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Yazid Sabeg, l’homme qui ne comptait pas


Yazid Sabeg, l’homme qui ne comptait pas

Le commissaire Yazid Sabeg renonce à légiférer pour mesurer la diversité. Commissaire, c’est l’appellation inventée par Sarkozy, grand amateur de fictions policières sur TF1, pour appeler les ministres honteux qui n’ont pas le courage d’être ministre chez lui, genre Martin Hirsch, haut commissaire à la solidarité active et au pléonasme.

C’est une bonne nouvelle pour la République, à moins que Monsieur le commissaire Sabeg ait estimé que chaque camp était encore insuffisamment armé et entraîné pour mener à bien la guerre ethnique qui fera sortir une France ravigotée et revitaminée par un bon bain de sang.

En effet, pour l’instant, malgré leurs appels à la guerre sainte pour la francité contre les dhimis, les identitaires de souche sont tactiquement et techniquement ridicules, car ces amoureux des armes sont trop jeunes pour avoir connu l’époque bénie où ils auraient pris des coups de pompe dans le train par des chefs de section, pendant les trois mois de classe de leur service militaire, cette colonne vertébrale de la nation. Et puis, les derniers temps, quand ils le faisaient, c’était « en entreprise » et, au bout de douze mois, ils étaient plus familiers de la photocopieuse que du Famas et pensaient que Mac 50 était le nom d’un groupe de RIF (rock identitaire français). On se souvient ainsi de l’incompétence de Maxime Brunerie, le Lee Harvey Oswald du Bloc Identitaire et de son calibre 22, tirant sur Jacques Chirac le 14 juillet 2002 avec l’imprécision d’un économiste télévisuel vous donnant les chiffres de la croissance pour l’année prochaine.

En face, les lascars sont plus préoccupés par des bisbilles internes (gare du Nord, parvis de la Défense) et prouvent un amateurisme pénible dans la chasse au Noctilien, une espèce de dinosaure à moins que cela soit un moyen de transport, il ne sait plus trop Yazid Sabeg. Impossible d’espérer chez ces jeunes gens sans Vercingetorix ou sans Marx une unité digne de ce nom.

Quant aux républicains des deux rives, ma tribu à moi, on cherche un général avec un bon projet social. Genre Otelo de Carvalho (qui n’était que capitaine d’ailleurs), le 25 avril 1974 au Portugal. À défaut, on choisira la solution Dominique de Roux ou Jacques Perret : une ferme fortifiée, des femmes, du vin et les œuvres complètes de Louis Aragon. Chaque matin, on lèvera les drapeaux rouges et tricolores, et, comme à la fin d’un mitinge du Parti Communiste Français, on chantera la Marseillaise et l’Internationale.

Quand tout le monde sera au point, Yazid Sabeg reviendra sur sa décision, on procèdera à l’évaluation des forces et on pourra commencer le remake libanais ou yougoslave que tout le monde semble attendre aux deux extrêmes de l’échiquier politique et peut-être ailleurs, tant l’odeur du sang est le seul fantasme morbide qui reste aux spectateurs debordiens que sont devenus les citoyens français. Pour se prouver qu’ils ne sont plus simplement le mauvais rêve de cette société endormie dans le cauchemar de l’hypercapitalisme terminal (chômage de masse, effondrements boursiers, pandémies mutantes et environnement exténué) mais qu’ils peuvent avoir mal « en vrai ».

Quand la Seine-Saint-Denis fera sécession, les cités encerclant les poches pavillonnaires pleines de fafounets rurbains supporteurs du PSG et tireurs approximatifs, Yazid Sabeg sera certainement chargé par l’ONU des premiers pourparlers de paix, genre Dayton à la mode neuf-trois, traçant des frontières à peu près aussi inapplicables entre blancs, blacks et beurs qu’entre Serbes, Croates et Bosniaques de Bosnie-Herzégovine. Ces accords seront garantis par des troupes de l’ONU, notamment par un contingent belge, lui-même soumis à de fortes contradictions internes entre Wallons, Bruxellois et Flamands, ce qui risque de rendre son action inefficace tout comme celle du contingent sri-lankais dans les quartiers nord de Marseille ou du contingent rwandais à Roubaix.

Yazid Sabeg se proposera sans doute gentiment de les aider à se compter et ce sont des officiers fatigués qui lui répondront que non, vraiment, s’il pouvait éviter de compliquer les problèmes…



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