute la question.

Beauvau plaide pour la première hypothèse, et le ministre a commandé une enquête administrative pour faire toute la lumière sur cette histoire.

A lire aussi, Georges Fenech: «Les juges politisés portent une responsabilité dans l’ensauvagement de la France»

En attendant, les journalistes du Canard ont testé de leur côté la demande faite par le fonctionnaire à Google Bard : « Pour bénéficier de la réunification familiale, il faut avoir moins de 19 ans. L’enfant a donc 19 ans et 3 mois à la date du dépôt de la demande de visa. A la lumière de la décision du Conseil d’Etat du 29 juin 2023, peux-tu me dire si cet enfant était éligible ou non à la réunification familiale ? ». Tantôt, Google Bard répond non. Mais parfois, aussi, oui.

Je suis désolé Dave, je crains de ne pas pouvoir faire ça…

On craint que l’intelligence artificielle menace très bientôt les métiers des cols blancs. On resonge à Terminator, à 2001, l’Odyssée de l’espace, à tous ces films apocalyptiques où les machines dotées de conscience finissent par se rebiffer contre leur créateur. Finalement, on est peut-être plus dans l’adaptation cinématographique d’Illusions perdues (2021) et la scène du singe alcoolisé qui est chargé de désigner si tel ou tel ouvrage doit être encensé ou massacré.

Et en réalité, le hasard est moins total qu’il n’y parait. L’intelligence artificielle s’adapte aux recherches déjà effectuées sur l’ordinateur depuis lequel la demande est formulée. Selon le temps d’écran passé par l’utilisateur sur les pages de Fdesouche ou sur celles de SOS Méditerranée, l’intelligence tente de lui faire plaisir… Plus traître encore que l’historique de navigation que l’on oublie de supprimer et que découvre votre femme, l’intelligence artificielle en dit long sur vos fréquentations numériques.

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