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Covid-19: et si c’était le sucre ?

L’obésité est un facteur clé de la saturation des hôpitaux


Covid-19: et si c’était le sucre ?
Le service de réanimation de l' Hopital Claude Bernard de Metz lors de l'épidemie de coronavirus, le 8 avril 2020 © POL EMILE/SIPA Numéro de reportage: 00955278_000024

Alors que 17% des adultes en France sont obèses, ils représentent 83% des patients dans nos unités de réanimation.


Sur le terrain, dans les unités de réanimation respiratoires, il n’y a plus de doute : les personnes obèses représentent une proportion élevée, voire très élevée, des patients atteints de formes graves du Covid-19. Cité par Le Monde, l’anesthésiste réanimateur Hervé Quintard du CHU de Nice constate que « parmi nos 40 patients, 95 % sont en surpoids ou obèses, avec souvent une hypertension artérielle et un diabète associés ». À l’échelle nationale, les chiffres sont presque aussi spectaculaires mais la surreprésentation des personnes obèses parmi les malades ayant développé les formes graves du Covid-19 est une évidence : alors que 17% des adultes en France sont obèses, ils sont actuellement jusqu’à sept fois plus nombreux dans les unités de réanimation où ils représentent 83% des patients. Les données recueillies au Royaume-Uni vont dans le même sens. De même, les premières études conduites aux États-Unis indiquent que la mortalité des personnes obèses en réanimation y est également très élevée, allant jusqu’à 70% chez les personnes atteintes d’obésité sévère.

La France à l’arrêt

Le taux élevé d’obésité de la population française a donc un lien direct avec le nombre de malades nécessitant d’être hospitalisés, nombre qui lui-même explique la décision radicale de confinement prise par le gouvernement. En effet, si la France est à l’arrêt, c’est faute de lits de réanimation, d’appareils respiratoires, de produits anesthésiants et de personnels soignants ; ces pénuries nous contraignant à devoir ralentir la pandémie afin d’éviter l’engorgement puis l’effondrement de notre système de soins.

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Outre son terrible bilan humain, la pandémie du coronavirus atteint à différents niveaux l’intégralité de la population en mettant en péril l’avenir de notre système de santé et de notre économie. Compte tenu du caractère phénoménal de ces conséquences, la nécessaire réflexion sur l’anticipation des prochaines pandémies implique de remettre au premier plan la question de la prévention de l’obésité dans notre société.

Les chiffres français de l’obésité ont explosé

Le surpoids excessif n’est ni le résultat d’un manque de volonté ni l’apanage des personnes faibles. En effet, on sait maintenant que le combat contre l’obésité n’est pas un combat contre des personnes mais contre les multinationales de l’agro-alimentaire qui sont jusqu’à présent parvenues à échapper à une remise en cause générale de leur logique et aux coûts et conséquences réelles de leur modèle économique. Et de fait, la  sociologie de ce phénomène démontre en effet qu’il dépasse largement les choix et les comportements individuels. La biologie humaine n’a pas changé en 40 ans mais les chiffres de l’obésité ont explosé : entre 1981 et 2016, le pourcentage de gens obèses en France est passé de moins de 6% à près de 17% aujourd’hui.

Et la situation chez les mineurs n’augure rien de bon dans ce domaine. C’est donc très probablement l’offre alimentaire – pour ne prendre que cet élément de l’équation – qui structure la demande et la consommation. C’est la production et la distribution qui sont en faute, pas les consommateurs.

Sevrage (et résilience) collectif(s)

L’épidémie de Covid-19 met en lumière le fait que le coût de l’obésité n’est pas seulement économiquement lourd (ce que nous savions déjà, l’obésité prédisposant à tout une série de maladies aux traitements socialement très coûteux comme les cancers, les maladies cardiaques ou le diabète) mais que, dans certaines circonstances, il peut devenir insupportable. Cette pandémie oblige ainsi non seulement à repenser notre politique de santé mais à l’accompagner de mesures fermes contre les lobbies de l’alimentation. L’industrie agro-alimentaire doit accompagner volens nolens un sevrage collectif du sucre blanc raffiné  et autres ingrédients contribuant à la pandémie d’obésité.

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Dans quelques mois, nous serons enfin prêts à affronter le coronavirus, tout comme nous étions prêts en 1918 pour la guerre de 14. Il est de notre devoir de tirer les leçons de cette pandémie pour préparer la prochaine crise. Et puisqu’il est si difficile de prévoir l’avenir, la meilleure façon de s’y préparer est d’améliorer notre résilience collective. Cela passe par une politique rigoureuse de lutte contre l’obésité qui ne doit plus consister en les habituels messages culpabilisants à l’attention des consommateurs mais doit plutôt s’attaquer aux vrais responsables de ce fléau, à savoir l’industrie agroalimentaire.



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