21 avril, deux cent quatre-vingt-dix-huitième


Ce qu’il y a de stupéfiant chez les socialistes, c’est qu’à chaque fois qu’ils perdent, ils donnent l’impression de tomber des nues. Ils n’en reviennent pas. Ils sont éberlués. Et toujours ils pleurnichent. Comprenez-les : eux si honnêtes, si droits, si en avance sur leur temps, comment peuvent-ils être punis de la sorte par des électeurs sans cœur et sans âme ? Alors qu’à côté, à droite, on a beau nager dans les affaires, les condamnations, les écoutes, on est quand même élu et réélu (Balkany !) – et d’ailleurs à gauche aussi, plusieurs maires  sortants sévèrement casserolés ont fait un carton au premier tour. À croire que la malhonnêteté paye !

C’est que les socialistes qui sont plein de conscience morale manquent cruellement de conscience métaphysique – autant que de pragmatisme. Ils croient que la corruption, les trafics d’influence ou les passe-droits peuvent influer sur la décision de l’électeur. Ils croient que les lois sociétales qu’ils ont fait voter sont passées dans l’opinion sous prétexte qu’elles sont passées dans la Constitution. Ils croient que l’électeur raisonne comme Edwy Plenel et fantasme comme Najat Valllaud-Belkacem. Mais l’électeur se fout d’Edwy Plenel et trouve simplement que Najat Vallaud-Belkacem est une très jolie femme. Non, ce que veut l’électeur, c’est que son petit quotidien s’améliore et que ses petites coutumes ne soient pas mises à mal. Or, ce gouvernement fait le contraire depuis deux ans. Si l’électeur pourra éventuellement lui pardonner ses échecs sociaux (parce qu’il est pragmatique et qu’il sait que la droite au pouvoir n’aurait pas fait mieux – la seule politique possible étant aujourd’hui celle qui consiste à sauver les meubles), il l’a eu plutôt mauvaise qu’on vienne le déranger dans ses préjugés.

Il en a eu un peu ras-le-bol de passer pour un raciste parce qu’il a quelques inquiétudes identitaires, pour un homophobe parce que le mariage pour tous et la théorie du genre ne l’emballent pas tant que ça, pour un sadique parce qu’il trouve que les lois que l’on prépare sont encore moins sévères que celles déjà en règle, et pour un ringard qui ne comprend rien au monde parce que Terra Nova a décrété ce que devait être ou pas la nouvelle humanité. Il en a surtout marre qu’une majorité minoritaire malmène systématiquement sa minorité majoritaire. Bref, l’électeur se rebiffe et ose un chouïa chahuter ceux qui le nient depuis si longtemps, au risque que ceux-ci tombent dans un déni encore plus grand – spectacle réjouissant dont on ne se lassera jamais, il est vrai.

 



Vous venez de lire un article en accès libre.
Causeur ne vit que par ses lecteurs, c’est la seule garantie de son indépendance.
Pour nous soutenir, achetez Causeur en kiosque ou abonnez-vous !

Article précédent Municipales : l’autre enracinement
Article suivant Thèse, antithèse, foutaise
Pierre Cormary est blogueur (Soleil et croix), éditorialiste et auteur d'un premier livre, Aurora Cornu (éditions Unicité 2022).

RÉAGISSEZ À CET ARTICLE

Le système de commentaires sur Causeur.fr évolue : nous vous invitons à créer ci-dessous un nouveau compte Disqus si vous n'en avez pas encore.
Une tenue correcte est exigée. Soyez courtois et évitez le hors sujet.
Notre charte de modération