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David Lisnard: la culture sauvera les Français

Bonnes feuilles de l'ouvrage de David Lisnard et Christophe Tardieu


David Lisnard: la culture sauvera les Français
Christophe Tardieu et David Lisnard © Hannah Assouline

David Lisnard, maire de Cannes et figure montante de la droite, n’en finit pas d’occuper le terrain des idées. Causeur publie les bonnes feuilles de La culture nous sauvera, l’essai coécrit avec Christophe Tardieu publié ce jour et offrant de nombreuses propositions[tooltips content= »Editions de l’Observatoire, avril 2021″]1[/tooltips]


Si le maire le mieux élu de France —dont la gestion efficace et volontariste de la vaccination Covid-19 à Cannes a prodigieusement agacé Olivier Véran et sa politique vaccinale de l’escargot — n’est encore officiellement candidat à rien, il ne manque pas de convictions et s’apprête à lancer une plateforme programmatique musclée pour sortir la France du déclin. Pour incarner ce plan de sauvetage, par exemple à l’élection présidentielle, sa réponse aux médias est inlassablement la même: on verra plus tard, les idées d’abord…

Dans le grand entretien qu’il nous avait accordé il y a quelques semaines (Voir notre entretien du 18 mars 2021), David Lisnard dessinait déjà les contours d’un programme et d’une philosophie politique, sans langue de bois, et sans reculer devant les sujets qui fâchent. Le constat est accablant, et sans doute partagé par une majorité de Français : la France s’enlise depuis trente ans dans un mal-être anxiogène, et les pouvoirs successifs se sont contentés de gérer « au mieux » un déclin que l’immobilisme politique rend inéluctable et accélère. Crise économique, chômage croissant, crise de l’éducation, terrorisme, ensauvagement de la société, baisse de la richesse par habitant, perte de souveraineté numérique, désindustrialisation, islamogauchisme, montée des populismes, mode suicidaire de la « décroissance » écolo, recul des valeurs républicaines chez les jeunes… N’en jetez plus, tous les signaux sont au rouge ! Et la crise sociale post-Covid qui s’annonce devrait générer des gilets jaunes à la chaîne.

David Lisnard le soulignait, la France —comme l’Europe—, a renoncé à être une puissance au profit du statu quo, alors qu’elle dispose des atouts et des talents pour rayonner dans tous les domaines. Parmi les solutions proposées, outre le retour de la culture du risque en lieu et place du mortifère « principe de précaution », la restauration de l’autorité de l’État, la confiance dans le progrès et la science, dans l’éducation des fondamentaux à l’école, les investissements massifs dans les nouvelles technologies, ou encore la fin de l’État obèse et de l’infantilisation des Français, le maire de Cannes insistait longuement dans notre entretien sur le rôle capital de la culture pour inverser la pente du déclin.

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Dans La culture nous sauvera, essai coécrit avec Christophe Tardieu, et dont nous vous proposons quelques extraits, David Lisnard précise sa pensée. Si la culture à elle seule ne peut remettre la société française sur le chemin de la prospérité et de l’apaisement, elle peut fortement participer à guérir notre pays du mal-être collectif qui le ronge. Pour les auteurs, la France doit redevenir la patrie de la culture, fière de ses racines, et projetée vers l’avenir. La culture, comme l’éducation, serait une « exigence civilisationnelle et une ardente nécessité économique et sociale ». Le livre est dédié, ce n’est pas anecdotique, à Samuel Paty et à toutes les victimes de l’obscurantisme.

EXTRAITS

Le fléau « woke » 

Nul ne peut contester qu’il existe aujourd’hui une fragilité majeure de la nation comme communauté de règles, de modes de vie, de valeurs et de destin. Des statues de personnages célèbres déboulonnées à l’écriture inclusive en réalité excluante, des censures universitaires émanant des woke ou des décolonialistes montrent que le passé historique, la langue française et la transmission du savoir sont l’objet d’attaques sectaires, sous le vocable bien trouvé aux États-Unis de « cancel culture » (culture de l’annulation).

Cette situation est insupportable pour ceux qui aiment leur pays, ce qui est évidemment notre cas. C’est pourquoi, il nous semble essentiel de mobiliser nos forces et de nous concentrer sur les moyens de sortir de ces multiples crises qui, à terme, sont potentiellement destructrices de notre société. Or, il existe un domaine qui peut contribuer à éviter à la France de tomber dans le maelstrom. Il s’agit du secteur culturel.

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Une économie qui rapporte

Qui sait que le produit intérieur brut des industries culturelles en France atteint 2,3 % de notre PIB ? Qu’avec 45 milliards d’euros de chiffre d’affaires, les ressources du secteur culturel sont supérieures à celles de notre industrie automobile et pharmaceutique ? Qui aurait imaginé l’importance de l’emploi dans la culture avec 620 000 emplois directs et le double de personnes qui touchent un revenu lié aux activités culturelles ? Qui se doute que sur les 90 millions de touristes qui visitaient annuellement la France avant la crise sanitaire du Covid-19 et dépensaient 42 milliards d’euros, pas loin des deux tiers avaient effectué au moins une visite culturelle ? Qui aurait pu croire que les biens culturels français ont une croissance de leurs exportations qui est le double de celles des autres biens de consommation?

Il existe une culture française, n’en déplaise au président Macron 

Nous croyons en la force universelle de l’œuvre artistique comme en la grandeur culturelle de la France, à son potentiel, tout en étant lucides sur les affaiblissements et parfois les renoncements résultant de décennies de déconstruction post-soixante-huitarde.

Contrairement à une affirmation entendue en 2017 par celui qui est devenu président de la République, selon laquelle « il n’y a pas de culture française » mais « une culture en France », nous pensons, bien au contraire, qu’il existe bel et bien une culture française et qu’elle est même consubstantielle par définition à notre pays, à notre peuple, à notre nation : quand la culture va mal, la France aussi. Cette culture française n’est pas figée, bien sûr, elle est une réalité subtile qui dépasse les modes et le temps. Elle est construite sur les fondations de la logique aristotélicienne, du théâtre grec, de la pensée romaine, de la beauté antique, bâtie avec l’art chrétien du Moyen Âge, magnifiée à la Renaissance, autour des humanités. Elle trouvera son apogée aux XVIIe et XVIIIe siècles, et encore de grands moments de gloire avec ses artistes au XIXe siècle. La culture française d’aujourd’hui, si vivante, est issue de cette histoire.

Comment nier en effet qu’il existe bien une architecture française, un roman français, une poésie française, un cinéma français, des mouvements artistiques français, une chanson française et tant d’autres formes artistiques dont on reconnaît l’origine à la première vision ? Il serait totalement absurde de considérer que cette culture française est par nature supérieure aux autres, mais il est encore plus ridicule de penser qu’un artiste de notre pays est coupé de toutes références culturelles et de sa propre histoire.

Nous n’avons pas honte de dire que notre culture française est spécifique, pour ne pas dire singulière, et riche, pour ne pas dire brillante. Force est de constater qu’elle est aussi un exemple pour le monde entier, ce qui n’empêche qu’elle a pu bénéficier par le passé et encore maintenant, d’heureuses influences extérieures. C’est cette force et cette qualité de la culture française qui sont aujourd’hui en péril, par relativisme paresseux, contraintes excessives sur la création, renoncement à en faire une exigence individuelle et une ambition nationale. Voilà qui donne du sens au combat qu’il faut livrer pour la culture, qui conjugue enracinement et universalité, effort et créativité, héritage et rupture, émancipation et cohésion, prospérité et panache.

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La culture, antidote à l’ensauvagement ?

« Ensauvagement » de la société : le terme, volontairement polémique, a été lâché par Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur, dans une interview donnée au quotidien Le Figaro. La question n’est pas ici de juger de la réalité de cette situation, donc de l’opportunité de l’usage de ce terme. En revanche, ce vocable qui semble devenu structurant dans le débat politique du moment est intéressant pour l’objet du présent ouvrage en considérant son antonyme : « civilisé ». La condamnation d’une société perçue comme de retour à un état de violence sauvage exige, par symétrie, la nécessité de rétablir les voies de la civilité qui constitue l’être humain dans une civilisation. La culture, qui est faite d’un ensemble de liens sociaux, d’élévations intellectuelles et de codes comportementaux communs, construit précisément notre civilisation.

Les réponses immédiates doivent être policières et judiciaires face à cet ensauvagement, aux formes hélas croissantes de délinquance juvénile, aux forces centrifuges qui fragmentent la nation française : l’individualisme exacerbé, le consumérisme, les communautarismes et l’économie parallèle fondée sur le trafic de stupéfiants… L’injection de civilité, c’est-à-dire un partage organisé et massif de culture par des connaissances liées à des valeurs chargées de sens, s’impose davantage.

Les représentations culturelles communes qui permettent des échanges apaisés et un bon niveau de sociabilité sont le fruit d’apprentissages qui exigent méthode, rigueur, efforts, ce qui n’exclut pas les plaisirs ludiques. Elles sont par ailleurs porteuses à la fois d’enracinement et d’universalité. C’est l’un des enjeux majeurs de l’éducation artistique et culturelle (EAC) pour tous les élèves, c’est-à-dire offrir à chaque enfant, adolescent et jeune adulte de notre pays l’apprentissage de connaissances culturelles communes, la rencontre physique avec des artistes ainsi que la découverte de grandes œuvres et le partage des émotions qu’elles suscitent. Elle doit devenir la grande politique nationale pour renforcer la société, stimuler les individus dans leur capacité émancipatrice et les rassembler au-delà de leurs particularités identitaires. Un peuple mûr et majeur qui s’élève grâce à l’éducation artistique et culturelle devient le ciment de la nation, évitant ainsi le danger de l’explosion en populations antagonistes.

Le but d’une éducation culturelle et d’une instruction artistique de qualité est bien de « déghettoïser » les esprits, d’ouvrir l’horizon des connaissances, de contribuer à doter chaque individu de confiance en soi et en la société, de fournir les clefs de l’épanouissement personnel et de transmettre suffisamment d’éléments de patrimoine intellectuel commun. Chaque Français doit pouvoir disposer d’un savoir culturel porteur de fierté commune, donc de cohésion sociale et de cohérence nationale. C’est ainsi que nous pourrons, en France, faire sens et faire lien – ces deux exigences qui, selon Régis Debray, constituent la vocation même du politique. L’éducation artistique et culturelle peut contribuer à apporter ce « supplément d’âme », ce « sacré laïc » dont a besoin la France pour résister aux forces centrifuges de destruction. Nous en serons quittes pour accepter et affronter les procès en sorcellerie conservatrice ou en reproduction de représentations mentales aliénantes… En l’époque actuelle « déconstruite » par les décennies postmodernes, c’est bien le relativisme, c’est-à-dire cette volonté de n’instaurer aucune hiérarchie, qui conduit à une forme de nihilisme mettant en péril la liberté, l’égalité et la fraternité.

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Romancier, journaliste, conseiller politique, createur de l'Université du Futur

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