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Israël-Palestine: cette Shoah qui ne passe toujours pas


Israël-Palestine: cette Shoah qui ne passe toujours pas
Roquettes tirées sur Israël depuis Gaza, 11 mai 2021 © Mahmoud Al-Hende \ apaima/SIPA Numéro de reportage : 01018601_000003

Lors de la Deuxième Intifada, déjà, notre maître à tous en journalisme, Françoise Giroud, écrivait dans Le Monde (1) : « Avec une rapidité remarquable, dès la première pierre de la seconde Intifada, un retournement s’est produit, saisissant (…) Enfin ! On a le droit de dire du mal des Juifs ! À Paris, les personnes de bon goût ne comptent que les morts palestiniens. Quand on arrive aux autres, on ne sait plus compter. D’ailleurs, ce sont des goujats… Les fils d’un peuple supplicié devraient savoir se tenir à table, je veux dire à la guerre, et prendre les coups sans les rendre, c’est à peu près ce qu’ici et là on entend et on lit (…) »

Qu’est-ce qui a changé depuis 20 ans ? Mis à part le soutien et la solidarité de quelques pays européens pour l’État hébreu (dont l’Autriche), ou l’une ou l’autre tribune courageuse, le constat de Françoise Giroud reste totalement d’actualité. 

Accumulant les roquettes ces derniers mois, le Hamas a bombardé sans sommation Israël, sous le prétexte d’échauffourées à Jérusalem, et chacun appelle Israël à la « retenue ». Imaginons que Paris et Lyon soient bombardés depuis la Suisse par une organisation inscrite par l’Union européenne, sur la liste des organisations terroristes… Qu’ordonnerait Emmanuel Macron à l’armée française ? De rester dans les casernes ? Que dirait Jean-Luc Mélenchon ? Appellerait-il à ce que cessent les « exactions » de l’armée française ? 

Les Israéliens vivent en ce moment terrés dans leurs abris, à demi protégés par un très coûteux « dôme de fer » sans lequel on déplorerait des centaines voire des milliers de morts israéliens.

Le Hamas, « branche palestinienne » des Frères musulmans (2) et stipendié par l’Iran, vise en priorité les civils ; Israël, au contraire, prévient les populations avant de bombarder des cibles militaires mélangées, à dessein, par le Hamas au milieu de sa propre population. 

Avec le Jihad islamique, le Hamas contrôle, via un coup d’État, d’une main de fer cet étroit territoire deux fois comme Marseille. Il avait promis de nouvelles élections transparentes en 2019 mais elles n’ont jamais eu lieu. 

Israël s’est retiré de Gaza en 2005. Ariel Sharon, Premier ministre à l’époque, a ordonné à l’armée israélienne de déplacer par la force les « colons juifs » qui vivaient là, au risque d’être comparé par ces irréductibles à un nazi. 

Depuis 2005, le Hamas aurait eu mille fois le loisir de gérer Gaza en bon père de famille, en paix avec Israël et l’Égypte. Il aurait pu transformer Gaza, avec les aides reçues de l’UE, des États-Unis et du monde arabe, en une sorte de Singapour du Proche-Orient, avec banques, start-ups et hôtels de luxe. Dans cette hypothèse, aucun blocus, ni du fait d’Israël, ni du fait de l’Égypte, n’aurait jamais eu lieu. 

Les Accords « Abraham » signés par les Émirats arabes Unis, Bahreïn, d’une part et Israël, d’autre part, sous l’égide de Donald Trump, démontrent que la paix entre Arabes et Israéliens est possible. La paix entre l’Égypte et Israël, signée en échange du retrait du Sinaï (trois fois la superficie d’Israël), est solide. 

Au lieu de cela, le Hamas préfère la lutte armée car signer la paix signifierait pour ce groupe islamiste mortifère de type mafieux, la disparition politique. Le mouvement terroriste sait que la guerre contre Israël ne peut être gagnée, mais il légitimise son pouvoir par la violence, prenant en otage sa propre population. En bombardant Israël, il savait que son peuple subirait des contre-mesures. Il n’en a cure. La souffrance actuelle des Gazaouis est la responsabilité du Hamas, pas d’Israël.

Quant à l’Europe, traumatisée par la Deuxième Guerre mondiale, elle est littéralement obsédée par le conflit israélo-palestinien pourtant de basse intensité par rapport à de nombreux conflits en Afrique.  Car notre continent y voit le moyen de se laver de sa culpabilité par rapport à l’Holocauste. Tant que l’ancien opprimé (le Juif supplicié à Birkenau transmuté en Israélien armé et fier de l’être) domine le nouvel opprimé (l’Arabe palestinien sans État), on peut, sans vergogne, rajeunir le vieil antisémitisme chrétien (« Les Juifs ont tué le Christ ») puis racial, devenu un délit pénal, sous des apparences, plus socialement acceptables, d’antisionisme. Avantage insigne des Palestiniens, par rapport aux Ouïghours ou aux Rohingyas… 

Car soyons intellectuellement honnêtes : si Israël était un pays arabe, l’Europe se soucierait comme d’une guigne des Palestiniens. 

Quant aux quelques contempteurs d’Israël sincèrement empathiques envers le peuple palestinien (il y en a), le clientélisme aura tôt fait de les conforter dans leur manichéisme : la cause palestinienne rapporte dix fois plus d’électeurs (et de lecteurs…) que la défense des intérêts Israël, la France comptant quelque 7 millions d’Arabes pour seulement 600 000 Juifs…

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(1) « Cette Shoah qui ne passe pas », Françoise Giroud, Le Monde du 13 juin 2002

(2) Ses fondateurs, Sheikh Ahmed Yassin, Abdel Aziz al-Rantissi et Mohammed Taha, sont tous les trois issus des Frères musulmans.



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est écrivain, journaliste et romancier belge. Dernière publication : "Tout doit disparaître", Edilivre (2021)

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