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Faut-il débattre de l’étoile verte ?


Doit-on vraiment parler de l’étoile verte qu’Abderrrahmane Dahmane, l’ex-conseiller à l’Elysée chargé de la diversité, a appelé tous les musulmans à arborer pour protester contre le débat sur la laïcité ?

Doit-on parler du tollé que cette initiative a provoqué ? Faut-il répondre à ce garçon sur la forme ou bien sur le fond de ce problème sans fond ?
Pour les autres, je ne saurais répondre. Et quant à moi, je ne sais pas non plus.

D’un côté, on ne peut pas faire comme si de rien n’était. Et d’un autre côté je préférerais faire comme si. Comme si on n’avait pas été confronté à ce précipité de tout ce qui me fatigue sur terre : l’inculture crasse, l’impudence assumée, le relativisme historique, le marketing politique, l’activisme buzziste et autres figures de la modernité moderne dont Abderahmane Dahmane est une émanation chimiquement pure, à l’image d’un Benjamin Lancar, d’un Arthur ou d’un Frank Ribéry.

Ce n’est pas tant l’injure paranégationniste faite aux victimes de la barbarie hitlérienne qui me choque, et dont je n’ai de toute façon pas envie de parler – m’évitant par ce silence de tomber sous le coup de nos lois – que l’injure faite en général au XXème siècle et aux précédents par un décérébré qui relève probablement moins de Mahomet que de Nintendo.

Et ce soir, j’ai de la peine pour les musulmans de France et d’ailleurs, qu’ils soient buveurs de bière, pratiquants occasionnels voire barbus modérés, sur qui rejaillit forcément le coup de pub gogol de leur coreligionnaire.

J’ai de la peine pour l’UMP et la droite institutionnelle dont le mépris affiché pour le débat idéologique et la préférence radicale pour la com’ se trouvent un peu trop sévèrement sanctionnés par la bêtise d’un garçon qu’on avait quand même jugé digne d’être le conseiller direct du Président en matière d’immigration…

J’ai enfin de la peine pour Robert Badinter et tous les intellectuels qu’Abderahmane Dahmane a réquisitionnés pour sa défense, arguant qu’ils avaient établi bien avant lui le parallèle obligé entre l’actuelle « islamophobie » et l’antisémitisme des années 30 – sans jamais s’interroger sur la différence entre ceux à qui on voulait refuser autrefois l’assimilation et ceux qui la refusent aujourd’hui, mais c’est une autre histoire.

Le pire c’est que M. Dahmane n’a pas tout à fait tort. Certes, c’est le dernier des cons, mais aller chercher des immondices bêtes dans des cerveaux féconds, ça reste à la portée du dernier des cons. À l’instar des jeunes socialistes lecteurs de Badiou de je ne sais plus quel coin perdu qui avaient fabriqué des affiches comparant Sarkozy à Hitler, il a d’abord commencé par traiter Jean-François Copé de « néonazi ». Comme cela ne suffisait pas à faire parler du drame personnel qu’il vit, et dont il suppose qu’il frappe aussi tous les fidèles de France, alors Abderahmane Dahmane a lancé, à défaut d’une fatwa qu’il n’est pas habilité à prononcer, son gadget magique de l’étoile verte. Ce faisant, il n’a fait que traduire en langage youtubien les thèses de MM Badinter et Hessel et les résolutions adoptées à l’unanimité par les congressistes du MRAP, de la LICRA et de la Ligue des Droits de l’Homme. Lesquels ne méritaient pas tant d’indignité. Enfin, si, un peu, quand même…



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De l’Autonomie ouvrière à Jalons, en passant par l’Idiot International, la Lettre Ecarlate et la Fondation du 2-Mars, Marc Cohen a traîné dans quelques-unes des conjurations les plus aimables de ces dernières années. On le voit souvent au Flore.

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