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Nanterre: une routine fatale

Emoi après la mort d'un jeune à Nanterre


Nanterre: une routine fatale
Les pompiers interviennent après des départs de feu faisant suite à la mort d'un automobiliste de 17 ans abattu par la police, Nanterre, 27 juin 2023 © Zakaria ABDELKAFI / AFP

Séparatisme. L’enquête de l’Inspection générale de la police permettra de connaître les circonstances de la mort de Naël, hier matin, à Nanterre, ce jeune homme de 17 ans abattu par la police alors qu’on le voit refuser d’obtempérer dans une vidéo choquante. Des émeutes et des dégradations ont été observées hier soir, « concentrées dans les Hauts-de-Seine, un peu en Île-de-France et un peu en province », selon le ministre de l’Intérieur. La vidéo ne permet pas d’une part de voir ce qui s’est passé avant que le policier ne sorte son arme. Et on peut d’autre part légitimement se demander, si le drame générerait autant de violences urbaines et de propos outrés à l’extrême gauche contre l’État s’il ne s’était pas produit dans la banlieue parisienne à forte population immigrée mal intégrée, ou si la victime s’était appelée Jean-Baptiste ou Didier… Commentaire.


La  mort d’un jeune homme de 17 ans suscite toujours la compassion et on doit s’incliner face  au deuil de familles  désolées, personne n’en disconvient,  mais ce qui s’est passé hier à Nanterre n’est pas seulement un drame. C’est aussi une routine, car chacun connaît désormais le nombre des refus d’obtempérer – un refus d’obtempérer toutes les 20 minutes – parfois aussi suivis par des blessés ou des morts de policiers, de gendarmes ou de personnes qui ont le malheur de croiser sur leur route les individus mineurs ou majeurs, délinquants souvent, qui conduisent sans permis des voitures souvent volées.

Une vieille histoire

Ce fait divers est récupéré politiquement comme d’autres mis en avant par l’extrême-gauche parce qu’il est politique justement : il illustre cette confrontation entre jeunes de quartiers et policiers qui dure depuis  40 ans. 

Moi-même j’ai eu l’honneur de participer à la création de la police de proximité voulue par Jean-Pierre Chevènement et arrêtée brutalement par Nicolas Sarkozy.  Un film documentaire, réalisé par Bernard Mangiante « A l’écoute de la police » avait filmé tout au long une formation que j’animais et  qui avait pour fil conducteur la rencontre de policiers, eux-mêmes formateurs dans les écoles de police, avec quelques-uns de ces jeunes. Tout était dit alors : les misères de l’institution policière où règnent trop souvent l’absurdité et les contradictions des recommandations faites aux policiers de terrain par une hiérarchie, qu’ils disent avec amertume surtout préoccupée par sa carrière,  l’abandon et le mépris qui est le lot de cette police de terrain au front quotidiennement et qui finit parfois par faire le sac de sable, expression qui désigne  la démotivation et la démission devant les provocations d’une jeunesse désœuvrée et haineuse qui se voit trop souvent, comme elle ose parfois le proclamer, victime d’une armée d’occupation qui occuperait « son » territoire. 

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La police de proximité était une belle idée qui consistait à rapprocher la police d’une population en  manque de sécurité et  qui permettait aux policiers de connaître le terrain en y ayant  des indicateurs et  donc des renseignements utiles à l’interpellation de trafiquants ou de criminels. Il ne s’agissait pas comme l’avait prétendu Nicolas Sarkozy devant un commissaire de police de Toulouse de jouer au foot avec les délinquants. 

Une jeunesse victimisée

La  confrontation entre des jeunes plus ou moins délinquants et leurs complices par appartenance quasi tribale et les policiers qui, je le rappelle, est une constante depuis le début des années 80, ressemble en réalité à ces confrontations de l’intifada qui voyaient des jeunes et des majeurs et des hommes de tous âges s’en prendre à l’armée israélienne dite d’occupation. En réalité,  ce sont les mêmes passions qui animent cette partie de la population d’origine immigrée et maghrébine ou subsaharienne qui voit dans les employés de l’État français,  policiers, pompiers,  préposés et guichetiers des postes même, les représentants d’un État honni, prétendument raciste. C’est la haine qui est le ressort de ses affrontements dont les policiers sont trop souvent victimes et qui conduit certains à réagir parfois par des comportements inexcusables  et pourtant explicables : « Nous sommes des boxeurs avec les bras liés dans le dos » m’affirmaient-ils dans les sessions que je conduisais. Les refus d’obtempérer, les caillassages de commissariats de police, les rodéos ostentatoires sont les manifestations, entre autres, de cette haine prétendue de l’autorité qui est en fait une haine de cette France qu’on leur a appris à détester.  

La victimisation de cette jeunesse renforcée par les discours de gauche et les propagandes islamistes est la clé qui permet de comprendre ce qui se passe pour ces jeunes qui se déclarent abandonnés, parqués comme ils disent, sans pouvoir connaître reconnaître la complexité d’une situation de ghettoïsation qui n’a pas été voulue mais qui est la conséquence de comportements collectifs qu’il faudrait décortiquer longuement. Il faudrait dénoncer toutes les responsabilités qui ont conduit à cette situation de séparatisme. Certains hommes politiques et élus locaux déplorent les conséquences dont ils furent en partie les causes. Dans ce temps où l’on s’indigne de toutes parts, il serait pourtant urgent d’agir en connaissance de ces causes, car  prenons désormais garde que ces événements si banals aujourd’hui ne soient  les prémices de la levée d’une armée d’enfants-soldats au service d’ambitions totalitaires. 




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Essayiste et fondateur d'une approche et d'une école de psychologie politique clinique, " la Thérapie sociale", exercée en France et dans de nombreux pays en prévention ou en réconciliation de violences individuelles et collectives.

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