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Les « lycéens » de Mantes-la-Jolie ne sont pas des anges

L'indignation sélective d'une certaine presse et des réseaux


Les « lycéens » de Mantes-la-Jolie ne sont pas des anges
Arrestation de lycéens à Mantes-la-Jolie, 6 décembre 2018. / CÉLINE AGNIEL / AFP

L’arrestation spectaculaire de lycéens à Mantes-la-Jolie, le 6 décembre dernier, n’a choqué que ceux qui avaient choisi d’oublier ce qui s’était passé avant. 


Alors que vendredi, Paris se préparait à un nouveau samedi de mobilisation des gilets jaunes et que tout le monde craignait de voir se reproduire les mêmes violences que celles constatées le 1er décembre, la presse et les réseaux sociaux faisaient des gorges chaudes de l’image de jeunes voyous, à genoux et mains sur la tête après leur interpellation. « Violences policières », « humiliation » sont ainsi mises à toutes les sauces. Or les faits ne permettent pas de soutenir une thèse aussi ridicule que dangereuse. Au vu de la réalité du territoire comme des évènements, une telle attitude est irresponsable.

Indignation surjouée…

Ces « lycéens » ne sont pas de délicieux angelots innocents empêchés de s’exprimer par un Etat fascisant et une police hors de contrôle. Que les journalistes et les réseaux sociaux arrêtent de jouer avec les mots. Rapprocher ces images de scènes issues de la Deuxième Guerre mondiale, expliquer que seuls les nazis se comportaient comme ça, en référer aux tortures lors de la guerre d’Algérie, c’est lamentable et c’est surtout inciter à la violence contre des policiers qui, aujourd’hui, sont les derniers à sembler se soucier de la protection du peuple.

Des casseurs ont été maîtrisés, c’est bel et bien le rôle de la police et les petits voyous n’ont pas été violentés plus qu’il ne faut pour maîtriser un excité. Pas de quoi fouetter un chat donc, mais largement de quoi jeter de l’huile sur le feu quand cela est interprété par certains comme « un retour aux heures les plus sombres de notre histoire ».

Et de Benoit Hamon à Cécile Duflot, en passant par Eric Coquerel et Ian Brossat, tous y sont allés de leur indignation surjouée, alors qu’ils savent très bien dans quel contexte ces interpellations se sont déroulées. Cette gauche de la complaisance n’a plus aucun rapport au réel, seul lui importe de servir la soupe à son électorat. Un électorat qu’elle imagine constitué uniquement du genre d’individu qui passe à l’acte violent dès que l’occasion s’en présente et qui justifie toutes ses exactions au nom d’une oppression largement fantasmée.

…et faits minorés

Pourtant, pour éviter de faire passer des casseurs fussent-ils jeunes pour des lycéens lambdas, il suffisait de s’intéresser aux faits. Et tout à coup, on se rend compte que l’on est bien loin des pauvres petits choux innocents victimes de la répression bourgeoise et capitaliste. Selon Actu 17, « 200 individus se sont rassemblés dès 9h30. Les policiers ont de nouveau été caillassés. Plusieurs voitures ont été retournées et incendiées. Un automobiliste a été agressé et dépossédé de ses affaires. La situation va prendre un tournant vers 11h30, lorsqu’une trentaine de policiers équipés de matériel de maintien de l’ordre ont repoussé environ 150 jeunes, qui les ont caillassés. Les fonctionnaires ont reçu des barres de fer, des pavés et des bouteilles. Ils ont alors effectué une charge. Les émeutiers ont été pris en tenaille par d’autres policiers et se sont réfugiés dans les locaux des Restos du Cœur. Ils ont alors été interpellés ».

Même son de cloche au Monde : « Jeudi matin, les premières poubelles ont été incendiées vers 9 heures à Saint-Exupéry avant que deux véhicules ne s’embrasent sur le parking de la patinoire, à 300 mètres de l’établissement. « Les lycéens ont voulu bloquer l’entrée du lycée, situé au fond d’une impasse, mais ils ont vite fait demi-tour, car les policiers, qui étaient en planque tout autour, les attendaient, détaille un résident. Comme la veille, ils ont ensuite voulu les attirer vers le Val-Fourré, sauf que les forces de l’ordre étaient réparties des deux côtés de la rue. Du coup, ils se sont tous fait coincer derrière la Maison des associations-Agora, située en face du lycée Saint-Exupérylà où les vidéos ont été tournées ». » 

Si on arrêtait donc le grand lamento et que l’on parlait du réel. A Mantes-la-Jolie, on n’est pas dans le XVIème arrondissement. Dans ces banlieues où se concentrent les zones de non-droit, on trouve une jeunesse désocialisée, hyper violente sans limite ni éducation. On a vu les images à Aubervilliers de ces soi-disant manifestations lycéennes qui ressemblent plutôt à des hordes barbares. La vision de ces « lycéens » n’était pas rassurante. De vraies grenades dégoupillées.

Lycéens mention destruction

La vidéo les montre à genoux, les mains sur la tête, où est le scandale ? Ils ne sont pas en sang, ligotés, violentés. C’est une façon de les faire se tenir tranquille. Cette position n’a pas pour vocation d’humilier, elle sert à contenir. Dans cette position, on ne peut ni bondir, ni se relever rapidement. Et les mains sur la tête ou menottées permettent d’éviter jets d’objet et gestes violents. Sinon on peut essayer en leur demandant gentiment et en leur distribuant des fleurs, des peluches et des bonbons, mais on ne sait pas pourquoi, ça ne marche pas…

Notons aussi qu’en banlieue, les plus dangereux sont souvent ces lycéens hyper violents. Et parlons des réalités de ces territoires, sur lesquels les violences explosent, dont on cache la plupart des incidents et qui, entre déni et omerta, sont en train de sombrer sous les coups aussi d’une jeunesse de plus en plus incontrôlable et enragée, alors même qu’elle est portée à bout de bras par la solidarité nationale sur laquelle elle ne cesse de cracher.

A Cergy, c’est le même type de bande qui a envahi un centre commercial, cagoulés et masqués. Et on a aussi parlé de lycéens. Ce qui est insultant pour les lycéens. Et si on parlait aussi du nouveau jeu en vogue dans les cités dites sensibles : envahir les maisons ou appartements des gens pour régler leurs comptes au domicile de leur cible, en cas d’embrouilles au lycée ou dans la rue. Et ce sont souvent des gamins de 14 à 17 ans qui sont aussi dans ce genre de coups. Cagoulés, masqués, ils adaptent la tactique des black blocs pour tourmenter leur environnement. Les meneurs sont armés de barres de fer, les autres font masse, nombre et utilisent ce qui leur tombe sous la main. Il se trouve que des coups de pied dans la tête ce peut être très efficace pour éliminer ceux qui gênent et que l’activité est pratiquée sans remords ni gêne, voire comme un rite d’initiation par les gamins. Pour eux, être un homme, c’est être violent et s’imposer par la peur et l’absence de limite. Quand cela se passe quand des jeunes sont ciblés par ces bandes, quand des habitants se font agresser jusque chez eux, les policiers leur conseillent de déménager et mieux vaut les écouter car il n’y a pas de réponse, sauf à mettre sa famille en danger.

La police sait ce que certains politiques refusent de voir

Voilà ce que font vivre ce type de « lycéens » aux habitants de certaines villes de banlieues. On ne parle pas ici d’enfants exaltés, mais de personnes habituées à commettre des violences, qui se construisent par elles et en jouissent. Des personnes qui ont d’autant moins de limites que les politiques, qui devraient leur montrer en quoi cette attitude est délétère et les mène droit dans le mur, préfèrent leur faire croire qu’elles sont des victimes de la société. Les policiers connaissent ces profils. Ils connaissent leur « précocité ». Ils les traitent en tenant compte de leur violence et de leur dangerosité tout en respectant leurs droits. Ce faisant, ils les protègent et ils nous protègent et c’est bien là leur rôle.

Les politiques dignes de ce nom devraient avoir le courage de l’affirmer. Le maintien de l’ordre, c’est cela. A la fin, le bilan est parlant : pas de blessés, des armes récupérées, les meneurs identifiés, les suiveurs libérés. Bref, les politiques qui ont hurlé au fascisme pour se faire à peu de frais une image d’humaniste et de révolté au petit pied ont juste montré à quel point ils étaient indignes de confiance. Appeler lycéens des voyous pour mieux pouvoir nier leur violence, c’est leur donner l’impunité pour mieux continuer, cela fait partie de ce qui a rompu la confiance entre les politiques et leur représentation, entre les médias et leur lecteur, entre les élites et le peuple. Et cela est en train de mal tourner…



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Ancienne conseillère régionale PS d'Île de France et cofondatrice, avec Fatiha Boudjahlat, du mouvement citoyen Viv(r)e la République, Céline Pina est essayiste et chroniqueuse. Dernier essai: "Ces biens essentiels" (Bouquins, 2021)

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